Communication scientifique
Session of 6 mai 2003

Apport de la radiologie interventionnelle dans le traitement des métastases hépatiques des cancers colorectaux (Embolisation portale préopératoire — Radiofréquence percutanée)

MOTS-CLÉS : chirurgie.. metastase tumeur. tumeur foie
Interventional radiology in the treatment of liver metastases from colorectal cancer (preoperative portal vein embolization — percutaneous radiofrequency ablation)
KEY-WORDS : laser surgery.. liver neoplasms. neoplasms metastasis

T. de Baere

Résumé

L’embolisation sélective des branches portales d’une partie du foie induit une hypertrophie des segments hépatiques dont les branches portes sont laissées perméables. Cette technique permet de proposer des résections hépatiques à des patients dont le volume du futur foie restant (FFR) était initialement insuffisant, et ceci en hypertrophiant préalablement ce FFR. Il s’agit de patients dont le FFR est inférieur à 25 % du volume total, ou inférieur à 40 % en cas d’hépatopathie sous jacente. Le geste rend possible une hypertrophie de 81 fi 47 % du FFR après un délai d’environ 1 mois. Les suites opératoires, et la survie des malades opérés après chirurgie volumétriquement préparée par embolisation portale ne sont pas significativement différentes de celles des malades chez qui fut réalisée une résection hépatique classique. La radiofréquence est une technique récente de destruction physique des tumeurs hépatiques. Une aiguille électrode est mise en place dans la tumeur sous guidage de l’imagerie, après abord percutané ou per-opératoire, afin d’y émettre un courant alternatif de 400 à 500 KHz, à même d’échauffer localement les tissus proches de l’électrode par friction ionique et d’obtenir une thermocoagulation locale. La diffusion rapide de cette technique relativement nouvelle est due à la conjonction d’une efficacité locale qui semble élevée (destruction d’environ 90 % des tumeurs hépatiques primitives ou secondaires de petite taille) et d’une invasivité faible. Bien que la destruction des tumeurs hépatiques par radiofréquence suscite de grands espoirs, l’absence de bénéfice démontré pour cette technique en terme de survie, fait qu’elle doit être aujourd’hui réservée à des patients dont les tumeurs ne sont pas resécables.

Summary

Selective embolization of portal branches of some liver segments will induce hypertrophy of non embolized segments of the liver. This induced hypertrophy allows to perform hepatectomy in patients with initially insufficient volume of future remnant liver (FRL). This technique aims at patient with initial FRL volume below 25 % of total liver volume, and to patient with initial FRL volume below 40 % of total liver volume when a diffuse liver disease is present. The mean hypertrophy obtained 1 month after pre-operative portal vein embolization (POPE) was 82 fi 56 % in our experience. Post operating complications and long term survival for patient operating after POPE is not different from patient operated with a classical hepatectomy. Radiofrequency is able to destroy hepatic tumors after insertion of a needle electrode inside the tumor under imaging guidance. Thermocoagulation of the targeted tissue is obtained after emission of a 400 to 500KHz alternative able to induce frictional heating in the neighboring of the electrode. Spreading of this technique is at least partially explained by a relative high local efficacy (90 % of small tumor targeted can be destroyed) and a low invasiveness. However, today no benefit in survival has been demonstrated for patients treated with radiofrequency ablation of liver tumors. Consequently, this technique should not be proposed to tumors that can be surgically resected.

Apport de la radiologie interventionnelle dans le traitement des métastases hépatiques des cancers colorectaux (Embolisation portale pré-opératoire Radiofréquence percutanée)

Interventional radiology in the treatment of liver métastases from colorectal cancer (pre-operative portal vein embolization percutaneous radiofrequency ablation)

Thierry de BAERE *

EMBOLISATION PORTALE PRÉ-OPÉRATOIRE

Introduction

Moins de 20 % des patients porteurs de tumeurs hépatiques isolées sont opérables.

