Rapport
Session of 27 février 2007

07-09 Proposition d’un processus précontentieux obligatoire d’information et de conciliation, dans le règlement des conflits ou litiges en responsabilité médicale, à l’exclusion de l’alea médical

MOTS-CLÉS : conflit intérêt. droits du patient. négociation. relations professionnelles de santé-patient.. responsabilité légale
Proposal for a compulsory alternative dispute-resolution procedure before legal proceedings for the settlement of conflicts or litigations concerning medical responsibility, with the exclusion of medical risk
KEY-WORDS : conflict of interest. liability, legal. negotiating. patient rights. professional-patient relations.

Louis Hollender et Jacques Hureau (au nom d’un groupe de travail et de la Commission XV — Ethique et droit)

Résumé

L’Académie nationale de médecine, consciente que certains excès de judiciarisation en matière de responsabilité médicale n’ont pas été entièrement résolus par les lois des 4 mars 2002 et 30 décembre 2002, en particulier en raison des imperfections et imprécisions juridiques des textes, souhaite que les articles L. 1112-3 et L. 1142-5 du Code de la santé publique tels qu’issus de la loi du 4 mars 2002 soient amendés et propose que soit institutionnalisé un processus précontentieux obligatoire d’information et de conciliation dans le règlement de ces conflits ou litiges entre médecins et malades.

Summary

The French National Academy of Medicine is aware that the laws of March 4th, 2002 and December 30th, 2002 have not prevented all unnecessary legal procedures concerning medical responsibility, in particular because of imperfections and imprecise wording. The Academy proposes amendments to articles L. 1112-3 and L. 1142-5 of the Public Health Code (law of March 4th, 2002) and recommends creating a compulsory alternative dispute-resolution procedure to take place before any legal proceedings for the settlement of conflicts or litigation between doctors and patients.

Les excès d’une judiciarisation de la responsabilité médicale sont à l’origine du Titre IV de la loi du 4 mars 2002. Les imperfections et imprécisions de ce texte concernant l’utilisation des modes non juridictionnels de règlement des litiges méritent d’être amendées. Une analyse critique des articles L. 1112-3 et L.

1142-5 du CSP a été faite qui nécessite une connaissance des modes alternatifs de règlement des conflits ou des litiges (MARC/MARL). Après le rappel d’une précédente proposition d’amendement de ces deux articles de loi, le groupe de travail, ayant pris connaissance de dispositions similaires établies en Europe, fait état du résultat de sa réflexion et propose des recommandations à l’approbation de l’Académie nationale de médecine.

LA LOI DU 4 MARS 2002

La loi no 2002-303 du 4 mars 2002 relative aux droits des malades et à la qualité des systèmes de santé, complétée par la loi no 2002-1577 du 30 décembre 2002 relative à la responsabilité médicale, dans son titre IV concernant la « Réparation des conséquences des risques sanitaires » a apporté une solution à l’indemnisation des préjudices liés à un dommage nosocomial non fautif. Cet aléa médical, d’ailleurs non nommé et non défini comme tel dans le texte, est pris en charge par la solidarité nationale dans la limite de critères stricts fixés dans chacune des deux lois.

La même loi du 4 mars 2002 veut également apporter une solution à deux autres problèmes : l’écoute et l’information du malade ou de ses ayants droit, et le règlement des conflits ou des litiges par un mode alternatif de règlement non juridictionnel lorsque ces conflits ou litiges ne relèvent pas d’un règlement par la solidarité nationale.

L’écoute et l’information

L’article L. 1112-3 du CSP est ainsi rédigé : «

Dans chaque établissement de santé, une commission des relations avec les usagers et de la qualité de
la prise en charge …veille à ce qu’elles [les personnes malades et leurs proches] puissent le cas échéant, exprimer leurs griefs auprès des responsables de l’établissement, entendre les explications de ceux-ci et être informées des suites de leurs demandes. »

Les statistiques manquent encore pour évaluer l’impact de cette mission. Cette commission reste, aux yeux du public, entachée du même défaut que la fonction de « médecin conciliateur » antérieurement instituée dans les établissements de soins, même si elle n’a plus qu’un rôle, pourtant indispensable, d’écoute et d’information : elle est constituée par des responsables médicaux et non médicaux appartenant à l’établissement de soins donc a priori suspects d’être « juge et partie ».

