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Don d’organes : s’appuyer aussi sur les directives anticipées ![1]
Communiqué de l’Académie nationale de médecine
30 novembre 2023
Au nom de la solidarité et du respect de l’autonomie de la personne, la Loi de bioéthique[2] encadre le recueil du consentement au prélèvement d’organes sur le corps d’une personne décédée sur la base du principe du consentement présumé. Le registre des refus recueille les oppositions, mais une expression favorable, par le port d’une carte de donneur d’organes ou en informant sa famille, est encouragée.
Le constat, fait depuis des années, est que le nombre des personnes inscrites sur le registre des refus est très faible et que peu de personnes expriment leur position en famille sur ce sujet. En cas de décès brutal pouvant conduire à un prélèvement d’organes en vue de greffes, il en résulte chaque année, en France, une opposition au prélèvement dans 30% à 34% des cas depuis 2017 (1-2), l’opposition étant le plus souvent exprimée par la famille sous le choc d’un deuil brutal et ignorant la volonté du défunt.
Le constat est aussi fait que plus du tiers des prélèvements d’organes sur le corps de personnes décédées, en vue de greffes, sont aujourd’hui pratiqués chez des personnes de plus de 65 ans (2), l’âge élevé du donneur étant cependant en général compatible avec un fonctionnement satisfaisant du greffon pendant une durée prolongée chez la personne greffée. Ce constat invite à considérer que toute personne, quel que soit son âge, peut se déclarer être favorable au don d’organes. Les médecins jugeront alors du bien-fondé ou non de prélever certains greffons.
Parallèlement, la pénurie d’organes est régulièrement soulignée, du fait de l’augmentation du nombre de candidats en liste d’attente, près de 20 000 actuellement, alors que seulement 5 900 greffes d’organes sont réalisées annuellement en France (2).
Il importe donc de rechercher des solutions permettant de réduire le pourcentage des oppositions au prélèvement d’organes sur le corps de personnes décédées et d’en améliorer les possibilités. Une telle solution est à rechercher du côté des directives anticipées prévues dans le cadre législatif concernant la fin de vie.
Au nom de l’autonomie de la personne humaine, la Loi relative aux droits des malades et des personnes en fin de vie encadre l’expression de leur volonté[3] sur la base d’un consentement exprimé sous la forme de directives anticipées. Le constat est fait que seuls 18% des Français auraient établi leurs directives anticipées relatives à la fin de vie, le pourcentage étant de 33 % chez les plus de 65 ans, et que 20% des Français ignorent l’existence même de cette possibilité (3).
Afin, d’un côté, de motiver plus fortement, par l’adjonction d’une dimension altruiste, l’anticipation de la situation de fin de vie et, d’un autre côté, de tenter de réduire les oppositions au don d’organes liées à l’ignorance de la position du défunt, il apparait opportun d’envisager que la rédaction des directives anticipées relatives à la fin de vie puisse aussi permettre à la personne concernée d’exprimer son avis favorable à un don d’organes en vue de greffes (4).
Restant attachée au principe du consentement présumé comme fondement de la Loi relative au prélèvement d’organes sur le corps de personnes décédées, en vue de greffes, et voulant voir se réduire le niveau trop élevé des oppositions à ce prélèvement, souvent liées à l’ignorance de l’entourage sur la volonté du défunt à ce sujet, l’Académie nationale de médecine propose que :
– la rédaction des directives anticipées relatives à la fin de vie permette aussi, dans une visée altruiste, de formuler un avis favorable au prélèvement d’organes en vue de greffes, si les circonstances du décès le permettent ;
– cette proposition soit accompagnée d’une information renforcée du public sur l’importance de la rédaction des directives anticipées (5) ;
– l’étude des implications législatives d’une telle proposition soit enclenchée.
Références
– Lebranchu Y., Conclusions sur les avancées en transplantation, Acad. Ntle. Med., avril 2022, 206, 4, p. 551-553
– Agence de la biomédecine, Rapport d’activité 2022
– Sondage BVA octobre 2022, Le Figaro, 22 février 2023
– Boudjema K., Mantion G., Rapport de l’Académie nationale de médecine, Enjeux médicaux et sociétaux de la transplantation hépatique en France, Séance du 9 mai 2023
– Communiqué de l’Académie nationale de médecine, Fin de vie : l’importance de rédiger ses directives anticipées, 7 décembre 2021
[1] Communiqué de la Plateforme de Communication Rapide de l’Académie.
[2] Article L. 1232-1 du Code de la Santé Publique
[3] Article L. 1111-1 du Code de la Santé Publique