Une des contre-indications les plus fréquentes à une résection hépatique carcinologiquement satisfaisante est l’impossibilité de laisser en place suffisamment de tissu hépatique pour assurer la fonction hépatique postopératoire. Il est communément admis qu’un volume de foie restant inférieur à 25 % est une contre-indication à la chirurgie d’éxérèse chez l’adulte sain.

En redistribuant le flux veineux portal des segments devant être réséqués vers les segments qui seront laissés en place, l’embolisation portale pré-opératoire (EPPO) a pour but d’hypertrophier un futur foie restant (FFR) initialement insuffisant, et ceci afin de rendre opérables des patients dont la seule contre-indication à une chirurgie de résection hépatique est l’insuffisance volumique du FFR.

Mécanisme de l’hypertrophie et choix du matériel d’embolisation

La capacité du foie à régénérer est connue de longue date. Dans la mythologie grecque, Prométhée déroba le feu des Dieux et le transmit aux hommes. Pour le punir, Zeus l’enchaîna sur le mont Caucase, où tous les jours, un aigle venait lui
ronger le foie, lequel repoussait sans cesse, et Prométhée resta ainsi en vie jusqu’à ce qu’Héraclès vienne le délivrer.

Il existe peu d’études concernant le mécanisme de la régénération hépatocytaire après embolisation veineuse portale [1, 2]. Cependant, on peut penser que ce mécanisme est proche de celui rencontré après une hépatectomie partielle ou après une nécrose hépatocytaire aigüe.

Les hépatocytes sont capables de sortir de la phase quiescente lors de modifications locale : disjonction cellulaire, perte des interactions intercellulaires ou cellulo-matricielles en cas de nécrose. Une fois entrés dans le cycle cellulaire, les hépatocytes deviennent réceptifs à des facteurs de contrôle de leur multiplication dont le plus important est l’ hepatic growth factor (HGF) [3]. Lors d’une embolisation portale, l’obstruction des vaisseaux portaux de petit et moyen diamètres responsables de lésions de nécrose hépatocytaire, initie localement la multiplication des hépatocytes. Mais la suppression de l’apport sanguin portal (riche en insuline, glucagon, facteurs de croissance…) rend les conditions locales peu favorables à cette multiplication. Il se produit une co-régulation pour le maintien de la masse hépatique initiale par multiplication hépatocytaire qui va se produire essentiellement dans le foie non embolisé, abondamment irrigué par le sang veineux portal, dont il est établi de longue date qu’il favorise la régénération des cellules hépatiques [4].

Le cyanoacrylate induit une hypertrophie du foie non embolisé supérieure à celle obtenue lors de l’utilisation du spongel ou des spire thrombogènes [5]. Cette supériorité est probablement expliquée à la fois par l’histoagressivité de ce produit (seul des trois emboles testés capable d’induire une importante réaction inflammatoire péri-portale et péribilaire, ainsi que des zones de nécrose hépatique), que par le caractère très durable de l’embolisation qu’il induit, notamment en comparaison avec la gélatine hémostatique [6-8].

Résultats morphologiques

Hypertrophie

TABLEAU 1. — Résultat volumétrique de l’embolisation portale pre-opératoire en fonction du type des emboles utilisés. FFR : futur foie restant ; EPPO : embolisation portale pré-opératoire.

Matériel d’embolisation Cyanoacrylate Gélatine Spires Total hémostatique thrombogènes 72 3 4 79 Nombre patients Augmention FFR (%) 86 fi 42 53 fi 6 44 fi 30 81 fi 47 Délais après EPPO 30 43 35 32 FFR/foie totale avant EPPO 23 fi 7 22 fi 4 19 fi 1 22 fi 7 FFR/foie totale après EPPO 38 fi 9 36 fi 9 26 fi 2 37 fi 9

L’existence d’une cirrhose hépatique altère les possibilités de régénération hépatique, comme en témoigne l’hypertrophie de 32 à 40 % rapportée dans les séries d’EPPO sur foie cirrhotique, ce qui est bien inférieur au 81 % obtenu sur foie sain.