Un mode alternatif de règlement des conflits

L’article L. 1142-5 du CSP dispose, dans son alinéa 3, que la commission régionale de conciliation et d’indemnisation (CRCI), en formation de conciliation « dans le cadre de sa mission de conciliation peut déléguer toute ou partie de ses compétences à un ou plusieurs médiateurs indépendants qui, dans la limite des compétences dévolues, disposent des mêmes prérogatives et sont soumis aux mêmes obligations que les membres de la commission ».

La confusion, dans un même texte chargé de « faciliter le règlement amiable des litiges » , des termes de « conciliation » et de « médiation » est regrettable.

Mal nommer les choses c’est se condamner à mal faire. Ce qui avait été prédit [1] arriva ; cette négligence terminologique du législateur ne pouvait aboutir qu’à un échec des faux semblants. Quatre années pleines d’exercice de la loi ont prouvé l’insuccès de cette mission de « conciliation-médiation » mal bâtie [2, 3].

Pour comprendre l’argumentation de ce texte il faut faire un rappel sémantique de ce que sont les modes alternatifs de règlement des conflits (MARC) ou des litiges (MARL) [4-6].

Distinction entre modes de règlement binaires et ternaires

Les modes binaires ne nécessitent pas obligatoirement l’existence d’un tiers entre les parties.

Appartiennent à cette catégorie :

— le règlement amiable, — la conciliation, — la transaction.

Nous verrons plus loin ce qu’il faut penser du terme « accord amiable ».

Les modes ternaires font obligatoirement intervenir un tiers entre les parties.

Appartiennent à cette catégorie :

— l’arbitrage, — la médiation.

Les définitions de ces différents concepts

Ils sont utilisés tant dans la loi que dans l’organigramme proposé par le groupe de travail.

Le règlement amiable

Ce terme est imprécis. Il représente le but à atteindre dans la recherche d’une solution à un litige hors la voie du procès et dans un contexte d’apaisement mais il ne préjuge pas du moyen mis en œuvre ni de l’esprit dans lequel se fait ce règlement. Tout règlement extra juridictionnel pourrait être qualifié de règlement amiable.

L’accord amiable

Il n’est pas tout à fait synonyme de règlement amiable avec lequel il est souvent confondu. Comme lui c’est le résultat de la recherche d’une solution à un litige dans un contexte d’apaisement mais par la voie précise d’une recherche d’accord. C’est l’essence des MARL ou des MARC telle que la conciliation mais pas de la médiation.

La transaction

Elle bénéficie d’une définition légale (art. 2044 à 2058 du code civil).

La transaction est un contrat par lequel les parties terminent ou préviennent une contestation en consentant des concessions réciproques (contrat synallagmatique). C’est l’aboutissant vers lequel tend tout règlement amiable. Les transactions ont, entre les parties, l’autorité de la chose jugée en dernier ressort. L’exequatur, exécutoire du juge, n’est pas obligatoire.

L’arbitrage

C’est un véritable mode juridictionnel codifié mais non étatique. Le tribunal arbitral (souvent un arbitre unique) émet une sentence arbitrale à valeur juridictionnelle qui s’imposera grâce à la procédure d’exequatur devant le président du TGI du ressort.

La conciliation

Elle se distingue de la transaction et de l’arbitrage par le fait qu’elle ne bénéficie pas d’une définition légale. Selon la doctrine c’est « un mode de règlement des litiges grâce auquel les parties s’entendent directement pour y mettre fin, au besoin avec l’aide d’un tiers (le conciliateur) » .

Type même du MARL, la conciliation peut également, selon les textes, être une mission confiée au juge (civil ou administratif).

« Le terme de conciliation désigne à la fois le résultat, l’accord amiable et le moyen pour y parvenir » . L’accord amiable est consubstantiel au processus.

« L’accord amiable est ontologiquement inscrit dans le procédé » . La conciliation met l’accent sur l’accord amiable, fut-ce au détriment de la qualité de l’expression des parties.

La médiation

Elle diffère profondément de la conciliation par sa philosophie et son processus. Elle ne bénéficie pas, comme l’arbitrage, d’une définition législative.

