Communication scientifique
Session of 22 avril 2025

Anticorps monoclonaux anti-amyloïde Beta contre la maladie d’Alzheimer en 2025 : prudence ou scepticisme ?

MOTS-CLÉS : Maladie d’Alzheimer, Anticorps monoclonaux anti-amyloïde Beta ;aducanumab, Lecanemab, Donanemab
Anti-amyloid monoclonal antibodies: cautions or skepticism?
KEY-WORDS : Alzheimer's disease, Anti-amyloid monoclonal antibodies, Anti-amyloid therapies, Aducanumab, Lecanemab, Donanemab

Gilles Bouvenot*

G. Bouvenot déclare des liens ponctuels avec GSK, Sanofi, Vifor Pharma, Sage Therapeutics, Steba Biotech, Alnylam, Tesaro Bio France, Insmed, GenSight, Pierre Fabre Médicaments, Lupin, Dyne.

Résumé

La prise en charge de la maladie d’Alzheimer constitue l’un des problèmes majeurs de santé publique dans nos sociétés. Or, il faut se résoudre à constater que l’histoire des médicaments de la maladie d’Alzheimer n’a été jusqu’à ce jour qu’une suite de déceptions et de désillusions face aux attentes de la communauté des soignants, des associations de patients, des aidants et des Sociétés savantes. Les leçons du passé à propos de tacrine, puis des autres inhibiteurs de l’acétylcholine estérase et d’un antagoniste des récepteurs N-méthyl-D-aspartate, invitent à se garder de tout excès d’optimisme pour les médicaments à venir. Les anticorps monoclonaux antiamyloïde Beta, considérés comme « prometteurs » et dont l’efficacité attendue repose sur le « paradigme » discuté de la responsabilité du développement de plaques amyloïdes dans la genèse de la maladie, justifient un regard critique. Les performances actuellement connues du lecanemab (Leqembi® Autorisation de mise sur le marché USA 2023) et du donanemab (Kisunla® AMM USA 2024), après le retrait de l’aducanumab (Aduhelm® USA 2022) et les échecs du développement de plusieurs autres anticorps, font en effet débat. Leur efficacité, qualifiée dans la littérature de modeste quand ce n’est pas de marginale ou même de discutable, n’est reconnue que dans les formes débutantes et pour des durées limitées, tandis que leurs effets indésirables, principalement un œdème ou des d’hémorragies encéphaliques visualisés par imagerie, de survenue non exceptionnelle, ne laissent pas d’inquiéter, même quand ils ne sont pas cliniquement symptomatiques. La balance bénéfices/risques de ces produits, considérée comme encore incertaine par nombre de spécialistes, mérite donc d’être affinée. Et, indépendamment des questions éthiques posées par leur prescription, leur arrêt et leur financement, il y a de sérieuses raisons d’en limiter strictement l’usage à la population cible véritablement atteinte de la maladie (de plus en plus reconnue comme hétérogène) et précisée par l’Agence Européenne des médicaments pour en améliorer la sécurité d’emploi.

Summary

Managing Alzheimer’s disease is one of the major public health challenges in our societies. However, we must accept that the history of Alzheimer’s drugs has been up to now a series of disappointments and disillusions in the face of the expectations of the community of caregivers, patient associations, carers and learned societies. The lessons of the past concerning tacrine, then acetylcholine esterase inhibitors and an N-methyl-D-aspartate receptor antagonist invite us to be careful from now on any excess optimism for future drugs. The anti-amyloid beta monoclonal antibodies, considered promising and whose expected efficacy is based on the discussed “paradigm” of the responsibility for the development of amyloid plaques in the genesis of the disease, justify a critical look. The current known performance of lecanemab (Leqembi® Market authorisation USA 2023) and donanemab (Risunla® USA 2024), following the withdrawal of aducanumab (Aduhelm® 2022) and the failure to develop several other antibodies, is indeed controversial. Their effectiveness, described in the literature as modest when not marginal or even questionable, is only recognized in beginner forms and for limited durations, while their adverse effects, mainly edema or cerebral hemorrhages visualized by imaging, of non-exceptional occurrence, do not cease to worry even they are not clinically symptomatic. The benefit/risk balance of these products, which is still considered uncertain by many specialists, therefore deserves to be refine. And, regardless of the ethical questions raised by their prescription, stopping and funding, there are serious reasons to strictly limit their use to the target population truly affected by the disease (increasingly recognized as heterogeneous) and specified by the European Medicines Agency.

Accès en ligne : https://doi.org/10.1016/j.banm.2025.02.009

*Académie nationale de médecine, 16, rue Bonaparte 75006 Paris, France

Bull Acad Natl Med 2025;209:725-30. Doi : 10.1016/j.banm.2025.02.009