En revanche, nous avons obtenu sur des foies aux fonctions dégradées par des cures de chimiothérapie intra-artérielle répétées une hypertrophie de 103 fi 34 %, équivalente à celle obtenue chez les autres patients [6].

Hypertrophie et croissance tumorale

Bien que l’HGF ne semble pas favoriser le développement de tumeurs hépatiques [9 , 10], nous avons retrouvé une croissance tumorale plus rapide que l’hypertrophie hépatique en territoire non embolisé [11]. Il est difficile de conclure si cette croissance rapide était due à la nature même de la tumeur, ou aux effets de la redistribution de la totalité du flux porte vers une tumeur antérieurement à croissance plus lente. Cependant, pour pallier cette limite de l’EPPO, si cela est techniquement possible, nous détruisons maintenant par radiofréquence tout nodule tumoral qui devrait être laissé en territoire embolisé durant la période d’attente entre EPPO et chirurgie de résection.

Résultats cliniques

Dans notre expérience, l’EPPO a été réalisée chez des patients porteurs de tumeurs étendues, ou nombreuses (moyenne de 4,6 lésions hépatiques / patient). Malgré ce facteur prédictif considéré comme péjoratif par certains, la survie globale à 5 ans après chirurgie volumétriquement préparée par EPPO était de 31,3 % en incluant les deux décès postopératoires. La survie sans récidive était de 28,6 %, et bien qu’elle soit inférieure à la survie obtenue par hépatectomie classique (34 %) elle peut être considérée comme satisfaisante compte-tenu de l’importance des lésions initiales [12]. Par ailleurs, d’autres auteurs comparant deux cohortes de patients (l’une ayant bénéficiée d’une EPPO et l’autre non) ne retrouvent pas de différence significative de survie à l, 3 et 5 ans [13].

Conlusion

Bien que l’EPPO n’ait été utilisée que pour préparer 4 % de l’ensemble des hépatectomies réalisées dans notre centre, elle constitue une technique sûre bien tolérée et efficace pour rendre opérables des patients initialement inopérables et ainsi augmenter leur chance de survie. Si la qualité de l’hypertrophie pouvait être améliorée, par exemple grâce à l’injection intraportale d’une puissante substance hépatotrophique, les indications d’hépatectomie augmenteraient, notamment dans la cirrhose, ou le volume du FFR est une limite majeure de la chirurgie du foie. Des hépatectomies atypiques, laissant en place un ou deux segments pourraient alors aussi être proposées.

RADIOFRÉQUENCE PERCUTANÉE

Introduction

Les méthodes de destruction locale des tumeurs hépatiques comprennent les destructions chimiques par injection de substance toxique (alcool absolu, chimiothé- rapie, ..), et les méthodes de destruction physique (cryothérapie, LASER, radiofré- quence, …). Elles ont en commun de nécessiter la mise en place dans la tumeur, sous contrôle de l’imagerie, d’une aiguille ou d’une sonde. Parmi ces techniques, la destruction percutanée des tumeurs hépatiques par radiofréquence est celle qui a actuellement la diffusion la plus rapide, probablement en raison de la conjonction d’une efficacité locale qui semble élevée et d’une invasivité faible.

Définition et principe de la RF

Le courant de radiofréquence est un courant sinusoïdal de 400 à 500 KHz. Les régions proches de l’aiguille traversées par une importante quantité de ce courant subissent une agitation ionique, qui induit une friction des particules entre elles et en conséquence un échauffement tissulaire [14]. Le but recherché est d’exposer les cellules tumorales à une température supérieure à 60° C, ce qui provoque immédiatement une dénaturation cellulaire irréversible.

Optimisation du principe

Le diamètre maximum de la zone de destruction tissulaire induite par une électrode nue de RF n’est que de 1 à 1,5 cm, ce qui n’est pas adapté au traitement des tumeurs hépatiques. En pratique clinique, 3 artifices techniques ont été retenus pour augmenter la taille de la zone de destruction : une aiguille contenant plusieurs électrodes (4 à 12) à déployer dans le parenchyme hépatique après ponction ; le refroidissement de l’électrode, permet de délivrer une énergie électrique plus importante sans atteindre des températures supérieures à 100° C dans les tissus très proches de l’électrode ; l’injection de liquide autour de l’électrode, aussi appelée « électrode humide », diminue la résistance électrique des tissus, ce qui favorise la diffusion du courant [15].