La médiation est un processus de communication éthique reposant sur la responsabilité et l’autonomie des participants, dans lequel un tiers impartial, indépendant, sans pouvoir de trancher ou de proposer (sans pouvoir décisionnel ou consultatif) avec la seule autorité que lui reconnaissent les médieurs, favorise par des entretiens confidentiels l’établissement ou le rétablissement du lien social, la prévention ou le règlement de la situation en cause.

Cette définition rappelle les quatre fonctions princeps de la médiation définies par J.F. Six : médiation créatrice, médiation réparatrice, médiation préventive, médiation curative (7).

« Le conflit ne constitue pas le critère indispensable de la médiation dont les seuls critères restent le processus [de communication éthique] et le tiers » . Le tiers médiateur aide au rapprochement des points de vue et joue un rôle actif dans la recherche et la proposition d’une solution sans jamais imposer son propre jugement.

En situation de conflit la médiation en aborde tous les aspects. Par une véritable maïeutique elle fait découvrir aux parties les vérités qu’elles portent en elles et qu’elles ne doivent plus cacher. Elle les vide totalement par ce processus de communication éthique où tous « accouchent » de leurs pensées.

La conciliation recherche l’accord quitte à éviter d’aborder les aspects délicats du conflit.

La médiation au contraire cherche à les faire émerger pour pouvoir aller plus loin.

Le choix entre ces différents MARL — la conciliation

De l’avis de nos deux consultants juristes, un haut magistrat et un professeur de droit, l’arbitrage n’a pas sa place et la médiation n’est pas adaptée au règlement des conflits ou litiges en matière de responsabilité médicale.

La conciliation, même si elle ne procède pas de la maïeutique qui fait la puissance de la médiation, permet, par sa simplicité, de mieux gérer le litige naissant ou déjà constitué entre le malade ou ses ayants droit et l’acteur des soins.

C’est le processus que le groupe de travail a adopté et retenu pour sa proposition à l’Académie.

UNE PRÉCÉDENTE PROPOSITION DE LOI POUR AMENDER CETTE MALFAÇON LÉGISLATIVE

Le 4 juin 2003, sous la direction du Professeur Olivier Jardé, député de la Somme, une proposition de loi (No 806) était déposée en ce sens sur le bureau de l’Assemblée Nationale, appuyée par 60 parlementaires députés [8].

L’exposé des motifs

Il précisait que « l’article 4 [de cette proposition] veut définir de façon distincte les deux missions dévolues aux commission régionales de conciliation et d’indemnisation qui n’ont pas, selon la mission choisie, le même rôle et les mêmes compétences » .

Le texte de cet article 4 de la proposition de loi est le suivant :

« De l’article L. 1142-5 du code de la santé publique, les deuxième et troisième alinéas sont remplacés par 4 alinéas ainsi rédigés :

La Commission peut siéger à deux titres :

— en formation de règlement amiable des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales lorsque le dossier qui lui est présenté, après avis du collège d’experts, entre dans le cadre défini à l’art.

L. 1142-1-II du code de la santé publique ;

— en formation de conciliation extrajudiciaire dans tous les autres cas. Si les parties viennent à se concilier, les experts en informent la commission. Les parties peuvent demander au juge de la juridiction compétente de donner force exécutoire à l’acte d’accord. A défaut de conciliation constatée par le collège d’experts, la commission peut inciter les parties à recourir à un mode de règlement des conflits extrajudiciaire et institutionnalisé tel que l’arbitrage médical ou la médiation médicale… »

Cet amendement maintenait la conciliation dans les missions des CRCI.

À ce jour il n’a pas été donné suite à cette proposition. C’est la raison pour laquelle un groupe de travail a été constitué à l’Académie Nationale de

Médecine dans le but de réactualiser ce projet d’amendement, compte tenu de l’échec constaté de la loi sur le point de la mission de conciliation.

