Communication scientifique
Session of 4 octobre 2011

Contenus de la relation médecin-malade : place des modèles psychologiques

MOTS-CLÉS : empathie. ethique des médecins. hypochondrie. relations médecin-malade. transfert (psychanalyse)
The doctor-patient relationship : new psychological models
KEY-WORDS : empathy. ethics, medical.transference (psycholoy). hypochondriasis. physician-patient

Michel Lejoyeux

Résumé

Les déterminants classiques de la relation médecin malade intègrent les questions d’éthique de l’écoute, d’empathie et de contrat de soins. L’accès généralisé à des sites Internet modifie la connaissance que le patient a de la médecine et l’image qu’il se fait de son médecin et de sa maladie. Le dialogue médecin malade n’en reste pas moins une forme d’interaction spécifique et par essence asymétrique entre celui qui recherche une aide et celui qui la donne. Les approches relationnelles réhabilitent l’importance des aspects les plus fondamentaux de la médecine que sont, entre autre la patience, la tolérance, la souplesse relationnelle, le temps de l’entretien et de l’examen clinique.

Summary

The physician-patient relationship involves both ethical and psychological aspects. The notion of empathy has been extensively described, and this ‘‘ asymmetric dialogue ’’ has been shown capable of affecting patient behavior. The Internet, and particularly medical websites, are modifying the physician-patient relationship by providing patients with knowledge of their disease, and are changing the social perception of medicine. More recent theories on medical relationships underline the importance of patience, tolerance and the ability to accept opposition and disappointment.

INTRODUCTION

On pourrait appliquer à la relation médecin-malade, la phrase de Jean Delay sur l’humeur : c’est une notion facile à comprendre mais difficile à définir que celle de relation de soins. Il n’est en effet pas d’acte médical, aussi technique fût-il en apparence, qui ne comporte une part relationnelle et sans doute aussi émotionnelle.

Les expériences sur le placebo, le pouvoir de la suggestion et de la réassurance confirment s’il en était besoin que l’aspect relationnel de l’acte médical contribue aussi, directement, au soin que les aspects médicamenteux ou biologiques. Que le médecin le veuille ou non, le sache ou non chacun de ses actes agit aussi par ce qu’il procure au patient d’information, de réassurance sur sa maladie, de confiance en l’avenir, d’optimisme même. Quand un patient retrouve confiance en lui, en son avenir et en son médecin, il modifie le taux de ses neuromédiateurs, augmente sa sérotonine, change son comportement alimentaire et diminue même son risque de thrombose [1]. L’humanisme médical consiste peut-être, dans ses aspects relationnels, à souligner tout ce qu’un praticien met en œuvre de ressources et de potentialités thérapeutiques au moment où s’engage avec son patient un dialogue singulier.

Il écoute, rassure et propose, intégré à son diagnostic et son traitement, un projet ou un contrat de soins personnel dans lequel le malade pourra trouver une place centrale.

ÉTHIQUE ET RELATION, DEUX BASES D’UN SOIN DE QUALITÉ

En plus des principes généraux de l’éthique, de la tolérance, de l’ouverture à l’autre, existent des questions spécifiques à la relation médecin-malade. La première est celle du secret médical. Aucune relation ne peut s’engager si elle ne s’établit pas sous le sceau du secret et de la plus complète confidentialité. Cette question du secret, consensuelle en général, fait débat dès que l’on en envisage les déclinaisons pratiques ou individuelles. Comment partager le secret au sein d’une équipe hospitalière ?

Comment concilier les exigences de la tenue d’un dossier médical avec celles du secret ? Que faire des informations en relation avec des traumatismes que le malade livre en interdisant à son médecin de les transmettre à qui que ce soit. Ces aspects qui relèvent davantage de la déontologie que de la relation au sens strict n’en sont pas moins des conditions de l’exercice serein d’un soin respectant les principes de l’humanisme médical. Pour l’écrire plus directement, aucune relation ne saurait être éthique si elle ne garantit pas au patient la confidentialité de ce qui est confiée et l’absence de transmission intempestive des secrets ou informations banales ou intimes qu’il livre au médecin.

La relation de soin éthique reste un colloque singulier et, selon le mot de René Leriche, d’une « conscience qui rejoint une confiance ». Les approches psychologiques nous apprennent qu’elle commence par une demande de soin, d’aide ou de compréhension. « Il y a toujours eu un moment, écrivait ainsi Georges Canguilhem [2], où l’attention des praticiens a été attirée sur certains symptômes, par des hommes qui se plaignent de n’être pas normaux, c’est-à-dire identiques à leur passé, ou de souffrir. Si aujourd’hui la connaissance de la maladie par le médecin peut provenir de l’expérience d’autres médecins, elle commence toujours par un appel d’un malade. C’est donc bien parce qu’il y des hommes qui se sentent malades qu’il y a une médecine, et non parce qu’il y a des médecins que les hommes apprennent d’eux leur maladie. » M. Delage et A. Junod [3] prolongent l’approche de Canguilhem et définissent la relation thérapeutique comme une relation établie dans un lieu approprié (hôpital, institution soignante, cabinet privé), entre un sujet souffrant et un professionnel qualifié disposant d’un savoir et d’une pratique spécifique l’autorisant à se positionner dans la relation comme dispensateur de soins, ces soins pouvant revêtir diffé- rentes formes, de la prescription médicamenteuse jusqu’à d’autres actes chirurgicaux ou biologiques.

