Rapport
Session of 18 avril 2023

Rapport 23-11. Les zones sous-denses, dites « déserts médicaux », en France. États des lieux et propositions concrètes

MOTS-CLÉS : Déserts médicaux, Numerus clausus, Numerus apertus, Service médical citoyen, Difficultés d’accès aux soins, Installation des jeunes médecins, Guichet unique, Besoins en médecins au niveau des micro-territoires, Exercice multisite des médecins, Cumul emploi-retraite, Partage des soins, Parcours de soins
Low medical density areas, so called « medical desertification », in France. Overwiew of the situation and concrete proposals
KEY-WORDS : Low medical density areas, Numerus clausus, Numerus apertus, Medical community service without any obligation, Health care access difficulties, Settlement of young doctors (one-stop shot), Medical micro-territories requirement, Medical multi-site practice, Combined employment and retirement, Shared health care, Health care pathway

Patrice Queneau et Rissane Ourabah

Les auteurs de ce rapport déclarent n’avoir aucun lien d’intérêt avec le sujet

Résumé

L’extrême gravité de la pénurie en médecins en France et la complexité du problème posé ont conduit l’Académie nationale de médecine à établir un état des lieux précis et à exprimer les recommandations suivantes : (i) proposer d’urgence : l’instauration d’un service médical citoyen d’un an pour les médecins nouvellement diplômés dans le cadre d’un engagement contractuel s’appuyant sur leur conscience professionnelle et excluant toute forme de régulation ou de coercition, notamment concernant l’installation. Ce service médical citoyen permettrait de renforcer la médicalisation des zones sous-denses et d’éclairer le choix de carrière des jeunes médecins par une expérience de terrain ; toutes mesures favorisant le cumul emploi-retraite des médecins récemment retraités tout en permettant à leurs cotisations de générer des droits supplémentaires ; favoriser l’exercice multisite qui a déjà fait ses preuves dans notre pays lorsqu’il fut confronté à un déficit de soignants après la seconde guerre mondiale, et qui devrait retrouver une place privilégiée dans la lutte contre les déserts médicaux (par exemple un groupe de 5 médecins exerçant ensemble pourrait assurer une journée de consultations par semaine dans un cabinet décentralisé, avec des aides de la collectivité locale qui l’accueille) ; une sensibilisation de la population au bon usage de la médecine, incluant le respect des rendez-vous pris auprès des médecins et autres soignants, et la reconnaissance du service rendu par le système de santé français eu égard à sa complexité, son coût et ses difficultés d’exercice ; (ii) mettre en place au plus vite les autres mesures suivantes : redonner au médecin du temps médical : en optimisant les délégations de tâches à d’autres professionnels de santé (infirmiers, maïeuticiens, pharmaciens…) dans le cadre de parcours de soins coordonnés par le médecin, en respectant le champ de compétence de chacun ; en allégeant la charge administrative en simplifiant les réglementations et en recrutant des assistants médicaux, des secrétaires et des personnels informatiques ; promouvoir et faciliter l’exercice et les installations précoces dans les zones sous-denses (guichet unique, incitation au cumul emploi-retraite, exercices multisites, consultations délocalisées, bon usage de la télémédecine) ; renforcer la sécurité des médecins dans les zones sensibles ; réactiver les visites à domicile, en les valorisant financièrement et en les facilitant techniquement ; densifier localement les interactions avec l’hôpital ; augmenter immédiatement et significativement le « numerus apertus », en l’adaptant aux besoins des territoires, évalués avec les élus locaux, les médecins (libéraux, hospitaliers, universitaires) et les autres professionnels de santé, ainsi que les représentants des patients ; diversifier l’origine territoriale et sociale des étudiants par des incitations et des accompagnements dès le lycée ; développer les stages en zones sous-denses dès le deuxième cycle, en augmentant le nombre de stages et de maîtres de stage, et en créant des tuteurs ; éviter toute coercition concernant l’installation en médecine libérale, de même que lors des stages dans la quatrième année du DES de médecine générale.

Summary

The severe shortage of physicians in France and its complexity have prompted the National Academy of Medicine to conduct a thorough assessment of the situation and to make the following recommendations: (i) urgent proposals: implement a one-year medical service for newly graduated physicians, as part of a contractual commitment based on ethical principles, and without constraints or regulations regarding their installation. This citizen medical service would strengthen medical services in under-resourced areas and provide practical experience for young physicians; encourage retired physicians to continue working while allowing their contributions to generate additional benefits; to combat medical deserts, encourage and give priority to multi-site practice, which has already proven successful in our country during the post-war health care shortage. For instance, a group of five doctors practicing together could provide one day of consultations per week in a decentralized practice, with support from the local community hosting the practice; raise public awareness of the proper use of medicine, respect for appointments and recognition of the service provided by the French healthcare system, given its complexity, cost and difficulties of implementation; (ii) implement the following measures as soon as possible: optimize the delegation of tasks to other health professionals (nurses, midwives, pharmacists) to free up medical time and ensure coordinated care within the scope of the physician’s competence; simplify regulations, reduce administrative burdens, and recruit medical assistants, secretaries, and computer specialists; encourage early practice and installation in under-supplied areas by offering one-stop shops, incentives for combined employment and retirement, multi-site practice, off-site consultations, and effective use of telemedicine; strengthen physician security in sensitive areas; make home visits financially rewarding and technically easier; improve local interactions with hospitals; increase the number of available medical places by adapting them to the needs of the territories, based on an evaluation by local elected officials, physicians (private, hospital, university), health professionals and patient representatives; diversify the territorial and social origins of students through incentives and support measures starting in high school; develop internships in under-resourced areas starting in the second cycle by increasing the number of internships and internship supervisors and by creating tutors; avoid any coercion to enter private practice, both during the fourth year of the DES in general medicine and during the one-year medical service.

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Bull Acad Natl Med 2023;207:860-71. Doi : 10.1016/j.banm.2023.06.003