Communication scientifique
Session of 4 janvier 2011

Cancer de l’oesophage et de la jonction oeso-gastrique : évolution de la stratégie chirurgicale

MOTS-CLÉS : tumeurs de l’œsophage/chirurgie
Cancer of the esophagus and gaztroesophageal junction : evolution of surgical management
KEY-WORDS : esophageal neoplasms/surgery

Jean-Pierre Triboulet, Guillaume Piessen, Jérôme Bot, Christophe Mariette

Résumé

La stratégie thérapeutique du cancer de l’œsophage a subi de profonds changements depuis vingt ans. Les progrès dans les traitements néo adjuvants et l’optimisation de la prise en charge péri-opératoire se sont traduits par une amélioration des résultats postopératoires et de la survie. Le but de notre travail était d’analyser l’expérience d’un centre expert dans la prise en charge chirurgicale des cancers de l’œsophage au cours des vingt dernières années, afin de vérifier la réalité de ces évolutions. Les patients opérés d’un cancer de l’oesophage ou de la jonction oeso-gastrique entre 1988 et 2008 ont été inclus (n = 1153). Quatre périodes d’études (P) ont été définies : P1 : 1988-1993, P2 :1994-1998, P3 : 1999-2003, et P4 : 2004- 2008. Les données démographiques, de suivi post-opératoire et de survie ont été recueillies en prospectif. Une comparaison rétrospective des quatre périodes d’étude a été réalisée. Parmi les 1 153 cancers de l’œsophage, 77,4 % étaient de type histologique épidermoïde. Au cours de la période d’étude, le ratio épidermoïde/adénocarcinome est passé de 12,0 à 1,3 (P1 vs. P4, P<0,001). Les taux de mortalité et de morbidité post-opératoire étaient respectivement de 5,6 % et 39 %, et sont restées stables au cours de la durée de l’étude. Le taux de survie à cinq ans après résection est passé de 24,3 % à 42,7 % (P1 vs. P4, P<0,001). Le taux de résection complète R0 était de 80.7 % et a augmenté au fil du temps (P1: 74,1 % vs. P4: 82,1 %, P<0.05). Chez ces patients opérés à visée curative, la survie à cinq ans est s’est améliorée au cours de la période d’étude (P1 : 32.7 % vs. P4 : 52.3 %, P<0.001). La proportion de patients ayant bénéfice d’un traitement néoadjuvant (essentiellement radiochimiothérapie) est passée de 46,8 % à 66,5 % (P1 vs. P4). La réponse histologique à la radiochimiothérapie était corréllée au pronostic. La survie à cinq ans des patients en réponse histologique complète, partielle ou absente était respectivement de 52,1 %,24.8 % et 10,0 %. Les résultats postopératoires se sont peu modifiés au cours des quatre périodes étudiées ; ils sont conformes à ceux observés dans les centres experts. L’amélioration significative de la survie à long terme est probablement le reflet d’une meilleure évaluation de l’extension tumorale, d’une meilleure sélection des malades avec un taux plus élevé de chirurgie compléte, et de l’utilisation la radiochimiothérapie néoadjuvante pour les cancers localement avancés. Les espoirs de progrès pour l’avenir concernent la prédiction de la chirurgie complète R0 et une évaluation optimisée de la réponse à la chimio radiothérapie afin de pouvoir administrer un traitement « à la carte » adapté à chaque patient.

Summary

Management of esophageal cancer has evolved markedly in the last two decades. Advances in neoadjuvant treatment combined with refinements in surgical techniques and perioperative care have resulted in better postoperative outcomes and long-term survival. We investigated trends in the outcome of esophagectomy for esophageal cancer over the past 20 years at our high-volume institution. We studied patients who underwent surgery for primary cancer of the esophagus or gastroesophageal junction from 1988 through 2008 (N = 1153). Four study periods (P) were compared: 1988-1993 (P1), 1994-1998 (P2), 1999-2003 (P3) and 2004- 2008 (P4). Demographic parameters, tumor characteristics, post-operative morbidity, in-hospital mortality and long-term survival were recorded prospectively and the four periods were compared retrospectively. Squamous cell carcinoma accounted for 77.4 % of the 1153 malignancies. The ratio of squamous cell carcinoma to adenocarcinoma fell from 12.0 to 1.3 during the study period (P1 vs P4, P<0.001), with a parallel increase in the number tumors of the lower esophagus or gastroesophageal junction. The post-operative mortality and morbidity rates were respectively 5.6 % and 42.7 % overall and remained stable during the study period. The five-year survival rate among all resected patients improved significantly, from 24.3 % to 42.7 % (P1 vs P4, P<0.001). The complete (R0) resection rate was 80.7 % overall and increased from 74.1 % to 82.1 % (P1 vs P4, P<0.05). The five-year survival rate improved significantly among R0-resected patients, from 32.7 % to 52.3 % (P1 vs P4, P<.0001). The proportion of patients who received neoadjuvant treatment (mainly chemoradiotherapy) rose from 46.8 % to 66.5 %. The completeness of the pathologic response after neoadjuvant chemoradiotherapy correlated with long-term survival (P<0.001): five-year survival rates among pathologically complete, partial and non responders were 52.1 %, 24.8 % and 10 %, respectively. Short-term outcomes after resection remained stable during the study period and compared favorably with those reported by other high-volume institutions. Longterm survival improved significantly. Advances in staging methods and surgical management, combined with more stringent patient selection and use of neoadjuvant chemoradiation, may explain this progress. More reliable predictors of complete R0 resection and of the response to chemoradiation therapy are needed in order to tailor management to the individual patient.