L’EMPATHIE COMME AIDE AU SOIN ET À LA DÉCISION

Dans sa description de l’empathie, le philosophe Emmanuel Lévinas suggérait que la capacité à se mettre à la place d’autrui était la base de toute relation, qu’elle concerne la médecine ou même les relations courantes entre les individus. Cette capacité à ressentir les émotions et les pensées de l’autre dépasse le simple raisonnement. Elle permet de prendre congé de soi-même, de ses certitudes comme de certaines de ses petites manies. Elle confronte à cet autre dont Emmanuel Lévinas [4] disait encore « Autrui en tant qu’autrui n’est pas seulement un alter ego. Il est ce que moi je ne suis pas ». La responsabilité est quelque chose qui s’impose à moi à la vue du « visage d’autrui ». Il suffit, et il faut, voir un visage, pour se sentir « ligoté », « otage d’autrui », convoqué à la responsabilité. Les travaux philosophiques sur l’éthique, la responsabilité du soignant et l’empathie éclairent d’un autre jour la relation de soin. Le philosophe spécialiste de la relation à autrui Paul Ricœur [5] propose la notion de pacte de soins qui regroupe celle d’information partagée et de relation réciproque de confiance et de qualité. C’est ce pacte de soins qui permet au médecin et au patient de prendre ensemble les décisions concernant la santé et qui favorise l’adaptation du patient à l’évolution de la maladie. Le médecin apprend à recevoir une parole déposée par le malade sans chercher immédiatement à apporter un réconfort. Il apprend aussi à supporter que surgisse l’angoisse sans recourir trop vite à un médicament ou une intervention. Il supporte encore que s’expriment l’amour, la haine, l’attachement et le rejet en se laissant affecter sans être bouleversé par la violence des mouvements affectifs.

Les modèles philosophiques rejoignent la psychologie et nous apprennent aussi que pour entrer en relation avec le patient, il est essentiel d’être d’abord en relation avec soi-même. Plus un médecin décode ses propres émotions, plus il est en relation avec ses désirs, ses peurs, mieux il pourra écouter, comprendre le patient dans son rythme chaque fois singulier de la traversée d’une maladie. Tout ce qui favorise la réflexion du médecin sur soi-même, sa connaissance, sa perception des bases de sa vocation, tout cela améliore ses capacités d’empathie et donc de soin.

Empathie et relation d’aide

La relation médecin-malade tient [6] de l’acte par lequel un sujet sort de lui-même pour comprendre quelqu’un sans éprouver pour autant les mêmes émotions que l’autre. Cette aptitude se nourrit de sa capacité à être branché sur la réalité de son patient. Elle permet d’avoir une idée concrète de la vie du malade, de pénétrer dans l’univers subjectif de son prochain tout en gardant son sang-froid et la possibilité d’être objectif. L’empathie est soutenue par de la congruence, c’est-à-dire par le fait de se sentir à l’aise, tant avec le patient et ses émotions, qu’avec ses propres émotions et son propre malaise. Etre authentique dans une relation permet ainsi au médecin de ne pas être paralysé par les affects de son patient.

Cette empathie est une composante essentielle de la relation d’aide développée par le psychologue Carl Rogers [7]. Elle consiste à sentir le monde intérieur du patient comme s’il était le nôtre, quoiqu’en n’oubliant jamais qu’il n’est pas le nôtre. Le « comme si » est en effet capital. Il assure la spécificité de la personne du médecin et la singularité de sa place dans la relation, même si cette place n’est pas en surplomb du patient et ne se relie à aucune supériorité. Le « chez soi » dans lequel il se glisse…

n’est pas le sien. Il ne prend pas la place du patient, il ne le guide pas, il ne se laisse aller à aucune identification ou fusion à l’autre. Cela signifie qu’il maîtrise son propre cadre de référence à lui, qu’il le met entre parenthèses, pour se situer aussi exactement que possible dans les référentiels de l’autre, sans s’y perdre.

