Rapport
Session of 11 février 2003

Sur la demande d’autorisation d’exploiter, en tant qu’eau minérale naturelle, à l’émergence et après transport à distance, l’eau du captage « Lomega » situé sur la commune de Jonzac (Charente Maritime)

MOTS-CLÉS : eau minéralisée. jonzac (charentes maritimes). source lomega.
KEY-WORDS : france.. mineral waters

H. Leclerc

RAPPORT au nom de la Commission XI (Climatisme — Thermalisme — Eaux minérales)

Sur la demande d’autorisation d’exploiter, en tant qu’eau minérale naturelle, à l’émergence et après transport à distance, l’eau du captage ‘‘ Lomega ’’ situé sur la commune de Jonzac (Charente Maritime)

Henri LECLERC Par lettre en date du 30 octobre 2002, le Directeur Général de la Santé sollicite l’avis de l’Académie nationale de médecine relatif à la demande d’exploiter en tant qu’eau minérale naturelle, à l’émergence et après transport à distance, l’eau du captage ‘‘ Lomega ’’ situé sur la commune de Jonzac.

La station thermale de Jonzac est une création récente, un arrêté du 15 juillet 1985 ayant accordé l’autorisation d’exploiter une eau minérale naturelle provenant de la source ‘‘ Soenna ’’. Le captage de la source Soenna s’est fait jusqu’à ce jour à partir d’un forage unique qui puise l’eau entre 1 654 m et 1 863 m de profondeur. Compte tenu du développement important de la station (1 000 curistes en 1987, plus de 7 000 en 2001) il est apparu nécessaire à la collectivité, propriétaire de l’ouvrage, de réaliser un second forage captant le même aquifère à environ 800 m du forage de la source Soenna.

C’est ce qui a conduit M. Belot, sénateur maire de Jonzac, Président du Conseil Général de Charente Maritime à demander l’autorisation d’exploiter l’eau minérale naturelle provenant de la source ‘‘ Lomega ’’ au lieu-dit ‘‘ Beauregard ’’.

Caractéristiques hydro-géologiques

Le forage se trouve sur une parcelle située à environ 2 km au sud-est de la ville de Jonzac. Les eaux des deux sources ‘‘ Soenna ’’ et ‘‘ Lomega ’’ sont captées dans des grès du Trias à une profondeur comprise entre 1 600 et 1 850 m. Ce réservoir est surmonté des formations du jurassique moyen et supérieur ainsi
que des formations du crétacé inférieur (cénomarien, turonien). La température au toit du réservoir est de 61° C. L’âge de l’eau est estimé à 4 000 ans.

Le forage comprend une succession de trois tubages en acier cimentés sur leur contour extérieur, terminés par une crépine dans les formations du Trias. Il est équipé d’une pompe immergée à 252 m de profondeur. Des essais d’interfé- rence ont été réalisés en pompage simultané sur les captages de Soenna et de Lomega pour observer des modifications de la composition chimique de l’eau.

Il est apparu que, jusqu’à 50m3/h, les variations de concentration des éléments chimiques majeurs n’étaient pas significatives.

Le débit d’exploitation est donc limité à 50m3/h sauf en période d’étiage de la rivière Seugne où le débit sera limité à 30m3/h.

La protection naturelle de l’aquifère, compte tenu de la profondeur du captage, apparaît satisfaisante. Dans ces conditions le périmètre de protection sanitaire est réduit à l’abri construit autour de la tête de captage.

Analyses physico-chimiques et microbiologiques

Les analyses réglementaires du laboratoire d’études et de recherches en hydrologie de l’AFSSA (deux analyses faites à 6 mois d’intervalle) montrent que l’eau de la source Lomega est fortement minéralisée (>1 500mg/L) avec un profil de type sulfaté, chloruré sodique. C’est également une eau sulfurée. La concentration en sulfates est de l’ordre de 2,3g/L, celle des chlorures de l’ordre de 1,5g/L. A noter la présence d’arsenic à la concentration de 325 g/L, de fluor à un taux légèrement supérieur à 1,5mg/L.

La recherche de composés organiques volatils et semi-volatils, de pesticides organochlorés et d’autres hydrocarbures s’est toujours révélée négative.