INTRODUCTION

L’épidémiologie des cancers de l’œsophage a changé depuis vingt ans [1] les méthodes thérapeutiques qui leurs sont opposées aussi. La place de la chirurgie a diminué, elle est proposée aux patients qui peuvent en tirer le plus bénéfice. La chimiothérapie (CT) et la radio chimiothérapie (RCT) ont fait la preuve de leur efficacité dans certaines indications [2, 3]. Loin de s’opposer, méthodes chirurgicales et non chirurgicales sont devenues complémentaires.

 

Des avancées considérables en termes de stratégie thérapeutiques ont transformé en vingt ans le pronostic de cette affection redoutable aux résultats qualifiés traditionnellement de désespérants, et se sont traduites par une amélioration du taux de survie à cinq ans (voisine de 40 % pour la chirurgie curative) [4, 5].

Les avancées se sont appuyées sur de nombreux essais cliniques ; ils ont concerné les critères de qualité de la chirurgie, les soins péri-opératoires, les indications thérapeutiques en particulier les places respectives de la chirurgie et de la radiochimiothérapie. Ces sujets ont fait l’objet de recommandations récentes labellisées par l’HAS et l’INCA [6-10] Le but de ce travail est de présenter les principales évolutions observées dans notre expérience du traitement chirurgical du cancer de l’œsophage depuis vingt ans.

Méthodes

L’étude porte sur les cancers de l’œsophage opérés consécutivement de 1988 à 2008 dans le service de Chirurgie Digestive et Générale du CHRU de Lille.

Les tumeurs étaient situées depuis la bouche de l’oesophage (bord inférieur du cartilage cricoïde) jusqu’à la jonction oeso gastrique ; ont été exclus les lésions superficielles accessibles à un traitement endoscopique (Tis et T1a) et les cancers métastatiques. L’étude a comparé les données et les résultats de quatre périodes :

1988-1993 (période 1 ou P1), 1994-1998 (période 2 ou P2), 1999-2003 (période 3 ou P3), 2004-2008 (période 4 ou P4).

Patients

Les patients ont été opérés en respectant des critères de non résécabilité : extension tumorale à l’arbre trachéo bronchique et au nerf récurrent, extensions métastatiques ganglionnaires, cervicales ou métastases viscérales et des critères de non opérabilité : cirrhose avec hypertension portale, insuffisance respiratoire, perte de poids supérieure à 20 %, insuffisance cardiaque, score ASA 3 ou 4.

Bilan thérapeutique

Le bilan pré thérapeutique comportait : un scanner thoraco abdominal, une écho endoscopie, une fibroscopie digestive avec biopsies, un transit oeso gastro duodénal, une échographie cervicale et pour les cancers épidermoides : un examen ORL :

laryngoscopie indirecte, pan endoscopie sous anesthésie générale, une fibroscopie trachéo bronchique.

La nature probablement bénigne ou maligne des formations ganglionnaires était définie par leur taille (inférieure à 1 cm : ganglion, supérieure à 1 cm : adénopathie) et de leurs caractéristiques encho-endoscopiques (non interprétables en cas de radiochimiothérapie néoadjuvante).

 

Les adénopathies cervicales et coeliaques étaient considérées comme métastatiques ; une ponction de la ou des formations ganglionnaires était effectuée si, de son résultat, dépendait une modification de la stratégie thérapeutique (exemple adénopathie coeliaque ou non).

La tomographie à émission de positrons (TEP), la cœlioscopie exploratrice pour les adénocarcinomes ont été utilisées dans la dernière période.

Lorsque seule la TEP, contrairement aux résultats de la TDM, découvrait des lésions secondaires modifiant complètement la stratégie thérapeutique, une confirmation histopathologique, dans la mesure du possible, des métastases était recherchée conformément aux recommandations du Thésaurus [10].

Au terme du bilan les tumeurs sont réparties selon les classifications morphologiques prédécisionnelle scannographique et enchoendoscopiques [11, 12].

La chirurgie

Les patients ont été opérés d’emblée ou six à huit semaines après un traitement néo adjuvant ; il s’agissait d’une oesophagectomie avec anastomose intra thoracique pour les cancers dont le pôle supérieur était situé à plus de 25 centimètres des arcades dentaires et d’une oesophagectomie avec anastomose cervicale associée ou non à une thoracotomie pour les localisations dont le pôle supérieur était à moins de 25 centimètres des arcades dentaires. Conformément aux pratiques labellisées en chirurgie cancérologique digestive [2], il a été réalisé la plupart des cas, une oesophagectomie en bloc avec résection complète des tissus tumoraux, du canal thoracique,de la veine azygos [13].