Accompagner des personnes dans leur devenir, écrivait encore Carl Rogers, c’est une découverte extraordinaire, c’est un accomplissement de la vie, c’est la naissance qui se perpétue. À chaque instant, dans la relation, nous naissons. Nous co-naissons (selon le mot de Paul Claudel), nous naissons avec les autres… et cette co-naissance est certainement la meilleure définition de la relation d’aide. La technique requiert du médecin, en dehors des crises et des urgences un suprême degré de retenue, plutôt qu’un suprême degré d’initiative agissante. Elle encourage l’expression des attitudes et des sentiments, jusqu’à ce que la compréhension intuitive apparaisse spontané- ment. L’apparition de la compréhension est souvent retardée, et même parfois rendue impossible, par les efforts faits par le médecin pour la créer.

Le modèle de l’empathie se fonde sur l’idée que c’est le patient lui-même qui sait ce dont il souffre, dans quelle direction il faut chercher, ce que sont les problèmes cruciaux et les expériences qui ont été profondément refoulés. « Mon intervention est plus efficace quand j’arrive à m’écouter et à m’accepter et que je puis être moi-même… Si je puis accepter le fait que je suis agacé ou ennuyé par un malade ou par un étudiant, je suis aussitôt mieux disposé, selon toute probabilité, à accepter les réactions que provoque mon attitude ».

Le danger d’un excès d’empathie peut être d’attribuer de manière fausse à un patient des états subjectifs ou des besoins qu’il n’a pas. Ce danger est inhérent à toute relation médicale. Ce n’est que dans un processus interactionnel que peut donc se concevoir l’empathie, de telle sorte qu’une suffisante concordance s’établit entre les états et les besoins du patient et la compréhension qu’en a le médecin. La dimension empathique n’est jamais acquise. Elle s’oppose à une tendance actuelle de la médecine qui vise à faire une évaluation aussi précise et objective que possible des troubles présentés par le patient afin de fixer des buts thérapeutiques et de choisir les types d’intervention adaptés. On pourrait opposer les médecins du symptôme, réparateurs de machines, et les médecins du phénomène s’interrogeant sur l’ « être avec autrui » [3].

Réciprocité et empathie

Le sociologue Albert Memmi [8] incite à la réciprocité — forme appliquée de l’empathie — dans le sens le plus simple et le plus pratique. Chacun accepte d’entendre l’autre et de s’adapter en partie à ses attentes. Le praticien fait le premier pas en reconnaissant qu’il n’existe que par ses malades. Un praticien sans malade est comme un professeur sans étudiant. Il n’existe pas plus de médecin en soi que de professeur en soi ou de parents sans enfant. Dans ce type de relation, le patient ne prend pas son praticien pour une personne toute puissante, ni même pour un magicien. Et le médecin ne fait pas semblant d’être l’un ou l’autre. Il connaît ses limites et s’emploie à les faire connaître à ceux qui le consultent. Il dit ou plutôt fait comprendre qu’il n’est pas doué de tous les pouvoirs. Il rappelle, au risque de décevoir, qu’il n’est pas en possession des philtres contrôlant le destin, la santé et le bien-être. C’est sur cette base d’indépendance que le médecin et le malade acceptent leur fragilité et leur humanité réciproque.

UN DIALOGUE ASYMÉTRIQUE MAIS RESPECTUEUX DE L’AUTRE

Ce n’est pas parce que le dialogue entre un médecin et son malade ne relève pas d’un simple échange qu’il doit se transformer en une entreprise de maîtrise ou d’influence.

Les particularités de cette asymétrie et de ce dialogue sont justement des questions et des enjeux éthiques. Il ne suffit pas de dire que l’on dialogue simplement avec ses patients pour s’affranchir des particularités relationnelles qu’impose l’exercice de la médecine. Qu’on le veuille ou non, quelle que soit la chaleur relationnelle et l’écoute dont on fasse preuve, la relation médecin malade ne pourra relever d’une simple relation d’amitié ou de compagnonnage. Tout traitement médical s’établit dans une entreprise relationnelle et dans un dialogue qui s’instaure entre celui ou ceux qui souffrent et le ou les dispensateurs de soins. M. Delage et A. Junod caractérisent ce dialogue spécifique comme base de la relation médecin-malade. Ils en pointent les spécificités et les défis éthiques qui en découlent.

Le dialogue est asymétrique . Les protagonistes de la relation ne sont pas en position égalitaire. Celui qui souffre est en position de demande, d’attente de soins, tandis que celui qui soigne est en position — même à son corps défendant — de pouvoir, dès lors qu’il sait comment guérir ou qu’il est censé supposer savoir et disposer d’un ensemble de moyens techniques adaptés. Le pouvoir, qu’on le veuille ou non, est présent à de nombreux temps de la relation de soin. Il commence dès l’établissement du cadre thé- rapeutique (hospitalisation ou consultation, suivi ponctuel ou à long terme), lequel est le fait du médecin qui en fixe les règles même si, ensuite, c’est avec le patient que se construit le système thérapeutique. Le pouvoir et l’influence sont donc des éléments incontournables de la relation de soins mais ils ne se justifient que par le but qu’il se fixe et par leur caractère momentané et provisoire. Ils ne doivent pas relever de l’emprise ou de la maîtrise. Il en est de même des éléments qui accompagnent ce pouvoir : les conseils, la suggestion et les effets d’identification — le patient identifiant son médecin à des images parentales et/ou protectrices. Ces phénomènes existent mais ils ne doivent être ni recherchés ni entretenus délibérément.