Au préalable, qu’il nous soit permis de rappeler que [9] :

En Europe un tel processus précontentieux est déjà en vigueur. Les Etats suivants sont classés en fonction de l’importance et de l’efficacité qu’ils ont données à ce processus précontentieux :

en Espagne il est obligatoire avant la saisine du juge administratif ;

aux Pays-Bas il est recommandé, non obligatoire, mais assorti d’une possible pénalité prononcée par le juge en ce qui concerne les frais de procédure en cas de refus ;

— en Belgique une procédure de concertation précédant un compromis d’expertise amiable est à l’étude ;

— au Royaume Uni et en Irlande ont été mis en place un « médiateur spécialisé » pour le système public et un protocole dit « code de bonne conduite » dont la non observance en secteur privé peut être sanctionnée par le juge ; il en résulte une diminution de 35 % des poursuites devant la juridiction civile ;

en Suisse il est obligatoire de se soumettre à l’un des deux bureaux d’expertises extrajudiciaires (30 % de déjudiciarisation) ;

en Allemagne les procédures extrajudiciaires de résolution amiable sont très institutionnalisées. Elles sont sous la dépendance soit de commissions d’experts , soit de bureaux de conciliation selon les Länder. Elles sont considérées comme des instances de médiation. Elles ne sont pas obligatoires. Elles n’interviennent que si les deux parties sont d’accord et seulement si l’affaire n’a pas été confiée à un tribunal. Elles sont saisies de 90 % des contentieux médicaux et résolvent plus de 90 % des affaires qui leur sont soumises.

Ajoutons que dans les systèmes néozélandais et scandinaves, l’indemnisation est basée sur des critères de responsabilité objective indépendante de la notion de faute. La procédure extrajudiciaire est donc de règle et le recours aux tribunaux exceptionnel.

LES TRAVAUX DU GROUPE DE RÉFLEXION

Le but de l’étude

Il est d’élaborer un « processus précontentieux obligatoire d’information et de conciliation » en préalable à toute ouverture d’une instance devant une

CRCI ou une juridiction judiciaire ou administrative. La conciliation y est conçue comme un processus préalable et indépendant de la mission des CRCI et des instances juridictionnelles.

Le constat

La carence de l’information et du dialogue est source d’incompréhension et d’insatisfaction pour le malade et de raidissement psychologique injustifié du médecin et de l’équipe soignante. Il faut y remédier avant d’entamer le processus de conciliation.

Objectifs et critères de la présente proposition

Ont été retenus :

la protection des patients et des professionnels de santé des excès de la judiciarisation, — l’allègement du contentieux des CRCI et des juridictions judiciaires et administratives (en aucun cas cette proposition ne conteste l’intérêt du processus accéléré par recours aux CRCI), — la nécessité et la possibilité de dédramatiser, dans un grand nombre de cas, la relation médecin-malade qui doit rester fondée sur la confiance et l’humanisme en dépit de la technicité croissante des actes de soins, — la non déresponsabilisation des acteurs de soins, — le développement d’une meilleure communication entre les parties en présence, — le respect du principe de la contradiction (art. 16 du Nouveau Code de

Procédure Civile — NCPC) et de l’équité (art. 6 de la Convention européenne des droits de l’Homme — CEDH), — le rôle primordial des conseils des parties (avocats et médecins conseils) pour le bon équilibre du processus, — l’ouverture sur toutes les possibilités d’indemnisation des préjudices liés à un dommage corporel lorsqu’une ou des erreurs, voire une faute caracté- risée, sont reconnues à l’origine du dommage, conformément aux principes énoncés dans la résolution (75)7 du Conseil de l’Europe, — le maintien du recours aux CRCI et aux juridictions compétentes, toujours ouvert après épuisement du processus d’information et de conciliation préalable obligatoire.

Le processus lui-même

Tout en respectant la situation existant en France, il s’inspire de l’existant en Allemagne où la déjudiciarisation des conflits en matière de responsabilité médicale atteint 91,4 % des dossiers traités, efficacité qui rejoint presque celle de la loi Badinter (> 95 %) en accidentologie automobile.

Le protocole suivi est résumé dans l’organigramme ci-joint qui définit deux étapes, la première d’information et la seconde de conciliation :

— à partir de la plainte ou de la réclamation, — un processus d’ information concernant l’évènement indésirable est activé à l’échelon local entre le plaignant et le médecin ou l’établissement, sous le contrôle d’un médecin indépendant (expert ou non) ;

— si l’évènement indésirable est sans conséquence dommageable, un accord peut intervenir après cette phase d’information qui débouche sur un classement sans suite ;

— en cas de désaccord il y a recours à l’étape de conciliation ;

— si l’évènement indésirable est à l’origine d’un dommage, en cas d’accord une transaction menée par les parties, assistées de leurs conseils juridique et médical, peut intervenir (la présence d’un médecin expert n’est pas indispensable) ;

— en cas de désaccord il sera recouru à l’étape de conciliation ;

— la conciliation est menée par une « commission de conciliation » à un niveau qui pourrait être celui de la région et selon les règles d’une véritable expertise judiciaire ;

— en cas d’accord il sera recouru à la transaction ;

— les CRCI ou les juridictions ne seront plus saisies (selon la loi du 4 mars 2002) qu’à défaut de transaction ou en cas de désaccord persistant après conciliation ;

— la mission des « CRCI » est ainsi recentrée sur son objectif initial primor- dial : l’indemnisation de l’aléa médical par la solidarité nationale.