Un curage ganglionnaire « deux champs », abdominal et thoracique, était réalisé dans la majorité des cas, rarement thoracique standard (sous-carinaire seul), plus souvent thoracique étendu : sous carinaire, médiastinal supérieur, intertrachéo-cave (loge de Barety), jamais thoracique total (curage latéro-trachéal gauche associé aux autres curages) (classification de Bumm [14]. Le curage cervical (curage « trois champs ») a été d’indication exceptionnelle en raison de sa morbidité et de sa faible influence sur les résultats carcinologiques.

L’estomac était utilisé comme principal organe de remplacement ; les anastomoses ont été manuelles tant dans le thorax qu’au niveau cervical. Le trajet médiastinal postérieur était privilégié. Pendant la dernière période, l’abord coelioscopique a été utilisé pour la préparation de la plastie gastrique.

Histopathologie

Les groupes ganglionnaires étaient isolés par le chirurgien en salle d’opération. Les cancers ont été analysés selon la classification TNM 6ème édition 2002 [15)] avec étude des clearances latérales et longitudinales. Un nombre minimal de quinze ganglions était requis pour définir un curage ganglionnaire satisfaisant. La chirurgie était dite « complète R0 » lorsqu’il n’existait aucun résidu microscopique ou macroscopique, la chirurgie était « R1 » mais lorsqu’il existait des résidus microscopiques, la chirurgie était « R2 » lorsqu’il existait des résidus tumoraux macroscopiques. Pour les patients ayant bénéficié d’un traitement radio chimiothérapique, l’évaluation de la réponse a été étudiée selon les critères de Mandard [16] : grade 1 :

réponse complète, grade 5 : pas de réponse, grade 2 à 4 : réponse partielle.

Paramètres étudiés

Cette étude rétrospective a été réalisée à partir d’une base de données prospectives.

Les variables étudiées pour la comparaison entre les différentes périodes étaient des variables démographiques et tumorales (Tableau 1) ; de suivi immédiat, postopé- ratoires (Tableau 2) ; et de suivi à long terme, carcinologiques (Figure 1-6).

Analyse statistique

La date de point a été fixée au 31 décembre 2008. Le délai médian de suivi était de 68 mois (12-232 mois). L’analyse statistique a été faite à l’aide du logiciel SPSS (Statistical Package for Social Sciences, Chicago, Illinois, USA). La comparaison entre les groupes a été faite par le test du chi-deux, ou le test de Fischer en cas d’effectif inférieur à 5, pour les variables ordinales. Les probabilités de survie ont été calculées sur le mode actuariel. La comparaison des courbes obtenues a été réalisée par le test du Log Rank. Tous les tests statistiques ont été interprétés au seuil de significativité de 5 %.

RÉSULTATS

Démographie (Tableau 1) 1 153 patients ont été opérés sur la période considérée, l’âge moyen, de 57,7 ans (-/+ 18,7), diffère peu selon les périodes.

Il est remarquable de noter que le pourcentage de femmes atteintes du cancer de l’œsophage et opérées est passé de 8,3 % dans la première période (P1) à 17,9 % pendant la dernière période (P4).

Caractéristiques des cancers (Tableau 1)

Le fait marquant est l’augmentation très importante de l’incidence des adénocarcinomes par rapport à celle des cancers malpighiens. Le taux observé d’adénocarcinomes était de 7,6 % pendant la période 1988-1993, et de 41,6 % pendant la période 2004-2008 (p< 0,001).

Le nombre de cancers localisés au tiers supérieur, à l’œsophage cervical et l’hypopharynx a considérablement diminué entre les périodes 1 et 4 : 41,5 % pour la période 1988-1993, 9,9 % pour la période 2004-2008.

 

Tableau 1. — Démographie 1988-1993 1994-1998 1999-2003 2004-2008

Total

Effectifs n=301 n=348 n=281 n=223 n=1153 Actes par an 60 70 56 45 58 Age 56,62(}17,31) 57,10(}18,94) 58,07(}19,49) 59,82(}18,90) 57,74(}18,76) Homme/Femme

P = 0,002 276/25 307/41 249/32 183/40 1015/138 % Femme 8,3 % 11,8 % 11,4 % 17,9 % 12 % Score ASA †

P = 0,006 1 77(26,0 %) 75(21,7 %) 50(18,1 %) 23(18,1 %) 225(21,5 %) 2 151(51,0 %) 200(57,8 %) 186(67,1 %) 86(67,7 %) 623(59,6 %) 3 68(23,0 %) 71(20,5 %) 41(14,8 %) 18(14,2 %) 198(18,9 %) Perte de poids †

Moins de 10 % 226(80,1 %) 232(70,9 %) 226(82,5 %) 186(85,7 %) 870(79,1 %) Plus de 10 % 56(19,9 %) 95(29,1 %) 48(17,5 %) 31(14,3 %) 230(20,9 %) Histologie †