Le dialogue médical n’est pas une conversation ordinaire . Le dialogue thérapeutique se situe dans une dimension d’empathie. L’empathie est une technique d’accès à la subjectivité d’autrui. Le médecin se met à la place de son patient. Sa capacité à se mettre à la place d’autrui est une des caractéristiques de sa compétence médicale. Le médecin fait ainsi un effort pour construire une relation de confiance fondée sur l’équité entre ce qu’il donne et ce qu’il reçoit. Le philosophe Martin Buber a pu parler d’un entre-deux des consciences entre le médecin et le malade dans cette relation de soins.

Le médecin doit être suffisamment « adéquat » pour fournir le traitement qui paraît lui convenir le mieux dans un constant aller-retour entre ses références théoriques, ses connaissances techniques, sa formation, les besoins et attentes du malade, sa personnalité, son histoire, sa culture et son environnement.

Le dialogue, au-delà du colloque singulier, se construit à plusieurs avec la famille, l’équipe soignante. Certaines consultations sont demandées par le patient spontanément alors que d’autres sont initiées ou imposées par la famille et même l’administration ou la justice en cas de troubles du comportement. L’établissement d’une relation médecin-malade implique le fait de recevoir les membres d’une famille pour écouter attentivement chacun dans ses demandes et ses avis. Cette empathie d’écoute et de compréhension à l’égard de l’ensemble de la famille est d’autant plus utile qu’il s’agit d’un enfant ou d’un patient ayant des difficultés à s’exprimer de manière autonome. Le dialogue à plusieurs peut concerner aussi les tiers actifs, ceux qui pèsent sur la relation thérapeutique tout en étant absents : une assistante sociale, un éducateur, un juge, une institution.

Le dialogue est « spécialisé » ou « généraliste ». Se distinguent ainsi des médecins spécialisés dans une technique, formés particulièrement à tel ou tel type d’approche ou d’intervention et des médecins plus généralistes dont les connaissances diversifiées permettent une organisation, c’est-à-dire une mise en relation, une mise en perspective, une approche diagnostique, un maniement des idées et des faits nouveaux. Leur type de dialogue avec le patient n’est pas le même, centré sur un acte dans un cas et centré sur l’individu dans l’autre.

 

LES RISQUES DU PATERNALISME ET DU CONSUMÉRISME

L’éthique médicale dans ses aspects relationnels subit une double menace. La première, connue depuis longtemps, est celle du paternalisme médical, considérant que le médecin omnipotent et omniscient élève autant qu’il soigne son malade.

L’autre dérive, plus récente, est celle du consumérisme dans laquelle le médecin gère sa patientèle comme une clientèle qu’il faut satisfaire, fidéliser et aussi exploiter.

Le modèle paternaliste est caractérisé par une communication unilatérale et asymé- trique allant du médecin vers le patient. L’information est descendante, autoritaire, transmise par une personne supposée, savoir, à une personne demandeuse. Ce modèle suppose que le médecin prend la meilleure décision pour son patient sans lui demander son avis. Il n’y a pas de délibération entre les deux intervenants et le praticien reste le seul décideur. Les principes de morale et de bienfaisance humaniste ont justifié ce modèle paternaliste appliqué à un patient affaibli. Ils sont aujourd’hui remis en question par les associations de patients et les demandes d’information et de participation active des malades. Le mode de relation paternaliste ou protecteur évolue donc du fait des « consommateurs de soins » et de l’accès à l’information médicale. La réflexion sur l’éthique de la relation permet de se garder du paternalisme ou tout au moins de ses excès. Elle invite à une sorte de « paternalisme bien tempéré » intégrant l’empathie, le respect de l’autre dans ses différences d’opinions, ses caprices et ses refus de soins. Elle limite la tendance que pourrait avoir le médecin à se donner, outre un rôle de soignant, une action de directeur de conscience ou de maître à penser ou à vivre.

Il s’agit pour qui prétend soigner, dans quelque domaine de la médecine que ce soit, de renoncer à la conviction qu’il connaît les chemins de la vie, du bonheur et du plaisir et que sa tâche consiste à y ramener le patient. Il doit, au contraire, découvrir avec celui qui se livre à lui, des joies et des cheminements spécifiques, probablement différents et peut-être contraires aux siens. Il lui arrivera d’être choqué, irrité par les confidences qu’il reçoit. Sa tâche ne consistera pas alors à détruire chez le patient ce qui le gêne mais à rechercher pourquoi il s’offusque ou se fâche.