RECOMMANDATIONS DE L’ACADÉMIE NATIONALE DE MÉDECINE

Il est souhaitable que les articles L. 1112-3 et L. 1142-5 du Code de la santé publique tels qu’ils sont issus de la loi du 4 mars 2002 soient amendés dans leur rédaction.

Cet amendement aurait pour but d’institutionnaliser un processus précontentieux de règlement des conflits en responsabilité médicale, indépendant de la mission des CRCI et des instances juridictionnelles, à l’instar de ce qui existe dans nombre de pays européens.

Le protocole retenu (cf. organigramme ci-joint) — serait obligatoire, — comporterait deux étapes successives, la première d’information indispensable, instituée à l’échelon local, la seconde de conciliation instituée à l’échelon régional, — aboutirait, dans tous les cas où un accord est obtenu, à une transaction ou à une décision de classement sans suite selon que l’évènement indésirable est ou non à l’origine du dommage.

En cas d’échec de ce processus précontentieux obligatoire, le recours aux CRCI (solidarité nationale) ou aux tribunaux compétents, conformément aux lois du 4 mars 2002 et du 30 décembre 2002, reste toujours possible.

Ce protocole doit respecter le principe de la contradiction (art. 16 du NCPC) et les règles du procès équitable (art. 6 de la CEDH).

Personnalités auditionnées :

Mr. O. Jardé, député, chef de service d’orthopédie, professeur de médecine légale, expert agréé par la Cour de cassation et Mme M. Guillaume-Hofnung, professeur de droit à Paris XI, spécialiste de droit médical et des modes alternatifs de règlement des conflits (MARC) ou des litiges (MARL).

BIBLIOGRAPHIE [1] DE FONBRESSIN P. et HUREAU J. — L’indemnisation de l’aléa médical. Titre IV de la loi du 4 mars 2004. Confusions, imperfections, non-dits. Experts, 2002, 56, 11-15.

[2] ONIAM — Rapports semestriels d’activité. http : //www.oniam.fr [3] CNAM — Rapports annuels au Parlement et au Gouvernement. http : //www.cnam.fr [4] GUILLAUME-HOFNUNG M. — in Harmonisation de la réparation des préjudices corporels dans l’Union européenne — Rapport de l’Académie nationale de médecine. Editions médicales internationales, 2007, p.69-79 (rapport intégral).

[5] GUILLAUME-HOFNUNG M. — La médiation. Que sais-je ? 2930, PUF édit. Paris 2005.

[6] HUREAU J. et de FONTBRESSIN P. — La médiation dans la loi du 4 mars 2002 ou l’échec des faux semblants. Médiations et Sociétés, 2006, 11 /12, 39-44.

[7] SIX J.F. — Le temps des médiateurs. Le Seuil édit. Paris 1990.

[8] JARDÉ O. — Proposition de loi No 806 — Responsabilité et droits des malades — Assemblée nationale — Commission des affaires culturelles, 4 juin 2003.

[9] HUBINOIS P. — Législations et indemnisations de la complication médicale en France et en Europe. Bruylant édit. Bruxelles 2006.

*

* *

L’Académie, saisie dans sa séance du mardi 27 février 2007, a adopté le texte de ce rapport à l’unanimité (neuf abstentions).

COMMUNIQUÉ au nom d’un groupe de travail ** et de la Commission XV (Éthique et droit)

Proposition d’un processus précontentieux obligatoire d’information et de conciliation dans le règlement des conflits ou litiges en responsabilité médicale, à l’exclusion de l’aléa médical.