P<0,0001

Epidermoïde 277(92,0 %) 289(83,5 %) 202(73,2 %) 117(52,9 %) 885(77,4 %) Adénocarcinome 23(7,6 %) 52(15,0 %) 64(23,2 %) 92(41,6 %) 231(20,2 %) Autre 1(0,3 %) 5(1,4 %) 10(3,6 %) 12(5,4 %) 28(2,4 %) Localisation

P<0,0001

Hypopharynx 48(15,9 %) 45(12,9 %) 23(8,2 %) 4(1,8 %) 120(10,4 %) Cervical 32(10,6 %) 31(8,9 %) 15(5,3 %) 2(0,9 %) 80(6,9 %) Tiers supérieur 45(15,0 %) 58(16,7 %) 32(11,4 %) 16(7,2 %) 151(13,1 %) Tiers moyen 123(40,9 %) 140(40,2 %) 102(36,3 %) 67(30,0 %) 432(37,5 %) Tiers inférieur 43(14,3 %) 61(17,5 %) 73(26,0 %) 95(42,6 %) 272(23,6 %) Cardia 10(3,3 %) 13(3,7 %) 36(12,8 %) 39(17,5 %) 98(8,5 %) Traitement néoadjuvant †

P<0,0001

Aucun 160(53,2 %) 168(48,4 %) 174(62,6 %) 57(33,5 %) 559(51,0 %) RCT 127(42,2 %) 171(49,3 %) 102(36,7 %) 96(56,5 %) 496(45,3 %) CT 10(3,3 %) 4(1,2 %) 1(0,4 %) 17(10,0 %) 32(2,9 %) RT 4(1,3 %) 4(1,2 %) 1(0,4 %) 9(0,8 %) Approche Chirurgicale †

P<0,0001

Transhiatale 122(41,4 %) 115(33,9 %) 52(18,8 %) 21(9,5 %) 310(27,4 %) Transthoracique 173(58,6 %) 224(66,1 %) 224(81,2 %) 199(90,5 %) 820(72,6 %) Siège de l’anastomose †

P<0,0001

Cervicale 219(72,8 %) 178(51,3 %) 83(29,6 %) 43(19,3 %) 523(45,4 %) Thoracique 82(27,2 %) 169(48,7 %) 197(70,4 %) 180(80,7 %) 628(54,6 %) ASA : American society of anesthesiology ; RCT : Radiochimiothérapie ; CT : Chimiothérapie ;

RT : Radiothérapie † Données manquantes: score ASA 107, perte de poids 58, histologie 9, traitement néoadjuvant 57, approche chirurgicale 23, siège de l’anastomose 2 p : significativité entre 1988-1993 et 2004-2008

Fig. 1. — Survie de l’effectif global par périodes de 5 ans Fig. 2. — Survie de l’effectif global selon la résection RO : Résection complète, R1 : Résolu microscopique, R2 : Résidu macroscopique

Fig. 3. — Survie des patients opérés par chirurgie complète Fig. 4. — Survie globale selon l’extension tumorale (pT)

Fig. 5. — Survie globale selon l’extension ganglionnaire Fig. 6. — Survie globale selon la réponse à la radio-chimiothérapie

La chirurgie était proposée pour des tumeurs moins évoluées pendant la période 4 (pT4 :5,5 %) comparativement à la période 1 (pT4 :16,9 %) (tableau 3).

La chirurgie (Tableau 1, 2)

L’évolution de l’approche chirurgicale s’est faite très nettement en faveur de l’oesophagectomie transthoracique : 58,6 % (P1) versus 90,5 % (P4) ; la voie d’abord transhiatale a été moins utilisée entre ces deux mêmes périodes de 41,4 % vs 9,5 % .Parallèlement les anastomoses cervicales ont diminué en fréquence passant de 72,8 % à 19,3 % entre les périodes 1 et 4. Pour la dernière période 2004-2008, 80,7 % des anastomoses ont été en intra thoracique.

La chirurgie complète R0 était, dans la série, de 80,7 %. Ce taux a progressé entre les périodes 1 et 4 passant de 74,1 % à 82,1 % (p < 0,005). Le taux de survie à 5 ans pour la chirurgie R0 dans l’étude était de 36,5 % comparée à la chirurgie R1 (résidus microscopiques) : 9,1 % et la chirurgie R2 (résidus macroscopiques) : 0,1 % (p<0,0001). (fig. 1) Le taux de survie à cinq ans pour la chirurgie R0 a augmenté entre les périodes 1 et 4 passant de 34,7 % à 52 % (p<0,001) (fig. 3).

Morbi-mortalité postopératoire (Tableau 2)

La mortalité hospitalière était globalement dans la série de 5,6 %, stable entre les périodes 1 et 4. La mortalité postopératoire était plus importante pour les cancers avancés comparée à celle des cancers localisés (5.1 % vs 6.3 % NS) La morbidité est également restée stable, 42,9 % pour la première période versus 43,5 % pour la dernière période. Les complications sont dans 70 % des cas d’origine respiratoire. Le taux de fistules anastomotiques était significativement inférieur pour les anastomoses intra thoraciques (2,6 %) à celui des anastomoses cervicales (9,7 %) (p<0,001).