Un modèle consumériste d’inspiration nord-américaine est en train d’apparaître et de menacer, lui aussi, l’éthique de la relation. Selon ce modèle, médecin et malade interagissent sur un pied d’égalité, l’un réalise un service que l’autre achète. La recherche du consentement et le respect absolu des libertés individuelles constituent la base de la relation dans le modèle consumériste. Le malade n’est plus un patient, mais un client, le médecin est un prestataire de service qui adopte plutôt une position défensive face à un usager du système de soins potentiellement plaignant et accusateur. Ce modèle influence aussi la rémunération du patient et la manière dont cette rémunération est perçue de part et d’autre. Autrefois, le patient honorait son médecin. Les honoraires ont fait place à une rémunération tarifée et le plus souvent versée par un tiers. L’acte médical est dès lors revendiqué comme un dû et non comme un service rendu.

 

L’information et la communication sont, elles aussi, modifiées par le modèle consumériste. Elles s’inscrivent alors dans un processus d’évitement, avec la crainte d’un éventuel procès. Les nouvelles technologies, les sites médicaux et même la publicité pour les dispositifs de soin aggravent cette tendance. L’époque où un patient venait soumettre à son médecin une question pour laquelle il n’avait aucune connaissance préalable est maintenant révolue. Les praticiens doivent accepter l’idée que leurs patients comparent leurs avis au regard de ce que leur transmettent les sites Internet et les nouveaux modes de communication. Le contrat de soins s’en trouve radicalement changé. Le praticien est de plus en plus souvent incité à commenter des données trouvées, par exemple, sur Internet. Le patient attend une sorte de discussion d’égal à égal face à un dossier — le sien — qu’il a lui-même constitué.

Enfin, un nouvel objectif de la médecine est d’éviter l’application intempestive d’informations trouvées sur Internet non vérifiées et qui vont, soit faire imaginer le pire, soit inciter à acheter des médicaments prétendument miraculeux mettant en jeu leur santé. Le patient reçoit dans le domaine de la santé trop d’informations et pas assez de connaissances personnalisées et « intégrées » à son histoire personnelle et à ses caractéristiques. Les connaissances ainsi personnalisées modifient plus réguliè- rement le comportement et fondent une relation de soins. Elles prennent en compte, entre autres, l’âge du patient, son sexe, son histoire personnelle et médicale, son niveau de réceptivité et/ou d’angoisse par rapport aux différentes maladies. Encore faut-il pour cela que le médecin ne soit pas lui-même dépendant de sa relation à l’ordinateur et qu’il regarde plus son malade que son écran !

Face aux données médicales transmises par les nouvelles technologies, les médecins doivent accepter une réponse humaniste aux propositions purement mercantiles :

— en formant correctement leurs patients sur la maladie ;

— en les aidant à apprendre une bonne gestion du traitement ;

— en établissant un dialogue empathique où les informations reçues par le malade par Internet sont discutées sans mépris ;

— en aidant les patients à formuler des demandes authentiques et personnelles ;

— en conservant un temps de restitution d’information où le patient peut dire ce qu’il a compris et retenu.

Un modèle éthique ou humaniste de la relation s’inscrit entre l’approche consumé- riste et paternaliste. Il est caractérisé par trois points principaux :

— l’échange de l’information : il est bilatéral. Le médecin apporte sa connaissance au patient et celui-ci informe le médecin de ses préférences ;

— Le processus de délibération. Il s’agit d’une discussion concernant les options de traitement, discussion caractérisée par l’interaction. Les deux « parties » s’efforcent d’arriver à un accord ;

— La décision commune de traitement : elle implique au moins deux décideurs, le médecin et le patient.

 

Pour André Grimaldi [9], le modèle de la relation moderne et respectueuse repose sur une « objectivation scientifique ». Le médecin assène les informations : « Je vous donne des informations, vous ferez ce que vous voudrez, mais moi cela ne changera pas ma vie ». Cette objectivation scientifique va de pair avec l’objectivation marchande et la question de l’économie de la santé. La relation qui est la plus souhaitable n’est évidemment pas celle-là mais plutôt l’alliance thérapeutique, relation égalitaire, bien qu’asymétrique où le patient vient chercher chez le médecin d’une part la compétence, d’autre part l’aide au changement dans un rapport adulteadulte. Grâce à cette éducation thérapeutique, le malade peut prendre en partie la place du médecin et grâce à l’empathie, le médecin peut prendre en partie la place du malade, chacun gardant la sienne, ni trop près, ni trop loin.

VERS UNE ÉTHIQUE DE LA RELATION MÉDICALE

La compréhension et la prise en compte des aspects relationnels dans l’acte de soins justifient l’importance du temps passé avec le patient tant pour l’examiner que pour le rassurer. Quelques principes fondent cette éthique de relation.