Proposal for a compulsory alternative dispute-resolution procedure before legal proceedings for the settlement of conflicts or litigations concerning medical responsibility, with the exclusion of medical risk

Louis HOLLENDER * et Jacques HUREAU *

La loi du 4 mars 2002 relative aux droits des malades et à la qualité des systèmes de santé, complétée par la loi du 30 décembre 2002, a apporté par son Titre IV une solution à l’indemnisation des préjudices graves liés à un dommage nosocomial non fautif. Cet aléa médical est pris en charge par la solidarité nationale dans la limite de critères stricts fixés par la loi.

L’Académie nationale de médecine a, par contre, pris acte des difficultés rencontrées par les « Commissions des relations avec les usagers … » instituées par l’article L. 1112-3 du code de la santé publique (CSP) issu de la loi du 4 mars 2002, dans la mission d’écoute et d’information des patients ou de leurs proches.

* Membre de l’Académie nationale de médecine ** Constitué de : MM. E. ARON, J. BARBIER, L. HOLLENDER (Président), J. HUREAU (Secrétaire), D.

PELLERIN, J. SAINTE-ROSE, Conseiller d’État, ancien avocat général à la Cour de cassation (Invité).

L’Académie a également constaté le quasi échec de la mission de « conciliation-médiation » donnée aux commissions régionales de conciliation et d’indemnisation (CRCI) par l’article L. 1142-5 du CSP issu de la même loi.

Cet échec est expliqué par les imperfections et imprécisions juridiques du texte.

L’Académie nationale de médecine considère que les deux articles précédemment cités doivent faire l’objet d’un amendement législatif.

Entourée des avis juridiques les plus compétents, elle a pris connaissance des divers modes alternatifs de règlement des conflits ou des litiges existants.

Elle rappelle une précédente proposition de loi du 4 juin 2003 visant à amender cette malfaçon législative.

Elle s’est informée sur les différents dispositifs précontentieux existant dans d’autres états d’Europe et sur leur efficacité.

Le but de ses travaux est d’élaborer un « processus précontentieux obligatoire d’information et de conciliation » en préalable à toute ouverture d’une instance devant une CRCI ou une juridiction.

Elle souhaite, face à certains excès de la judiciarisation de la médecine, en protéger les patients et les professionnels de santé, alléger le contentieux des CRCI et des juridictions, dédramatiser dans bon nombre de cas la relation médecin-malade sans déresponsabiliser les acteurs de soins, ceci dans le parfait respect du principe de la contradiction et de l’équité et en maintenant ouvertes toutes les voies de recours aux CRCI et aux juridictions compétentes conformément à la loi du 4 mars 2002.

Recommandations

Le groupe de travail de la Commission XV de l’Académie nationale de médecine propose les recommandations suivantes :

Il est souhaitable que les articles L. 1112-3 et L. 1142-5 du Code de la santé publique tels qu’ils sont issus de la loi du 4 mars 2002 soient amendés dans leur rédaction.

Cet amendement aurait pour but d’institutionnaliser un processus précontentieux de règlement des conflits en responsabilité médicale, indépendant de la mission des CRCI et des instances juridictionnelles, à l’instar de ce qui existe dans nombre de pays européens.

Le protocole retenu — serait obligatoire, — comporterait deux étapes successives, la première d’information indispensable, instituée à l’échelon local, la seconde de conciliation instituée à l’échelon régional,
— aboutirait, dans tous les cas où un accord est obtenu, à une transaction ou à une décision de classement sans suite selon que l’évènement indésirable est ou non à l’origine du dommage.

En cas d’échec de ce processus précontentieux obligatoire, le recours aux CRCI (solidarité nationale) ou aux tribunaux compétents, conformément aux lois du 4 mars 2002 et du 30 décembre 2002, reste toujours possible.

Ce protocole doit respecter le principe de la contradiction (art. 16 du NCPC) et les règles du procès équitable (art. 6 de la CEDH).

*

* *

L’Académie, saisie dans sa séance du mardi 27 février 2007, a adopté le texte de ce communiqué à l’unanimité (neuf abstentions).

* Membre de l’Académie nationale de médecine ** Constitué de : MM. E. ARON, J. BARBIER, L. HOLLENDER (Président), J. HUREAU (Secrétaire), D. PELLERIN, J. SAINTE-ROSE, Conseiller d’État, ancien avocat général à la Cour de cassation (Invité).

Bull. Acad. Natle Méd., 2007, 191, no 2, 435-444, séance du 27 février 2007