Rapporté aux quatre périodes étudiées, le taux de fistules intra thoraciques est resté stable et le taux de fistules cervicales a diminué (11 % pour la première période, 5,2 % pour la dernière période). La durée moyenne d’hospitalisation était de 24,2 jours pour la période P1 et de 18,8 jours pour la dernière période P4.

Les stades tumoraux (Tableau 3)

Considérant l’évolution histopathologique, entre la première (P1) et la dernière période (P4) les taux de tumeurs localisées (pT1, pT2) et des tumeurs localement avancées (pT3) n’ont pas varié (respectivement : 46,9 % vs 46,7 % et 36,2 % vs 38,7 % NS) ; en revanche, le taux de lésions étendues aux organes de voisinage pT4) a chuté de façon significative (16,9 % vs 5, 5 % p<0,001).

 

Tableau 2. — Suivi 1988-1993 1994-1998 1999-2003 2004-2008

Total

Effectifs n = 301 n = 348 n = 281 n = 223 n = 1153 Mortalité 19 (6,3 %) 15 (4,3 %) 14 (5,0 %) 16 (7,2 %) 64 (5,6 %) p = 0,405 Suites 129 (42,9 %)

La survie (fig. 1 à 6)

La survie globale à cinq ans pour l’ensemble du groupe était de 30,2 %. La survie globale s’est améliorée de façon significative entre les périodes 1 et 4 passant de 24,3 % à 42,5 % (p<0,0001) (fig. 1). Comme attendu, la survie à cinq ans de la chirurgie R0 était significativement supérieure à la survie de la chirurgie R1-R2 (respectivement 36,5 % versus 9,2 %) (p<0,001)(fig. 2). De plus, la survie étudiée par période de cinq ans pour la chirurgie R0, montre une amélioration sur les quatre périodes passant de 32,7 % pour la période P1 à 52,03 % pour la période P4 (p<0,001) (fig. 3).La survie était classiquement corrélée à l’extension tumorale et à l’atteinte ganglionnaire (fig. 4 et 5).

Après la radio chimiothérapie, la survie des patients opérés était corrélée à la qualité de la réponse tumorale à cette radio chimiothérapie : survie après réponse complète 52,1 %, survie après réponse partielle 24,8 %, en cas de non réponse à la radio chimiothérapie 10 % (fig. 6) DISCUSSION

Le cancer de l’oesophage a changé. L’incidence des cancers malpighiens de l’œsophage a diminué en France et dans le monde. L’incidence des adénocarcinomes et en particulier de la jonction œsogastrique a été multipliée par 3 dans beaucoup de pays dont la France [17]. Cette incidence dans notre série a été en augmentation constante de la période 1 à la période 4 passant de 7,6 % à 41,6 % (p<0,001).

Bouvier a rapporté les résultats du registre de la Côte d’Or : le taux d’adénocarcinomes est passé de 6,7 % pour la période de 1977-1990, à 26 % pour la période de 1997-2002 [1].

Les différences entre cancer malpighien et adénocarcinome concernent le terrain, la localisation, l’extension ganglionnaire, la sensibilité au traitement radio et chimiothérapique ; ces différences justifient une prise en charge thérapeutique spécifique [18].

Le cancer de l’œsophage a touché plus souvent la femme entre les périodes de 1988-1993 et 2004-2008 et la différence est significative : 8,3 % versus 17,9 % pour la dernière période (p<0,001). La progression de l’addiction au tabac, la fréquence du reflux gastro œsophagien, le surpoids sont des explications avancées [19].

Les résultats postopératoires ont peu évolué ; le taux de mortalité opératoire après oesophagectomie pour cancer se situe entre 4 % et 10 % dans les séries récentes [20, 21] Il s’abaisse aux environs de 2 à 3 % dans les centres experts [22, 23]. Une diminution du taux de mortalité de 50 % a été constatée au cours de ces dernières années, le taux est passé de 12 % pour Hofstetter à 6 % entre les périodes 1970-1985 et 1986-2001 [17]. Dans l’étude multicentrique de 2004 réalisée pour l’Association Française de Chirurgie et portant sur 1 034 cancers de la jonction œsogastrique, le 104 Bull. Acad. Natle Méd. , 2011, 195 , no 1, 93-112, séance du 4 janvier 2011 taux de mortalité hospitalière a diminué de façon significative (de 11 à 6 %) entre les périodes 1985-1990 et 1996-2000 [24].

Globalement, dans l’étude, la mortalité est de 5,6 %. La mortalité post-opératoire dans notre expérience est liée au stade du cancer : 9 % pour les stades III (25), 2,9 % pour les stades I et II [23].

L’influence de l’équipe chirurgicale (effet volume) : plusieurs auteurs ont souligné le rôle de l’expérience chirurgicale sur les résultats postopératoires en terme de morbimortalité et de survie [26], la mortalité postopératoire de la chirurgie du cancer des centres experts est de 5 %, elle est de 18 % pour les centres non experts [27, 28].