La durée moyenne de traitement pour une position de l’électrode est de 12 à 20 minutes.

Imagerie de guidage

L’ultrasonographie est l’imagerie la plus utilisée pour guider les aiguille-électrodes dans les tumeurs cibles. Les remaniements tissulaires induits par la RF correspondent à une zone hyper-échogène très marquée qui est utile pour surveiller le
traitement. Elle ne permet pas d’affirmer formellement la destruction des tissus qui ont vu leur échostructure se modifier. En effet, cette modification d’échostructure est due à la libération de gaz, principalement du CO2, sous l’effet de la chaleur.

Lorsque les tumeurs ne sont pas, ou mal vues en échographie, le guidage tomodensitométrique peut être utilisé.

L’imagerie par résonance magnétique pourrait être utile pour aborder des lésions qui ne sont vues qu’avec cette technique ou pour montrer avec précision les zones tissulaires effectivement détruites, grâce à l’utilisation d’une imagerie de température. Cependant, beaucoup de points restent délicats, tels que l’absence de compatibilité actuelle de la plupart des sondes et des générateurs de radiofréquence avec l’IRM (matériel non amagnétique).

Imagerie de surveillance après traitement RF

Son rôle est triple : rechercher un reliquat tumoral de la ou des tumeurs traitées ;

rechercher des complications au traitement ; rechercher de nouvelles lésions à distance de la tumeur traitée.

Le but du traitement par ponction directe est de détruire la tumeur mais aussi une couronne de tissu hépatique afin d’obtenir des ‘‘ marges de sécurité ’’. Ces tissus détruits resteront nécessairement en place et formeront une ‘‘ cicatrice ’’ plus grande que la tumeur initiale. Cette cicatrice ne diminuera de taille que tardivement. Il est donc impossible d’utiliser les critères OMS ou RECIST habituels d’évaluation de réponse tumorale basés sur la seule diminution de taille de la tumeur.

La cicatrice est composée de tissu nécrotique, de fibrose, de tissu inflammatoire, de tissu de granulations, et … de tumeur active si le traitement n’est pas complet. C’est cette tumeur viable que l’imagerie s’efforcera d’identifier. TDM et l’IRM sont les méthodes d’imagerie dans l’évaluation de la réponse au traitement par RF. Il existe une très bonne corrélation entre la taille des zones non rehaussées par les produits de contraste en scanner et en IRM et la taille des nécroses de coagulation en histologie [16, 17].

Une réaction inflammatoire, très intense pendant les deux premiers mois, gêne considérablement l’interprétation IRM et TDM. De ce fait, le premier contrôle d’imagerie est effectué au moins un mois et au mieux 2 mois après la procédure, ce qui semble un compromis acceptable entre une détection précoce d’un éventuel reliquat tumoral (afin d’envisager une reprise du traitement), et une interprétation (notamment de la prise de contraste) dans des conditions satisfaisantes. Les reliquats tumoraux siègent le plus souvent à la périphérie des zones de nécrose post-RF.

Ils prennent un aspect nodulaire ou d’épaississement pariétal irrégulier se rehaussant après injection de produit de contraste.

L’échographie avec injection de produit de contraste permet actuellement d’évaluer la vascularisation intra-tumorale, elle détecte 100 % des traitements incomplets de CHC [18], mais seulement 50 % des métastases incomplètement traitées [19].