Tout acte médical mobilise les émotions du malade comme celles du médecin

Qu’il en ait conscience ou non, qu’il l’accepte ou non, le médecin fait l’objet d’un transfert et ses attitudes relèvent au plan émotionnel du contre-transfert. Le transfert a [10] un sens voisin de celui de transport qui implique un déplacement de valeurs, de droits, et de sentiments. Le patient, quelle que soit la discipline du médecin qu’il consulte, « transfère » des émotions déjà éprouvées à propos de proches sur la personne de son médecin. Il adopte vis-à-vis de lui des positions d’idéalisation, de régression ou de remise en question méfiante de ses compétences. Qu’il soit d’un calme imperturbable, excessif avec sympathie, rigoureusement contrôlé, légèrement irrité, tenu en échec par le mur de résistance du patient, désireux de terminer l’entretien parce que le temps prévu est dépassé depuis longtemps, le comportement du médecin crée chez son patient une réponse sur un mode personnel. Le déroulement de la consultation peut être décrit dans cette perspective comme une interaction entre le transfert du patient et le contre-transfert du médecin.

Dans une démarche projective ou agressive, le patient peut même accuser le médecin d’être la cause de tous ses maux ou, par son incompétence ou sa malveillance supposées, de ne pas savoir les soigner. Face à ces attentes ou reproches excessifs, une compréhension psychodynamique suggère un compromis où patient et médecin acceptent leurs limites respectives et s’installent dans une situation acceptable pour les deux. D’une manière ou d’une autre, nous apprennent les modèles psychologiques, lorsque nous examinons notre propre patient, nous ne pouvons nous empêcher de faire notre propre examen. Et par conséquent de révéler nos idées et nos désirs de ce qu’il faudrait faire dans cette situation particulière.

 

Toute relation de soins peut être décrite comme un appel à la réalité face aux désirs inconscients qui se manifestent. Le praticien reste calme, explique à son patient les buts de son examen, la nécessité de sa collaboration, les avantages qu’il peut en attendre et les raisons pour lesquelles il le subit. L’éthique de la relation peut être structurante. Elle conduit à expliquer, plus en détail, au patient les signes de sa maladie, ses déterminants biologiques ou psychologiques et à l’amener patiemment mais fermement, à voir quelle sorte de réponse on attend de lui. On pourrait comparer cette attitude à celle d’un adulte gentil, compréhensif, mais ferme et inébranlable à l’égard d’un enfant. La dimension paternaliste, sous couvert de relationnel, réapparaît mais sans être dupe des aspects inconscients qui l’animent de part et d’autre.

Les réactions inconscientes du médecin déterminent évidemment la tonalité de la relation de soin. Bien que chacun puisse mettre dans son silence ou ses questions une intention amicale ou encourageante, un inconscient imparfaitement contrôlé et une implication émotionnelle peuvent modifier la situation. Le patient peut ressentir des éléments agressifs. La consultation médicale consiste ainsi à comprendre autrui ou à rendre quelqu’un capable de se comprendre lui-même.

Du point de vue du patient, la consultation doit être une expérience marquante où l’occasion lui est donnée de se faire connaître, d’être compris et d’être aidé à se voir lui-même. Si possible, la nouvelle compréhension qu’il a de soi doit lui permettre, et c’est le second objectif, de décider lui-même ce qu’il va faire et de mettre sa décision à exécution. Si c’est trop difficile, le patient devra être au moins capable de voir pourquoi le médecin a pris la décision qu’il a prise, de l’accepter comme judicieuse et de coopérer à sa mise en œuvre.

Le temps de l’examen clinique est un temps de relation et déjà un temps de soin

Tout examen clinique doit commencer par une période préparatoire dont le but est de mettre le patient à son aise et d’obtenir sa collaboration. La plupart des médecins commencent l’entretien en s’informant de faits objectifs tels que l’âge, le nombre de frères et sœurs, la situation de famille… Dans un sens, cette habitude est justifiée, car elle apporte au médecin un certain nombre de renseignements utiles. Elle a d’autre part un effet rassurant sur le patient. Elle implique que le médecin s’intéresse également à l’entourage, en quoi le destin et l’entourage ont fait du patient un être heureux ou malheureux, voire une victime innocente des circonstances.

D’un autre côté, cette enquête provoque nécessairement une certaine quantité d’angoisse et de tension. Si l’on consacre trop de temps aux circonstances extérieures et aux facteurs familiaux, on risque de ne plus en avoir assez pour s’informer des problèmes intérieurs.

L’autre temps irremplaçable de l’acte médical est l’examen clinique. Ce contact physique est souvent dévalué au profit d’actes plus techniques. La prise en main du malade par son médecin n’est pas suffisamment considérée tant pour sa contribution au diagnostic que dans ses aspects relationnels. La pratique médicale « naturelle » ne sau- rait cependant se passer d’actes indispensables mais qui apparaissent trop souvent désuets comme l’auscultation, voire la prise du pouls ou de la pression artérielle.