L’analyse de nos résultats montre une stabilité des taux de mortalité sur les quatre périodes. L’absence de diminution significative de mortalité post-opératoire traduit en partie des différences de prise en charge entre les périodes concernées : la radio chimiothérapie néo adjuvante a été plus souvent proposée lors de la dernière période (56,6 % versus 42,2 % pour la première période). Le rôle joué par la radio chimiothérapie sur la morbi-mortalité postopératoire est discuté ; des études montrent une tendance à la surmortalité après la chirurgie des cancers de l’œsophage préalablement traités par radio chimiothérapie [7, 8].

Le taux des fistules anastomotiques intra thoraciques et cervicales était dans la série respectivement de 2,6 % et 9,7 %. La diminution de fréquence des fistules cervicales entre la première période (5,2 %) entre la première période (11 %) et la quatrième période (5,2 %) est liée à l’amélioration des techniques de suture cervicale et en particulier l’anastomose semi mécanique. La mortalité des fistules intra thoraciques a chuté en raison d’utilisation récente des prothèses œsophagiennes temporaires extractibles.

Le traitement mini invasif : éviter la thoracotomie et/ou la laparotomie permet-il de diminuer la morbidité postopératoire, sans compromettre la survie ?

Les équipes chirurgicales ont montré la faisabilité de la chirurgie mini invasive appliquée au cancer de l’œsophage [29-31].

Aucune donnée actuelle n’est cependant disponible à ce jour pour affirmer les avantages théoriques des techniques mini invasives sur la chirurgie ouverte. Partant de ce constat, nous avons réalisé dans le service, une étude prospective cas contrôles ayant pour but de comparer la cœlioscopie à la laparotomie pour la réalisation des plasties gastriques en terme de complications pulmonaires postopératoires ;

les deux groupes de 77 % « opérés par cœlioscopie » comparés aux 183 patients « opérés par laparotomie » est comparable pour les principaux critères d’appariement. Il n’y avait pas de différence concernant la mortalité et la morbidité, les complications pulmonaires étaient significativement moins fréquentes (16,4 % versus 34,4 %, p. = 0,006), en cas d’approche laparoscopique [32].

À la suite de ce travail, une étude randomisée sur un PHRC national a débuté pour confirmer sur une étude multicentrique, l’avantage de l’approche laparoscopique pour la préparation de la plastie gastrique comparée à la laparotomie.

105 Bull. Acad. Natle Méd. , 2011, 195 , no 1, 93-112, séance du 4 janvier 2011

Tableau 4. —

Classification TNM (UICC 2002) (15)

T — Tumeur primitive

T0 Pas de signe de tumeur primitive Tis Carcinome in situ T1 Tumeur envahissant la lamina propria ou la sous-muqueuse

T2 Tumeur envahissant la musculeuse propre T3 Tumeur envahissant l’adventice T4 Tumeur envahissant les structures adjacentes N — Adénopathies régionales

Nx Ganglions non évalués N0 Pas de signe d’atteinte des ganglions lymphatiques régionaux N1 Métastases ganglionnaires lymphatiques régionales Ganglions coeliaques : toujours cotés M — M1a pour les cancers thoraciques inférieurs, — M1b pour les autres.

Ganglions cervicaux :

— N pour les cancers de l’oesophage cervical, — M1a pour les cancers de la partie supérieure de l’oesophage thoracique (de l’entrée dans le thorax jusqu’à la bifurcation trachéale, vers 24 cm des arcades dentaires), — M1b pour les localisations sous jacentes.

M — Métastases à distance

M0 Pas de métastase à distance M1 Présence de métastase(s) à distance Pour les tumeurs de la partie inférieure de l’oesophage thoracique M1a Métastases dans les ganglions lymphatiques coeliaques M1b Autres métastases Pour les tumeurs de la partie supérieure de l’oesophage thoracique M1a Métastases dans les ganglions lymphatiques cervicaux M1b Autres métastases Pour les tumeurs de la partie moyenne de l’oesophage thoracique M1a Non applicable M1b Métastases dans les ganglions lymphatiques non régionaux ou autres métastases à distance L’examen d’au moins six ganglions médiastinaux est nécessaire à l’évaluation correcte du statut ganglionnaire.

Stade 0 pTis N0 M0 Stade I pT1 N0 M0 Stade II A pT2-T3 N0 M0 Stade II B pT1-T2 N1 M0 Stade III pT3N1 ou pT4 tous N M0 Stade IV tous T tous N M1 Stade IV A tous T tous N M1a Stade IV B tous T tous NM1b

En ce qui concerne d’amélioration des résultats post-opératoires, les progrès de la chirurgie ne peuvent être dissociés de l’optimisation de la prise en charge périopératoire (anesthésie réanimation, immuno nutrition, meilleure gestion des complications..) [6, 9].

La survie à cinq ans des cancers de l’œsophage opérés s’est améliorée très significativement depuis vingt ans, comprise entre 10 et 40 % dans la littérature [4, 5], elle est de 30,2 % globalement dans l’étude ; la survie globale à cinq ans était de 23,3 % dans la première période et de 42,7 % dans la dernière période (p<0,001).

