Cette séance bi-académique, organisée par l’Académie nationale de chirurgie et l’Académie nationale de médecine, est dédiée aux travaux de jeunes chirurgiens.
Dans son introduction, Dominique Franco rend hommage à Michel Huguier, créateur du DEA de Sciences Chirurgicales qui a transformé la recherche menée par les chirurgiens et développé l’envie de recherche chez les plus jeunes; il souligne la diversité de la recherche en chirurgie et la modernité des techniques utilisées; il insiste sur l’innovation chirurgicale, son caractère hautement translationnel et se réjouit de la dynamique des start-up chirurgicales.
Utilisation des cellules souches olfactives dans la régénération des nerfs périphériques. Charlotte Jaloux, service de chirurgie de la main et plastique réparatrice des membres, Hôpital de la Timone, Marseille.
Les traumatismes des nerfs périphériques sont associés à des séquelles fonctionnelles et à des répercussions psychologiques et socio-économiques importantes d’autant que l’efficacité des traitements existants demeure insuffisante: après réparation micro chirurgicale, une méta-analyse a montré que 51 % des patients avaient une récupération motrice et 42 % une récupération sensitive satisfaisantes. La greffe de cellules souches apparaît dans ce contexte incertain comme une alternative prometteuse. Les cellules souches olfactives, localisées dans la cavité nasale, appartiennent au système nerveux périphérique et sont facilement accessibles chez tout individu vigile. Elles sont apparentées aux cellules souches mésenchymateuses, présentent une activité mitogène élevée et un fort potentiel de différenciation vers des cellules neurales. L’auteure rapporte un nouveau procédé de fabrication de ces cellules souches humaines isolées à partir d’une biopsie de 2 mm2 de muqueuse nasale; les cellules souches olfactives localisées dans la lamina propria, adjuvantes à la chirurgie de réparation du nerf facial et du nerf péronier, améliorent la récupération fonctionnelle grâce aux pouvoirs immunomodulateur et trophique des cellules transplantées. Appelées multipotent mesenchymal stromal cells (MSC), leurs critères de définition sont l’adhérence au plastique, l’expression des marqueurs de surface et l’absence d’expression des marqueurs hématopoïétiques, la différenciation en ostéoblastes, adipocytes et chondrocytes in vitro. Aucune migration des cellules exogènes n’a été observée, témoignant d’un très faible risque de tumoroginicité et de métastase. Le mécanisme par lequel les cellules mésenchymateuses facilitent la régénération nerveuse est encore inconnu.
Les vésicules extracellulaires sont des nanoparticules produites par les cellules, présentes dans tous les fluides biologiques (sang, urine, lait maternel, ascite, salive); leur stockage est plus simple; leur utilisation permettrait de conserver les bénéfices paracrines des cellules souches sans leurs inconvénients (immunocompatibilité) car elles contiennent moins de protéines membranaires que les cellules souches. Leur utilisation en allogreffe est envisageable sans délai. Leur extraction a été validée et leur efficacité actuellement testée sur des modèles in vitro (cellules N2A) et in vivo.
Intérêt de l’impression 3D en chirurgie maxillo-faciale. Romain Nicot, Département de chirurgie orale et maxillo-faciale, CHU de Lille, INSERM U 1008, Lille.
L’impression 3D ou fabrication additive est une technique de fabrication de pièces en volume par rajout ou agglomération de matière. Elle permet l’obtention d’un objet physique à partir de données numériques obtenue par imagerie volumique ou issues d’une conception assistée par ordinateur converties en fichier 3D. En chirurgie orale et maxillo-faciale, l’impression 3D a séduit dès les années 1990 en raison de la complexité anatomique du squelette facial et de la place essentielle des capacités visuo-spatiales nécessaires à l’élaboration d’une reconstruction tridimensionnelle en adéquation avec les exigences esthétiques et fonctionnelles faciales.
Elle est utilisée en pédagogie dans l’apprentissage de l’anatomie normale et pathologique, dans l’enseignement et la formation chirurgicale de différentes spécialités (chirurgie cardio-vasculaire, chirurgie digestive, orthopédie, chirurgie cranio-faciale); les modèles imprimés en 3D améliorent la compréhension et la reconnaissance des structures anatomiques dans l’espace, la capacité de l’étudiant à visualiser l’anatomie.
En pratique clinique, l’impression 3D peut intervenir dans un objectif cartographique ou de planification pré-chirurgicale, pour aider au choix de la taille ou de la forme d’un implant, pour pré-conformer des plaques d’ostéosynthèse avant l’intervention chirurgicale. Un niveau d’utilisation supérieur consiste à réaliser une planification de l’intervention chirurgicale assistée par ordinateur (CAO). Aidé d’un ingénieur biomédical, le chirurgien détermine les traits d’ostéotomie, le mouvement souhaité des pièces osseuses; cette planification est ensuite transférée au sein de guide de coupe, de forage ou de positionnement. Un troisième niveau est représenté par la conception et la production de dispositifs médicaux implantables, le chirurgien aidé d’un ingénieur biomédical détermine par CAO la forme d’un implant produit par impression 3D dans le matériau choisi qui peut être du titane ou des biocéramiques. Elle permet l’exécution de tâches complexes avec une haute précision tout en réduisant significativement le temps opératoire et le temps d’ischémie, améliore les résultats esthétiques et la précision du transplant. Plus que jamais, l’objectif est de rendre possible l’impossible.
Son développement devra être mis en perspective avec le développement plus récent des réalités augmentée et virtuelle permettant le transfert de la planification pré-chirurgicale sans impression de transferts physiques.
Perspectives de vectorisation de thérapie photodynamique par des vésicules extra-membranaires dans le traitement de métastases péritonéales d’origine colique. Amandine Pinto, Université de Paris, UMR 1275 CAP Paris-Tech, Paris.
Dans ce travail mené sur des souris, l’auteure évalue l’effet de la vectorisation par des vésicules extra-membranaires (EVs) issues de cellules souches mésenchymateuses dans un modèle murin de carcinose péritonéale d’origine colique en comparant l’effet de la vectorisation par des EVs sur sa biodistribution et sur l’efficacité de la thérapie photodynamique (PDT) après injection intra-péritonéale de CT26. Les résultats montrent que les EVs permettent une majoration de la sélectivité intra-tumorale par rapport à la formulation libre ou liposomale de mTHPC (Foslip®). La PDT était efficace dès 48 heures avec traduction par les EVs d’une réponse immunitaire anti-tumorale essentiellement pro-inflammatoire de type macrophages M1 et lymphocytaire T-CD8+. La prolifération intra-tumorale était significativement diminuée par rapport aux contrôles. La PDT vectorisée par des EVs permettrait un prolongement de la survie par rapport aux contrôles.
En conclusion, chez la souris, la vectorisation par des EVs permet une sélectivité tumorale importante à l’origine d’une diminution de la toxicité médicamenteuse, d’une régression de la prolifération tumorale et d’un prolongement de la survie. La PDT vectorisée dans la carcinose a permis l’obtention de brevets et la création de start-up.