Une lenteur assumée est un gage de qualité

L’éthique médicale incite les praticiens qui veulent garantir une relation de soins satisfaisante à ne pas se presser, à ne pas trop prendre d’avance sur celui qui les consulte. Dans le doute, nous apprennent les humanistes comme les psychanalystes, ne vous hâtez pas, mais écoutez. Le fait de ne pas suivre le rythme de son malade, de rester toujours en retard sur lui peut être dangereux. Vouloir soulager les souffrances à tout prix et à toute vitesse aboutit parfois aux pires catastrophes. Celui qui veut convaincre une bonne fois pour toutes un anxieux risque de le braquer. Cette lenteur, comme l’examen clinique, devient une part de la médecine difficile à défendre face aux exigences économiques qui régissent de plus en plus les activités de soin.

Il est vrai que le fait de ne pas suivre l’allure du patient, de rester toujours en retard sur lui, présente de nombreux dangers. Mais ces dangers sont relativement faibles en comparaison de ceux que comporte la violation injustifiée de l’intimité d’un patient ou la confrontation prématurée avec un problème auquel il n’est pas encore prêt à faire face. Il est également dangereux de presser un patient, de ne pas lui donner un délai suffisant pour qu’il élabore sa propre solution du problème et surmonte ses résistances, en particulier celles qui sont dues à la honte, à l’embarras et par-dessus tout aux sentiments de culpabilité. Tout ceci exige du tact, de la patience et du temps.

Une application souple des principes de la communication

La relation de soins doit retrouver sa dimension de communication dans laquelle le médecin interagit avec son patient à un niveau à la fois scientifique et personnel. La capacité à communiquer n’est pas innée. Elle repose sur une formation et une réflexion sur soi, un savoir-faire et un savoir être. La formation des médecins à la relation médecin-malade dans la maladie chronique est un enjeu majeur intégrant les données éthiques psychologiques comme l’impact des nouvelles technologies.

Lors de leurs études, les praticiens en devenir apprennent à se couper de leurs affects spontanés d’identification au patient. Ils sont poussés à adopter une démarche scientifique objectivante au risque de devenir des techniciens froids, infirmes de la relation et inaptes à l’empathie. Ils passent souvent, après une phase hypocondriaque, par une phase plus ou moins dépressive où ils doutent de leur avenir professionnel. Il est essentiel, grâce à des réunions, des jeux de rôles, des réflexions sur les contre attitudes médicales, d’amener les étudiants en médecine à trouver le chemin de l’empathie en développant une médecine authentiquement centrée sur le patient.

Le contrat de soins intègre enfin la manière dont les nouvelles technologies font évoluer les connaissances des patients et l’image sociale de la médecine comme celle des maladies.

 

CONCLUSION

L’implication des facteurs relationnels et psychologiques dans l’éthique de la relation médicale ne doit pas conduire à figer le dialogue entre un patient et son malade.

Au-delà de la connaissance des théories psychologiques et philosophiques, la rencontre soignante reste une expérience individuelle. Elle comporte une prise de contact, un examen clinique et nécessite du temps et une tolérance à l’échec et à la frustration. Elle sollicite les compétences relationnelles du médecin de même que son savoir technique et scientifique. Mais plus que tout, elle se fonde sur la souplesse, le respect et la capacité à se mettre à la place de l’autre qu’on peut aussi appeler l’empathie.

BIBLIOGRAPHIE [1] Lejoyeux M. — Les secrets de nos comportements : pourquoi les optimistes sont-ils plus riches, vivent-ils plus longtemps et chantent-ils plus justes ? Le livre de poche, 2011.

[2] Canguilhem G. — Le Normal et le Pathologique. Collection Quadrige. Presses Universitaires de France. 1999. Paris.

[3] Delage M., Junod A. — D’une éthique de la relation thérapeutique. Annales Médico-

Psychologiques , 161 , 2003 23-30.

[4] Lévinas E. — Humanisme de l’autre homme. Le livre de poche, 1987.

[5] Ricoeur P. — Préface du code de déontologie médicale. In : Ordre national des médecins, Code de déontologie médicale. Paris. Seuil. 1996. 9-25.

[6] Dufour M., D. Roisin, G. Laval, M. Myslinski — Complexité des relations et des discours dans l’annonce de l’arrêt des traitements curatifs. Médecine palliative-Soins de supportAccompagnement-Ethique , 2008, 7 , 324-329.

[7] Rogers C. — La relation d’aide et la psychothérapie. Paris, Editions Sociales Françaises, 1970, 2 vol., 459 p.

[8] Memmi A. — Le buveur et l’amoureux. Le prix de la dépendance. Editions Arléa. Paris. 1998.

[9] Grimaldi A, Cosserat J. — La relation médecin-malade, EMC Référence, 2004.

[10] Laplanche, J. Pontalis J.B.— Vocabulaire de la psychanalyse. Éditions Quadrige. Presses Universitaires de France, Paris, 1988.