La radioactivité α globale et β globale est supérieure aux valeurs guides respectivement de 0,1Bq/L et 1Bq/L recommandées par l’OMS pour les eaux de consommation humaine, mais cette eau n’est pas destinée à être consommée.

Les analyses bactériologiques réalisées à six mois d’intervalle sont conformes aux exigences de la réglementation. Aucun signe de contamination fécale n’a été décelé. L’absence de tous les indicateurs bactériens montre que l’aquifère est protégé de toutes contaminations microbiennes. La présence de Legionella n’a jamais été détectée au seuil de 50 UFC/L.

Transport à distance

L’eau thermale sera transportée depuis la tête de puits jusqu’à l’entrée de la galerie technique des thermes de Jonzac par une canalisation en PEHD ou en
polypropylène de 125 mm de diamètre. Le tube ainsi que ses accessoires seront pré-isolés par une mousse de polyuréthane, avec enveloppe en PVC.

La longueur prévue du réseau sera de 1 260 m. Bien que le descriptif technique de ce transport ne pose aucun problème particulier, il apparaît que l’installation de transport de l’eau n’a pas été réalisée au moment des prélèvements réglementaires et qu’aucune analyse n’a été exécutée pour garantir la stabilité des caractéristiques chimiques et microbiologiques de l’eau à l’émergence.

Indications thérapeutiques

L’eau exploitée sur le forage de Beauregard provient du même réservoir aquifère (grès du Trias) que celui capté sur Soenna. Ces deux eaux présentent une composition chimique analogue. Elles sont toutes les deux hyperthermales, de type sulfaté, chloruré sodique. C’est la raison pour laquelle il est souhaité par l’exploitant que la source Lomega bénéficie de l’agrément rhumatologie et voies respiratoires au même titre que la source Soenna.

Le demandeur sollicite en outre l’agrément phlébologie compte-tenu de la nature de l’eau proche de celle de Rochefort. Cette demande est étayée par une étude pharmacodynamique tendant à montrer que l’eau du forage Beauregard aurait une action contracturante sur des fragments veineux humains, action amplifiée par la noradrénaline. Les auteurs concluent que ces premiers résultats doivent être confirmés pour mieux appréhender l’effet favorable de cette eau dans le traitement des pathologies veineuses périphé- riques.

Conclusion

La demande qui nous est présentée concerne l’autorisation d’exploitation du forage Lomega pour alimenter l’établissement thermal de Jonzac. Les caractéristiques physico-chimiques de cette eau excluent son usage comme eau de boisson, en buvette. Cette demande a reçu un accueil favorable de la DRIRE, de la DDASS, du Conseil Départemental d’Hygiène. L’Agence Française de Sécurité Sanitaire des aliments donne également un avis favorable mais précise que cet avis ne porte que sur la demande d’autorisation d’exploitation à l’émergence.

Il apparaît donc que l’eau de la source Lomega, en raison de ses caractéristiques hydrogéologiques, de sa composition chimique et de sa qualité bactériologique, représente la ressource complémentaire recherchée depuis plusieurs années pour assurer le développement futur de la station thermale de Jonzac.

Pourtant l’exploitation après transport à distance ne pourra être effective qu’après la pose de la canalisation afférente aux thermes et réalisation des prélèvements et analyses réglementaires.

La commission XI, réunie le 10 décembre 2002 sous la présidence du Professeur Claude Boudène, propose donc que l’Académie ne donne son avis définitif qu’après l’installation du dispositif de canalisation jusqu’à la galerie technique des thermes et vérification de la stabilité des composants chimiques et microbiologiques de l’eau. En ce qui conçerne les orientations thérapeutiques, elle retient qu’une étude pharmacodynamique préliminaire a été réalisée.

Elle souhaite pourtant que des essais cliniques comparatifs et complémentaires soient mis en œuvre pour définir très précisément la ou les indications thérapeutiques.

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L’Académie, saisie dans sa séance du mardi 11 février 2003, a adopté ce rapport à l’unanimité.

Bull. Acad. Natle Méd., 2003, 187, n° 2, 435-438, séance du 11 février 2003