Communication scientifique
Session of 7 janvier 2014

Bio-persistance et distribution systémique des particules injectées par voie intra-musculaire : quelle incidence sur la tolérance à long terme des adjuvants aluminiques ?

MOTS-CLÉS : Adjuvants immunologiques. Fasciite. Hydroxyde d’aluminium
Biopersistence and systemic distribution of intramuscularly injected particles: what impact on long-term tolerability of alum adjuvants?
KEY-WORDS : Adjuvants, Immunologic. Aluminum Hydroxide. Fasciite

Romain K. GHERARDI *, Josette CADUSSEAU * François-Jérôme AUTHIER *,**

Les auteurs déclarent n’avoir aucun lien d’intérêt en relation avec le contenu de cet article.

Résumé

L’oxyhydroxide d’aluminium (alum), un composé nano-cristallin formant des agglomérats, est utilisé pour ses propriétés d’adjuvant vaccinal depuis 1927. Les mécanismes par lesquels il stimule la réponse immune restent mal compris. Généralement bien toléré, l’alum pourrait cependant être à l’origine de troubles chroniques occasionnels chez des sujets prédisposés. De rares sujets vaccinés présentent des myalgies retardées et diffuses, un état d’épuisement chronique et des troubles cognitifs invalidants. Ces symptômes sont associés à la persistance prolongée (jusqu’à douze ans) de macrophages chargés en alum au site d’immunisations intramusculaires antérieures, constituant une lésion nommée myofasciite à macrophages (MFM). Les manifestations sont celles du syndrome de fatigue chronique/encéphalomyélite myalgique (CIM 10 G93.3 de l’OMS). Elles ont été utilisées comme paradigme du « syndrome auto-immun/inflammatoire induit pas les adjuvants » (ASIA). Les troubles cognitifs stéréotypés rappellent ceux des travailleurs exposés aux particules d’aluminium inhalées. Des facteurs de susceptibilité individuelle sont probables, influant notamment sur la bio-persistance de l’adjuvant (particulièrement longue chez les patients), et sa diffusion à distance des points d’injection. Chez la souris des particules bio-persistantes, telles que des nano-hybrides aluminiques fluorescents, injectées dans le muscle sont en partie transportées à distance par des cellules de la lignée monocytaire, d’abord vers les ganglions lymphatiques de drainage puis, probablement via le canal thoracique, vers la circulation sanguine, avec une accumulation retardée et progressive dans le cerveau (cellules microgliales). Quoique constante, la pénétration cérébrale reste extrêmement faible en conditions normales ce qui est cohérent avec la bonne tolérance générale à l’alum malgré son potentiel neurotoxique. Néanmoins, la biodistribution systémique et cérébrale des particules augmente considérablement sous l’influence de la signalisation MCP-1, chimioattractant majeur des monocytes, dont la production est sujette à des variations interindividuelles importantes liées à l’âge, et à des facteurs génétiques et environnementaux. Nous venons d’identifier l’élévation sélective du MCP-1 comme biomarqueur circulant de la MFM.

Summary

Aluminium oxyhydroxide (alum), a nanocrystalline compound forming agglomerates, has been widely used as an adjuvant of vaccines since 1927. The mechanisms by which it stimulates immune responses remain poorly understood. Although generally well tolerated, alum may occasionally cause chronic health problems in presumably susceptible individuals. Some individuals may present with delayed onset of diffuse myalgia, chronic exhaustion and cognitive dysfunction, associated with = long-term persistence (up to 12 years) of alum-loaded macrophages at site of i.m immunizations, forming the so-called macrophagic myofasciitis (MMF). Symptoms are consistent with the chronic fatigue /myalgic encephalitis (CFS/ME) syndrome, and were used as a paradigm of “autoimmune/inflammatory syndrome induced by adjuvants” (ASIA). Cognitive dysfunction is reminiscent of that described in workers exposed to inhaled Al particles. Individual susceptibility factors may influence both alum biopersistence and diffusion away from injection sites. Biopersistent particles, e.g. fluorescent alum-coated nanohybrids, injected into mouse muscle are captured by monocyte-lineage cells and then carried to distant organs, to draining lymph nodes, and then to blood, probably via the thoracic duct, with delayed and accumulative translocation to brain (microglial cells). Brain penetration occurs at extremely low level in normal conditions which is consistent with good tolerance to alum despite its high neurotoxic potential. However, systemic diffusion of particles considerably increase under the potentiating effect of MCP-1, the main monocyte chemoattractant factor, which production is subjected to important variations linked to age, genetic, and environmental factors. Selective MCP-1 increase is the sole circulating biomarker in MMF patients.

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* Université Paris Est, Inserm, U955-E10, Faculté de Médecine, Créteil.** Hôpital H. Mondor, Centre de Référence Neuromusculaire GNMH, Créteil.

Bull. Acad. Natle Méd., 2014, 198, no 1, 37-53, séance du 7 janvier 2014