Dans la série, les survies à cinq ans des adénocarcinomes et cancers épidermoides sont peu différentes, respectivement de 23,3 % et 29,8 % (NS). Si les adénocarcinomes sont opérés à des stades plus défavorables : tumeurs plus avancées (pT3 pour les adénocarcinomes, 53, 3 % versus 36,7 % pour les pT3 des cancers épidermoides (p<0,001) avec des adénopathies plus fréquemment envahies pour les adénocarcinomes (48,2 % versus 6,8 % p<0,001), les cancers malpighiens surviennent sur un terrain plus fragile (double intoxication alcoolo tabagique) et s’accompagnent dans leur évolution, d’un taux élevé de second cancer ORL et/ou bronchique.

L’influence pronostique du ratio ganglions positifs sur ganglions prélevés est confirmée par l’étude des pièces de curages ganglionnaires [33].

L’explication de cette évolution favorable est multifactorielle : meilleure évaluation du stade tumoral, application stricte des critères de qualité de la résection chirurgicale en particulier la chirurgie complète, programmation plus systématique de la radio chimiothérapie néo adjuvante pour les cancers avancés.

L’évaluation du stade tumoral s’est amélioré. La stratégie thérapeutique s’appuie sur les classifications d’imageries scannographique et échoendoscopique ; l’évaluation de la réponse tumorale et ganglionnaire apres radiochimiothérapie reste difficile. La prise en charge thérapeutique postopératoire est centrée sur classification TNM UICC 2002 (15) (tableau 7), récemment modifiée [34].

Considérant l’évolution histopathologique, entre la première (P1) et la dernière période (P4) les taux de tumeurs localisées (pT1,pT2) et des tumeurs localement avancées (pT3) n’ont pas varié (respectivement : 46,9 % vs 46,7 % et 36,2 % vs 38,7 % NS) ; en revanche, le taux de lésions étendues aux organes de voisinage pT4) a chuté de façon significative (16,9 % vs 5, 5 % p<0,001) ; il est corrélé à l’augmentation du taux de chirurgie « R0 », ce qui a contribué à l’amélioration du taux de survie à cinq ans.

L’évaluation pré-thérapeutique du stade tumoral et ganglionnaire reste tributaire du scanner cervico-thoraco-abdominal et en l’absence de métastase, de l’écho endoscopie. L’écho endoscopie est actuellement considéré comme le meilleur examen d’évaluation de l’extension loco régionale du cancer de l’œsophage ; elle est réalisée en routine pour le bilan d’extension, elle est devenue indispensable dans le cadre des essais thérapeutiques [35]. Ces examens restent la base de l’évaluation du stade tumoral à la condition qu’ils soient réalisés moins d’un mois avant la décision thérapeutique.

 

L’envahissement de la paroi trachéale ou bronchique est au mieux appréciée par l’echoendoscopie oesophagienne au stade de refoulement de la membrane trachéale ou bronchique, la simple broncho scopie n’apporte pas d’informations supplémentaires [36] ; l’échoendoscopie bronchique (EBUS pour endo bronchial ultra sonography) est plus volontiers utilisée pour les ponctions ganglionnaires médiastinales ;

au stade de bourgeon tumoral endo brochique ou trachéal la simple trachéo bronchoscopie avec biopsie suffit.

La tomographie à émission de positrons (TEP), dans le bilan d’extension pré thérapeutique, permet la découverte de métastases viscérales ou ganglionnaires, méconnues par les examens morphologiques conventionnels comme le scanner [37, 38]. Les recommandations du Thésaurus National sur la Cancérologie Digestive précisent la place de la TEP : « La TEP a théoriquement sa place dans le bilan d’extension lorsque le scanner et l’écho endoscopie concluent à une tumeur non métastatique et résécable. Il faut confirmer la nature métastatique des lésions vues à la TEP seule » [10].

 

La laparoscopie

Associée ou non à l’échographie per-laparoscopique, elle n’a pas fait la preuve de son efficacité dans la détection des carcinoses péritonéales méconnues par le scanner ou l’écho-endoscopie. Elle semble intéressante pour les adénocarcinomes du tiers inférieur de l’œsophage et de la jonction œsogastrique ; nous la réalisons à titre systématique pour ces indications depuis quelques années. Elle est proposée comme alternative dans les recommandations du Thésaurus National 2007 [10].

La comparaison des résultats des différentes séries est délicate en raison des disparités des méthodes d’évaluation du stade tumoral et de la médiocre corrélation entre l’évaluation morphologique et l’extension tumorale et ganglionnaire constatées sur la pièce de résection chirurgicale [39].

La chirurgie complète R0 « en bloc » [40] sans tissu résiduel microscopique ou macroscopique est un critére majeur d’appréciation de la qualité du geste chirurgical ; le taux de chirurgie « R 0 » est le facteur pronostique le plus important dans l’évolution du cancer de l’œsophage (avec la réponse à la radio chimiothérapie). Il n’y a plus de place actuellement pour la chirurgie palliative. Cette chirurgie R0 consiste en une exérèse monobloc de la tumeur et des ganglions régionaux ainsi que l’analyse rigoureuse anatomopathologique des marges longitudinales et latérales de la pièce opératoire. Le taux de chirurgie R0 est l’un des critères principaux de qualité de la chirurgie réalisée au sein d’une équipe.