Indications hépatiques

Tumeurs primitives et tumeurs secondaires hépatiques peuvent être traitées en percutanée ou en per-opératoire, que ce soit lors d’une laparotomie [20] ou lors d’une laparoscopie [21]. La RF peut constituer un traitement exclusif de la maladie hépatique ou être associée à une chirugie de résection. La plupart des équipes se limite à des tumeurs de moins de 5 cm de diamètre, en sachant que les indications idéales concernent des tumeurs de moins de 3 cm, car le taux d’échec est élevé au-delà. Cette limitation en fonction de la taille est due au fait que la taille maximale de destruction obtenue en moyenne avec les différents systèmes RF est de l’ordre de 4 cm, et qu’une marge de sécurité est nécessaire à une bonne efficacité du traitement.

De plus il est toujours délicat de multiplier les impacts RF en tentant de faire se chevaucher les zones de destruction RF pour traiter des tumeurs plus volumineuses.

Limitations

Les tumeurs sous capsulaires n’induisent pas de risque supplémentaire, mais rendent le geste plus douloureux et augmentent l’intensité et la durée des douleurs post-traitement. En revanche, le contact ou la proximité immédiate de structures digestives creuses pose le problème d’éventuelles lésions thermo-induites de ces organes lors de l’utilisation percutanée, et plusieurs perforations coliques ont été rapportées à ce jour [22]. Une dilatation des voies biliaires en amont de la zone traitée par RF due à une sténose de la voie biliaire de proximité est parfois retrouvée.

La destruction RF au contact du hile hépatique présente un risque, de sténose biliaire secondaire.

Tout vaisseau de plus de 4 mm ne sera pas détruit par la RF et conservera un flux responsable d’un refroidissement par convection des tissus les plus proches [23].

L’avantage est de ne pas induire de thrombose ou de lésion thermique sur la paroi des gros vaisseaux qui sont ainsi protégés. En revanche, le risque est de ne pas détruire des cellules tumorales en contact étroit avec la paroi des vaisseaux [24-26].

Cet inconvénient peut être jugulé par des manipulations endovasculaires percutanées, [27] ou le clampage per-opératoire du pédicule hépatique [28].

La destruction induite ex-vivo est de taille supérieure à celle obtenue in-vivo sur le même organe [29]. En clinique, l’occlusion vasculaire obtenue par abord percutané [27], ou le clampage per-opératoire du pédicule hépatique [28, 30] permettent d’augmenter la taille de la zone de destruction RF.

Résultats

La taille des tumeur-cibles influence directement l’efficacité du traitement, avec un taux de destruction tumorale de 90 % dans le traitement des petits CHC [31], et une efficacité de 71 % des tumeurs de 3 à 5 cm de diamètre, et de seulement 25 % des
tumeurs de 5 à 9 cm de diamètre pour le même auteur [32]. Pour notre part, nous n’avons jamais retrouvé de reliquat tumoral viable pour les tumeurs de moins de 25mm [25], 91 % des tumeurs cibles de 5 à 42 mm de diamètre ont été détruites. Bien qu’aujourd’hui aucun bénéfice de survie ne soit démontré pour la radiofréquence, dans une population de patients présentant des récidives locales après hépatectomie traitées par radiofréquences percutanées itératives, nous avons obtenu des survies à 1 et 2 ans respectivement de 88 et 55 %, tout à fait superposable aux résultats obtenus par hépatectomies itératives dans une cohorte de patients comparable pour laquelle la survie était de 84 et 60 % [33]. Des essais randomisés sont donc nécessaires pour évaluer l’intérêt de la RF par rapport à d’autres traitements, afin de ne pas laisser s’installer une utilisation empirique.

Complications

Sur une expérience de plus de 150 sessions de radiofréquence pour traiter plus de 180 tumeurs, nous avons rencontré 9 complications majeures et 11 complications mineures. Les complications majeures comprenaient un décès par thrombose portale, et 6 abcès hépatiques, un hémo-biliopéritoine et une pneumopathie d’inhalation. Les patients porteurs d’anastomoses bilio-digestives constituaient donc un sous groupe à risque infectieux élevé.

Les complications mineures étaient 4 brûlures cutanées, 3 dilatations biliaires segmentaires, 2 épanchements pleuraux, un faux anévrysme artériel hépatique, et un hématome sous capsulaire de faible abondance.

