Résumé
La persistance d’évènements indésirables graves liés à des dysfonctionnements dans le circuit du médicament au sein des établissements de santé a incité les Académies nationales de médecine et de pharmacie à étudier concrètement leurs conditions de survenue et les moyens pratiques à mettre en œuvre pour prévenir les accidents. Les remarques et recommandations qui découlent de ce travail concernent les caractéristiques cindyniques générales du circuit, les diverses formations auxquelles tous les intervenants des établissements de soins doivent être soumis, les améliorations à apporter aux différentes étapes du circuit, depuis la livraison à la pharmacie à usage intérieur par le fournisseur jusqu’à l’administration du médicament au patient, ce que l’on peut attendre du contrôle informatique du circuit à toutes les étapes de son déroulement et les résultats que l’on peut espérer compte tenu des moyens à mettre en œuvre.
Summary
The persistence of serious adverse drug events stemming from dysfunctions in the drug circuit within hospitals have lead the French National Academies of Medicine and Pharmacy to concretely determine the conditions in which those adverse effects happen and the practical means to carry out to prevent accidents. The remarks and recommendations resulting from this work pertain to the general risk-related characteristics of the circuit, the various trainings all hospital staff must undergo, the improvements to make at each stage of the circuit — from the delivery to the pharmacy for hospital internal use by the supplier to the administration of the drug to the patient — as well as what can be expected of the computer control of the circuit at all stages and what can be expected of it considering the means to carry out.
RECOMMANDATIONS
Sur la sécurisation du circuit du médicament dans les établissements de soins
La sécurisation du circuit du médicament dans les établissements de soins repose sur les actions et moyens suivants :
Formations de tous les participants au circuit du médicament — appliquées à tous les personnels contribuant au circuit du médicament — sur la gestion des risques, véritable initiation à la cindynique 1 — sur l’informatique en milieu hospitalier — aux techniques de communication — sur l’éducation thérapeutique du patient.
1 Cindynique — science du danger et des accidents, de la détection et du signalement des risques et des erreurs à la recherche de la sécurité par l’exploitation positive de l’erreur avec retour d’expérience.
Optimisation du circuit physique du médicament
De l’industrie au stockage en pharmacie à usage intérieur (PUI) — améliorer la lisibilité des étiquetages particulièrement sur les solutions injectables ;
— lire obligatoirement les étiquetages, à chaque étape, depuis le stockage en PUI jusqu’à l’administration au malade ;
— faire réaliser le stockage en PUI par un personnel dédié compétent.
La prescription médicale — exiger une prescription médicale lisible, datée et signée (quel que soit son mode de transmission) permettant d’identifier le prescripteur ;
— faire assurer cette prescription par un médecin diplômé, personnellement ou par délégation écrite, notamment pour certains médicaments.
Son exécution par le pharmacien — définir le vocabulaire utilisé tout au long du circuit. Le ‘‘ trilinguisme ’’ actuel (DCI ou DCF, dénomination commerciale et nom générique) est source d’erreurs. La DCI et la dénomination commerciale devraient être associées dans les renseignements fournis en ligne, — faire analyser et valider l’ordonnance par le pharmacien selon des données scientifiques reconnues, publiées et tenues à jour, — renoncer à la distribution globale et adopter la dispensation journalière, individuelle, nominative (DJIN), — privilégier la préparation assurée en pharmacie au moyen d’armoires de stockage, mobiles, fermées, à tiroirs personnalisés, qu’elles soient ou non robotisées, — proscrire l’armoire de pharmacie de stockage dans les services, gérée par le personnel infirmier, sans contrôle de la pharmacie sur la dispensation, hors le cas particulier des médicaments d’urgence ou d’usage courant.
Le rôle de l’infirmier — organiser l’administration du médicament au patient, étape ultime effectuée par l’infirmier, dans une atmosphère de calme. Rien ne doit venir détourner l’attention du personnel infirmier durant l’acte d’administration.
Informatisation du circuit du médicament — c’est une des conditions essentielles de la sécurisation, — elle doit être intégrée dans l’informatisation totale du dossier unique du patient, — il faut une harmonisation et une compatibilité des matériels et des logiciels pour assurer la fiabilité des interfaces dans les échanges d’information, — il faut disposer en ligne des références et des bases de données mises à jour en temps réel, — l’accès au dossier unique du patient doit être ouvert à tous les acteurs de soins, dans leur seul domaine de compétence, au moyen de mots de passe spécifiques régulièrement contrôlés, — l’identification du patient au moment de l’administration est indispensable.
Le port d’un bracelet code-barres en est actuellement le meilleur support, — la traçabilité informatisée du produit depuis sa réception en PUI jusqu’à l’administration au patient sera le résultat de toutes les mesures préconisées ci-dessus, — ces mesures doivent figurer dans des procédures écrites accessibles à tous.
Ce rapport, dans son intégralité, peut être consulté sur le site www.academie-medecine.fr *
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L’Académie, saisie dans sa séance du mardi 3 novembre 2009, a adopté le texte de ce rapport à l’unanimité
Bull. Acad. Natle Méd., 2009, 193, no 8, 1921-1924, séance du 3 novembre 2009