Communication scientifique
Session of 25 septembre 2018

L’évolution du concept d’agent infectieux

MOTS-CLÉS : MALADIES INFECTIEUSES. BACTERIES. VIRUS. PARASITES. PRIONS. RETROTRANSPOSONS. PARASITES ENDOGENES. SENESCENCE
The evolution of the concept of infectious agent
KEY-WORDS : INFECTIOUS DISEASES. BACTERIA. VIRUSES. PARASITES. PRIONS. RETROTRANSPOSONS. ENDOGENOUS PARASITES. SENESCENCE

Patrick BERCHE*

L’auteur n’a aucun lien d’intérêt.

Résumé

Les travaux expérimentaux de Louis Pasteur ont démontré le rôle des germes dans les maladies infectieuses. Ce concept a permis d’identifier de nombreux agents infectieux (bactéries, protozoaires, champignons, virus), chacun étant spécifique d’une maladie donnée. On a pu ainsi prévenir et combattre les maladies contagieuses par les vaccins et les médicaments anti-infectieux. Cela a entraîné une chute de la mortalité par infection et un essor démographique sans précédent de la population humaine. On a d’abord cru que le conflit entre un agent pathogène et un hôte entraînait une infection aiguë aboutissant à la guérison ou la mort. En réalité, cette interaction est beaucoup plus complexe et peut prendre un caractère chronique, un agent infectieux pouvant induire des cancers ou des affections inflammatoires chroniques. Récemment, de nouveaux agents infectieux ont été découverts, notamment les prions à l’origine de démences transmissibles et mortelles. Ces agents non conventionnels sont des protéines qui déclenchent une destruction des neurones en changeant leur conformation tridimensionnelle. Le fait que certaines démences à prions soient d’origine génétique montre une frontière ténue entre maladies transmissibles et maladies génétiques. Une autre surprise est venue du séquençage du génome humain : 45 % de notre patrimoine génétique est constitué d’éléments mobiles, principalement des rétrotransposons, qui sont des cicatrices d’infections virales très anciennes, fossiles de rétrovirus accumulés dans le génome des mammifères et des hominidés depuis des millions d’années. Ces rétrotransposons peuvent se mobiliser avec l’âge et s’insérer au hasard dans des gènes. On les a incriminés dans le processus de sénescence et dans certaines maladies génétiques. Ces découvertes montrent l’extraordinaire diversité des agents infectieux et de leurs manifestations pathologiques.

Summary

The experimental work of Louis Pasteur has demonstrated the role of germs in infectious diseases. This concept has made it possible to identify numerous infectious agents (bacteria, protozoa, fungi, viruses), each of which being specific to a given disease. It has thus been possible to prevent and combat contagious diseases by vaccines and anti-infective drugs. This has resulted in a drop in infectious mortality and an unprecedented growth of the human population. It was first thought that the conflict between a pathogen and a host resulted in an acute infection leading to healing or death. In reality, this interaction is much more complex, and can become chronic, thus inducing chronic inflammatory diseases and cancers.   Recently, new infectious agents have been discovered, including prions that cause transmissible and fatal dementias. These unconventional agents are proteins that trigger the destruction of neurons by changing their three-dimensional conformation. The fact that some prion dementias are of genetic origin shows a tenuous boundary between communicable and genetic diseases. Another surprise came from the sequencing of the human genome: 45 % of our genetic heritage is made up of mobile elements, mainly retrotransposons, which are scars of very old viral infections, fossils of retroviruses accumulated in the genome of mammals and hominids for millions of years. These retrotransposons can mobilize with age and insert randomly into genes. They have been incriminated in the process of senescence and in certain genetic diseases. These discoveries show the extraordinary diversity of infectious agents and of their pathological manifestations.

* Institut Pasteur de Lille, 1 rue du Professeur Calmette, 59000 Lille.

Bull. Acad. Natle Méd., 2018, 202, no 7, 1379-1391, séance du 25 septembre 2018