Dans la série, le taux global de chirurgie R0 était de 80,7 % conforme aux données de la littérature (réf). Il a progressé de 74,1 à 82,1 % au cours de notre expérience. Il était de 80 % dans le registre bourguignon [1].

Plus inattendue, la survie à 5cinq ans des patients ayant bénéficié d’une chirurgie R0 a progressé de 34,7 % à 52 % entre les périodes 1 et 4 ; peuvent être évoquées comme explications, l’augmentation de fréquence des adénocarcinomes situés au tiers inférieur plus accessible à une chirurgie R0, et un taux de réponse complète après radio chimiothérapie néo adjuvante.

Dans ces conditions, la prédiction de la chirurgie complète R0 est devenue une étape capitale de la prise en charge pré-thérapeutique ; elle est multidisciplinaire et fortement liée à l’expérience de l’équipe chirurgicale, elle repose sur un faisceau d’arguments : données du scanner, de l’écho endoscopie, du transit oeso gastro duodénal, de la TEP, de la laparoscopie préopératoire.

L’examen minutieux du scanner par l’une équipe experte permet de sélectionner les patients pour lesquels une chirurgie complète serait possible. Elle dépend plus du siège que de la taille de la tumeur : l’extension tumorale d’une tumeur du tiers inférieur à la différence du tiers supérieur permettra plus volontiers une chirurgie optimale au prix d’une résection d’organes de voisinage, cette dernière précision a fait l’objet d’une notification récente de la nouvelle classification TNM internationale AJCC, UICC 2010 7ème édition [34].

L’absence de désaxation sur le transit œsophagien baryté [41] est prédictive d’une réponse complète, ainsi que l’extension limitée à la paroi à l’écho endoscopie [35].

La radio chimiothérapie associée ou non à la chirurgie, ne résume pas l’ensemble des traitements néo adjuvants ou adjuvants opposés au cancer de l’œsophage ; dans le cadre de l’étude, seule la radio chimiothérapie a été majoritairement utilisée De nouveaux essais cliniques ont permis d’établir les recommandations nationales pour la prise en charge thérapeutique du cancer de l’œsophage en 2007 laissant une large place à la radio chimiothérapie et la chirurgie de rattrapage dans les cancers avances ; ils représentent plus de la moitié des cancers observés dans la série et dans la littérature. Nous avons participé à 6 de ces essais cliniques (une phase I, une phase II et 4 phases III).

L’amélioration de la survie des cancers localement avancés est liée à l’abandon, pour ces cancers, de la chirurgie seule et au recours plus systématique à la radiochimiothérapie suivie ou non de chirurgie dite « de rattrapage ».

La survie à cinq ans des patients porteurs de cancers avancés et opérés après radio chimiothérapie est variable selon la qualité de la réponse tumorale et ganglionnaire à la radio chimiothérapie : 52,1 % pour les réponses complètes, 24,8 % pour les réponses partielles, 10 % pour les non répondeurs, (fig.6).

Dans l’étude, le traitement multimodal a été proposé dans 42 % des cas dans la première période et dans 56,5 % dans la dernière période. La stratégie thérapeutique pour les cancers avancés (stade III, pT3 N+) pour lesquels est proposée une association radio chimiothérapie — chirurgie, s’appuie sur l’évaluation de la réponse de la radio chimiothérapie [42] et la prédiction de la chirurgie R0 chez les patients répondeurs et non répondeurs [43].

 

CONCLUSION

L’incidence du cancer de l’œsophage diminue en France et dans le monde ; elle reste élevée dans la Région Nord-Pas-de-Calais ; Depuis vingt ans, une augmentation de l’incidence des adénocarcinomes de l’œsophage a été observée dans cette étude. Pendant cette période d’observation, le taux des cancers observés chez la femme a doublé. Une amélioration significative de la survie des patients ayant bénéficié d’une résection chirurgicale a été constatée ; de multiples facteurs ont concouru à cette amélioration, au premier rang desquels se situe l’application des critères de qualité de la chirurgie appliqués au cancer de l’œsophage en particulier, une sélection rigoureuse des patients pouvant bénéficier d’une chirurgie R0, et l’importance de la réponse à la radio chimiothérapie, pour les cancers le plus souvent observés, les cancers avancés.

Les espoirs de progrès pour l’avenir concernent la prédiction de la chirurgie complète R0 et une évaluation optimisée de la réponse à la chimio radiothérapie. Les places respectives de la chirurgie et des traitements non chirurgicaux nécessitent la poursuite d’études cliniques randomisées.

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<p>* Chirurgie digestive et générale, Hôpital C. Huriez, place de Verdun — 59037 Lille cedex, e-mail : jean-pierre.Triboulet@chru-lille.fr Tirés à part : Professeur Jean-Pierre Triboulet, même adresse Article reçu le 31 mars 2010, accepté le 4 octobre 2010</p>

Bull. Acad. Natle Méd., 2011, 195, no 1, 93-112, séance du 4 janvier 2011