Publié le 22 janvier 2021

Faut-il modifier les gestes barrière face à l’irruption de variants du SARS-CoV-2 ?

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Faut-il modifier les gestes barrière face à l’irruption de variants du SARS-CoV-2 ?

Communiqué de l’Académie nationale de médecine

22 janvier 2021

 

Les mutations du SARS-CoV-2 ont donné lieu à la diffusion de plusieurs clones plus transmissibles dont le variant VOC 202012/01, apparu en Angleterre au mois de septembre, et le variant 501.V2 qui a émergé au mois d’octobre en Afrique du Sud. Selon l’OMS, ces deux clones se sont rapidement propagés dans le monde, ayant atteint respectivement 60 et 23 pays et territoires, dont la France.

La circulation de variants plus contagieux dans la population risquant d’aggraver la situation épidémiologique actuelle, le Haut Conseil de la Santé Publique (HCSP) préconise de ne porter que des masques chirurgicaux ou des masques en tissu de catégorie 1 (norme Afnor) et d’étendre la distanciation physique de 1 à 2 mètres entre chaque personne.

Dès le 2 avril, l’Académie nationale de médecine avait recommandé le port obligatoire d’un masque « alternatif » dans l’espace public [1], suivant le principe qu’un masque anti-projections couvrant le nez et la bouche d’un porteur asymptomatique permettait d’éviter la transmission du virus dans son environnement immédiat. Bien que les masques en tissu de catégorie 2 et des masques artisanaux aient un pouvoir filtrant inférieur à celui des masques chirurgicaux, leur utilisation plus facile n’avait pas été écartée afin de privilégier l’acceptabilité d’une mesure contraignante devant être appliquée par tous, chaque jour et pour une longue durée [2].

Le renforcement proposé par le HCSP relève d’un principe de précaution que justifie le risque d’une reprise épidémique, mais il manque de preuve scientifique : variant ou non, le SARS-CoV-2 utilise les mêmes voies de transmission, avec la même aptitude à franchir les masques faciaux. L’efficacité des masques « grand public » n’a jamais été prise en défaut dès lors qu’ils sont correctement portés. Ainsi, l’étude épidémiologique ComCor montre que l’essentiel des contaminations a lieu dans les conditions qui permettent de retirer le masque [3].

L’abandon des masques en tissu de catégorie 2 et des masques artisanaux au profit de masques plus protecteurs remet en question le principe du masque protégeant l’entourage de celui qui le porte et induit l’exigence supplémentaire de protéger le porteur du masque. Un tel changement des recommandations concernant une pratique avec laquelle l’ensemble de la population avait réussi à se familiariser risque de susciter de l’incompréhension et de raviver les doutes sur le bien-fondé des préconisations officielles.

De même, s’il est bien admis que la distanciation physique est une mesure contre la transmission dont l’efficacité augmente avec l’espacement entre les personnes, il est évident qu’elle ne peut être respectée en tous lieux, que la limite soit fixée à 1 m (OMS), à 1,5 m (Allemagne, Belgique), ou à 2 m (Espagne, Italie, États-Unis). Étendre la distanciation de 1 à 2 m est une proposition défendable en théorie, mais inapplicable en pratique.

Consciente de la menace que représente la diffusion de variants plus contagieux dans la population, l’Académie nationale de médecine recommande de ne pas modifier les gestes barrière tels qu’ils ont été définis et améliorés depuis plusieurs mois, mais de répéter qu’ils sont plus que jamais nécessaires et de rappeler les bons comportements :

– le masque facial doit être porté en permanence dans l’espace public, même quand la distanciation physique devient supérieure à 1 mètre ;

– il doit couvrir la bouche et le nez et doit être changé au bout de 4 heures ou lorsqu’il devient humide ;

– l’état des masques en tissu doit être contrôlé après chaque lavage avec détergent, toute trace de détérioration devant entraîner leur élimination ;

– le port obligatoire du masque dans les transports en commun, où la distanciation physique ne peut être respectée, doit s’accompagner d’une précaution très simple : éviter de parler et de téléphoner.

 

 

 

 

[1] Communiqué de l’Académie nationale de médecine « Pandémie de Covid-19 : mesures barrières renforcées pendant le confinement et en phase de sortie de confinement», 2 avril 2020

[2] Communiqué de l’Académie nationale de médecine « Du bon usage des masques», 7 septembre 2020

[3] Institut Pasteur. Étude des facteurs sociodémographiques, comportements et pratiques associés à l’infection par le SARS-CoV-2 (ComCor), 8 décembre 2020.