DISCUSSION

M. Henri LÔO

Vous avez judicieusement insisté sur la notion de secret. Mais des dérogations peuvent-elles être envisagées ? C’est la notion de secret partagé avec d’autres médecins pour parfaire la prise en charge, avec la famille pour l’alliance thérapeutique bénéfique, sous réserve de l’accord des patients, dit-on habituellement. Mais en psychiatrie l’accord semble aléatoire.

 

Il se heurte à la méfiance du paranoïaque, à l’ambivalence des schizophrènes, au déficit de compréhension du dément. Quelle est votre position sur le secret partagé avec la famille chez les patients psychiatriques ?

Je suis d’accord avec votre remarque. Notre discipline psychiatrique nous fait reconnaître des situations où l’accord pour le partage du secret est bien aléatoire. Des dérogations au titre de ces motifs psychiatriques peuvent effectivement être envisagées. Il n’en demeure pas moins que la règle, même ouverte à des dérogations, est le respect du secret pour garantir la relation de soins.

M. Pierre GODEAU

Une anecdote illustre l’effet placebo chez l’animal. Ayant deux chiens, un mastiff et un mâtin de Naples. Le premier avait une pathologie infectieuse post-traumatique nécessitant une antibiothérapie injectable. L’autre chien était sain et assistait aux séances de traitement. Au bout de deux ou trois jours, il dépérissait et refusait de s’alimenter. Après une injection simulée poursuivie pendant plusieurs jours tout trouble avait disparu et on poursuivit pendant une quinzaine de jours ce double traitement : le vrai et le placebo jusqu’à la guérison des deux animaux.

 

M. Jean NATALI

Dans Surgery, N. Arnlady rapporte à propos de l’intonation de 114 chirurgiens : qu’il y a une relation directe entre l’intonation des chirurgiens s’adressant à leurs patients et le nombre de plaintes dont ils font ou feront l’objet.

 

M. Patrice QUENEAU

À l’évidence, la disponibilité au malade est un facteur essentiel de la qualité. Comment mieux valoriser ce temps soignant des médecins (ainsi que des autres personnels de santé) ?

Comment faire mieux comprendre aux décideurs que « c’est aussi la non qualité qui coûte cher ? »

Le temps dont a besoin le patient est à la fois une quantité de temps qui lui soit exclusivement dévolu et aussi une qualité de temps. Il a besoin d’une écoute et d’une disponibilité complète de son médecin, encore faut-il pour cela que celui-ci ne soit pas interrompu par les différents motifs de distraction moderne que peuvent être l’ordinateur ou le téléphone…

M. Charles-Joël MENKÈS

Le succès des médecines dites « alternatives » ou complémentaires ne va-t-il pas à la rencontre d’une empathie chez un placebo inducteur avec un placebo receveur ?

Je suis d’accord avec l’idée que les médecines dites alternatives sont grandement portées par des mécanismes relevant de la suggestion et d’un effet psychologique.

 

Mme Denise-Anne MONERET-VAUTRIN

Je ne pense pas que la notion de secret médical soit un paramètre important de la relation médecin-malade. Celui-ci accepte la présence de plusieurs autres médecins lors de la consultation avec le médecin qu’il a choisi. Il sollicite souvent le transfert des données de son dossier à plus de médecins que le demandeur de la consultation spécialisée. La demande, bien légitime du patient est sa propre information, et son accord pour le transfert des données. La notion de secret concerne la protection des données vis-à-vis des différents systèmes informatiques, tel qu’il ne peut être admissible qu’un transfert de données n’ait pas reçu le double consentement du médecin et du patient… Le respect des conditions du secret médical n’est-il pas du ressort de la CNIL ?

Le patient peut demander à ce que les informations le concernant soient transmises.

Encore faut-il pour cela qu’il soit informé de la transmission de ces informations et qu’il reste, autant que possible, maître de son dossier et de son contenu.

Mme Aline MARCELLI

Dans le cadre de la relation médecin-malade n’y a-t-il pas suffisamment de temps à consacrer au « consentement éclairé » qui constitue un stress parfois plus prégnant que le diagnostic mieux présenté et dans un climat d’empathie ?

Je rejoins votre remarque sur l’effet stressant que représente parfois le consentement éclairé. Cela nous confirme l’importance de l’approche relationnelle, associée à tous les moments, tant de l’information du patient, que du soin.

 

<p>* Psychiatrie et addictologie, Hôpitaux Bichat et Beaujon, 46, rue Henri Huchard, 75018 Paris, e-mail : michel.lejoyeux@bch.ap-hop-paris.fr Tirés à part : Professeur Michel Lejoyeux, même adresse Article reçu le 24 mai 2011, accepté le 3 octobre 2011</p>

Bull. Acad. Natle Méd., 2011, 195, no 7, 1477-1490, séance du 4 octobre 2011