Communiqué
Session of 27 juin 2017

Accès aux fonctions d’interne (3e cycle des études médicales). Avant de classer, contrôler le niveau des connaissances

Jacques BRINGER *, Francis BRUNELLE *, Patrice QUENEAU *

Un communiqué exprime une prise de position officielle de l’Académie. L’Académie, saisie dans sa séance du mardi 27 juin  2017, a adopté le texte de ce communiqué avec 65 voix pour, 4 voix contre et 3 abstentions.

Accès aux fonctions d’interne (3e cycle des études médicales).

Avant de classer, contrôler le niveau des connaissances

au nom de la Commission XV (Enseignement, Recherche – Parcours de formation)

Au moment où est engagée une réorganisation des études médicales, les dispositions concernant l’accès des étudiants ayant reçu leur formation initiale dans un autre pays de l’Union européenne doivent être précisées.

En France, l’entrée en 3ème cycle des études médicales implique une prise de fonction d’interne dans les hôpitaux et chez des médecins libéraux maîtres de stages universitaires. Les « épreuves classantes nationales » (ECN), qui ne sont ni un examen, ni un concours,  ont pour seul objectif de définir l’ordre dans lequel les étudiants choisissent, sur l’ensemble de la liste des postes d’internes proposés, celui qu’ils retiennent, définissant ainsi leur région d’affectation comme interne et leur future spécialité d’exercice.

Les étudiants de l’Union Européenne (UE) ayant accompli les deux premiers cycles d’études médicales dans un pays de l’UE hors de France peuvent se présenter aux ECN où il n’y a pas de note éliminatoire. Les inscrits ayant suivi les deux premiers cycles hors de France proviennent surtout de Roumanie (n = 170 en 2015) ou d’Italie (n = 130) [1].

Ce dispositif qui ne comporte pas de contrôle ni des connaissances acquises ni de l’usage du français, expose à compromettre gravement la qualité des soins dans les établissements où ces internes sont en fonction.

Quelques chiffres sont éloquents. Aux ECN de 2014, les 227 étudiants à diplôme européen ont obtenu des notes qui ne laissent pas de doute sur l’insuffisance majeure de leurs compétences. Si 25%  d’entre eux ont obtenu une note supérieure à 500 sur 1000, la médiane des notes a été pour l’ensemble de 253 sur 1000, 10% d’entre eux ayant eu une note inférieure à 96 sur 1000 [2]. Lors des ECN de 2015, les 296 étudiants ayant acquis un diplôme européen hors de France ont obtenu dans leur majorité des notes très faibles. Leur moyenne était à 260 ± 138 [sur 1000], moins de 10 % d’entre eux atteignant la moyenne générale de 500 points sur 1000 [3].

Ainsi peut-on accéder aux fonctions d’interne avec la note de zéro aux ECN, puisque «  tout étudiant  formé dans une université européenne, français ou étranger, parlant ou non notre langue, peut s’y présenter et contourner ainsi le numerus clausus en accédant sans limitation à l’exercice médical dans notre pays », comme le souligne le Doyen Jacques Bringer [4].

La Conférence des doyens demande une réforme de la situation actuelle. La déontologie l’impose. Le succès au Certificat de Compétence Clinique (CCC) [5] qui, pour l’inscription aux ECN, s’impose aux étudiants ayant fait leurs études en France, devrait être exigé aussi des étudiants ayant fait leurs études dans un autres pays de l’Union européenne comme cela été proposé [6].

L’Académie nationale de médecine lance un appel pour la mise en place rapide d’un dispositif impliquant que tout candidat, français ou étranger, ayant effectué son 2ème cycle d’études médicales en France ou dans tout autre pays de l’UE, ne puisse s’inscrire aux ECN qu’après avoir validé le « Certificat de compétence clinique » national, comme cela vient de faire l’objet d’une recommandation récente de l’Académie sur les voies d’accès à l’exercice de la médecine en France [1].

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**Membres de l’Académie nationale de médecine

 

 

Références

[1]   Michel Huguier, Dominique Bertrand, Gérard Milhaud – Les accès à l’exercice de la médecine en France – Rapport à l’Académie nationale de médecine, approuvé en séance du 18 avril 2017.

[2]   Damien Jolly, Pierre Ambrosi, Philippe Chaffanjon, Didier Dreyfuss, Claire Le Jeunne, Gérard Lorette, Laurent Obert, Olivier Palombi, Jean-Paul Romanet, Résultats des épreuves classantes nationales (ECN) 2014 – Presse Med. 2015 ; 44 :533-571, en ligne sur www. Em-consulte.com/revue/lpm, www.sciencedirect.com

[3]   Damien Jolly, Pierre Ambrosi, Philippe Chaffanjon, Didier Dreyfuss, Claire Le Jeunne, Gérard Lorette, Laurent Obert, Olivier Palombi, Jean-Paul Romanet, Résultats des épreuves classantes nationales (ECN) 2014 – Presse Med. 2016 ; 45 :133-152, en ligne sur www. Em-consulte.com/revue/lpm, www.sciencedirect.com

[4]   Jacques Bringer, membre de l’Académie nationale de médecine, Doyen de la faculté de médecine de Montpellier, Médecine plus humaine : faut-il réformer les études ?  Le Figaro du 17/10/2016.

[5]   Arrêté du 8 avril 2013 relatif au régime des études en vue du premier et du deuxième cycle des études médicales,

Article 17 – « Un certificat de compétence clinique, dont les modalités sont détaillées en annexe du présent arrêté, est organisé au cours des deux derniers semestres de formation. Ce certificat est destiné à vérifier les compétences acquises par les étudiants et leur capacité à synthétiser les connaissances acquises. Le jury de ce certificat est pluridisciplinaire. »

Article 20 – « La validation des unités d’enseignement ou des éléments constitutifs des unités d’enseignement et des stages permet l’acquisition des 120 crédits européens correspondants. Le diplôme de formation approfondie en sciences médicales est délivré aux étudiants qui ont validé l’ensemble des unités d’enseignement ainsi que le certificat de compétence clinique. ».

[6]   Claude Jaffiol, Pierre  Godeau et Bernard Grosbois (au nom de la Commission XVI) Prise en charge des maladies chroniques – Redéfinir et valoriser le rôle du médecin généraliste, Rapport à l’Académie nationale de médecine, juin 2016.