Conclusion

La RF est une technique relativement récente avec un développement actuel exponentiel. La RF a démontré un taux de contrôle local élevé avec cependant des reculs courts, mais aucune notion d’augmentation de survie n’est à ce jour disponible. Plus récemment, la RF a été proposée dans le traitement de tumeurs extra-hépatiques. Il s’agit de tumeurs rénales, surrénaliennes, osseuses, mammaires, ou pulmonaires, mais peu de séries sont encore rapportées.

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DISCUSSION

M. Daniel COUTURIER

La radiofréquence est maintenant une technique très largement utilisée dans la destruction des tumeurs métastatiques du foie. Elle a été précédée d’autres propositions techniques, comme la cryothérapie. Quels avantages a apporté la radiofréquence par rapport aux autres techniques de destruction localisée aux tumeurs secondaires du foie ?

En effet, la radiofréquence semble supplanter les autres techniques de destruction locale des tumeurs hépatiques que sont la cryothérapie, les micro-ondes ou même le LASER. La diffusion de cette technique est principalement liée au fait que pour un impact de traitement, la radiofréquence offre le rapport taille de la destruction tissulaire/diamètre
de l’aiguille électrode le plus élevé de toutes les techniques de destruction tissulaire hépatique. Si bien que les volumes de destruction tissulaire obtenus par radiofréquence sont proches de ceux de la cryothérapie pour un calibre de sonde de cryothérapie environ deux fois supérieur à celui des électrodes de radiofréquence. Il en découle que le faible calibre des électrodes de radiofréquence permet l’utilisation de cette technique aussi bien en per-opératoire qu’en percutanée, avec des résultats bien supérieurs à ceux du LASER ou des micro-ondes.

M. Michel BOUREL

Quel risque de promotion dans la croissance des métastases après embolisation portale (créatrice d’émergence de facteurs de croissance) ?

Effectivement, si la redistribution du flux porte vers le foie non embolisé permet d’hypertrophier celui-ci afin de préparer la chirurgie, il est légitime de se préoccuper de la vitesse de croissance de métastases éventuellement présentes dans ce futur restant. Nous avons constaté que la croissance de ces métastases était plus rapide que celle du foie non embolisé sans pouvoir cependant élucider si cette croissance était due au génie propre de la maladie cancéreuse ou à une augmentation de vitesse de croissance induite par la redistribution du flux porte. En pratique lorsqu’il existe une métastase dans le futur foie restant et que celle-ci est accessible à une destruction par radiofréquence, nous la détruisons par radiofréquence dans le même temps que la procédure d’embolisation portale pré-opératoire. À plus long terme, le taux de survie après hépatectomie assistée par embolisation portale et des hépatectomies classiques étant le même, on peut penser que ce geste ne favorise ni la survenue, ni le développement de nouvelles métastases dans le futur foie restant.

M. François DUBOIS

Avez-vous connaissance des essais d’utilisation des radiofréquences par sonde endovasculaire ?

À ma connaissance, il n’existe pas de tentative de traitement par radiofréquence endovasculaire dans le domaine de la cancérologie. Des applications endocanalaires et notamment endobiliaires, utilisant comme électrodes des prothèses métalliques endobiliaires ont été rapportées. Des applications sous guidage écho endoscopique ont également été rapportées sur modèle animal, notamment pour la destruction du pancréas. En revanche, la radiofréquence est utilisée depuis peu pour la sclérose endoveineuse dans le cadre du traitement des varices des membres inférieurs. On utilise alors des cathéters dont les extrémités actives dont faites de 8 à 12 électrodes qui sont déployées contre la paroi de la veine à scléroser.


* Service de radiologie interventionnelle, Institut Gustave Roussy — 39 rue Camille Demoulins — 94805 Villejuif cedex. Tirés-à-part : Professeur Thierry de BAERE, à l’adresse ci-dessus. Article reçu le 14 mars 2003, accepté le 31 mars 2003 .

Bull. Acad. Natle Méd., 2003, 187, n° 5, 835-845, séance du 6 mai 2003