Publié le 25 novembre 2020

Communiqué de l’Académie nationale de médecine et de l’Académie vétérinaire de France : Espèces animales sensibles au SARS-CoV-2 et risques en santé publique

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Espèces animales sensibles au SARS-CoV-2 et risques en santé publique

Communiqué de l’Académie nationale de médecine et de l’Académie vétérinaire de France

24 novembre 2020

 

 

Si l’origine de l’émergence du SARS-CoV-2 en décembre 2019 à Wuhan a été identifiée (coronavirus RaTG13 de la chauve-souris), l’hôte intermédiaire ayant pu jouer le rôle de vecteur reste incertaine, l’hypothèse du Pangolin n’ayant pas été formellement démontrée.

Dans les conditions naturelles, l’infection par le SARS-CoV-2 a été observée avec des signes cliniques mineurs chez des chats et des chiens contaminés par leur propriétaire dans de nombreux pays dont la France.

Dans des conditions expérimentales, les chats, les chiens et les furets ont confirmé leur sensibilité, ainsi que la possibilité d’une recontamination par contact d’animaux témoins chez le chat et surtout chez le furet. Par ailleurs, les porcs et les volailles s’avèrent résistants à toute inoculation par le SARS-CoV-2 et les bovins sont très faiblement sensibles. Au laboratoire, le hamster doré, le lapin et le macaque rhésus sont sensibles au SARS-CoV-2 alors que les souris et les rats de laboratoire sont résistants.

Parmi les animaux de la faune sauvage, la contamination de félidés en captivité (tigres, lions, puma) a été rapportée. Expérimentalement, la souris sylvestre s’est révélée sensible au SARS-CoV-2 de même que des chauves-souris (roussettes). Les chiens viverrins, présents à l’état sauvage en Europe où ils sont considérés comme nuisibles, sont très sensibles au SARS-CoV-2 et pourraient être des hôtes intermédiaires potentiellement impliqués dans la propagation de la Covid-19.

Enfin, les visons, très sensibles à l’infection, se contaminent rapidement dans les élevages où la forte densité animale en milieu clos favorise la production d’aérosols infectants et la propagation rapide du virus entre les animaux, voire au personnel d’élevage. Dès le mois d’avril les Pays-Bas ont annoncé les premières contaminations de fermes de visons par le SARS-CoV-2, puis la possibilité d’une transmission de l’animal vers l’Homme. Le nombre de fermes infectées n’a cessé de progresser sans que l’on connaisse l’origine exacte des contaminations. Sept autres pays ont déclaré l’infection par le SARS-CoV-2 dans des élevages de visons (Espagne, États-Unis, Danemark, Italie, Suède, Grèce et tout récemment la France).

Premier producteur mondial de visons avec 1138 fermes, le Danemark a déclenché une alarme le 4 novembre en annonçant qu’il abattait tous les troupeaux de visons du pays pour empêcher la dissémination d’un SARS-CoV-2 mutant (dénommé DFVI-spike) ayant franchi la barrière d’espèce en contaminant l’Homme. Le risque principal lié à cette mutation était de compromettre la protection vaccinale escomptée des vaccins actuellement en cours de développement. Bien que les informations disponibles au Danemark et aux Pays-Bas ne démontrent pas un risque accru de contagiosité par ce mutant, même si des incertitudes subsistent, tous les cas n’étant pas détectés et tous les virus n’étant pas séquencés, le principe de précaution a prévalu.

 

Le faible nombre de cas humains rapportés et les données scientifiques accessibles à ce jour ne permettent pas de considérer ce variant DFVI-spike comme une menace pour la santé publique. Toutefois, l’Académie nationale de médecine et l’Académie vétérinaire de France recommandent :

  • de mener les études supplémentaires pour évaluer le risque présenté par le variant DFVI-spike ;
  • si ces études révèlent que ce variant risque d’échapper à la réponse immunitaire développée contre le SARS-CoV-2, d’évaluer les implications potentielles pour le diagnostic, le traitement et le développement de vaccins contre la Covid-19 ;
  • de surveiller toute nouvelle mutation du SARS-CoV-2 dans la protéine S, liée au vison ou non, afin de pouvoir adapter les vaccins à ces mutations, comme cela a eu lieu en médecine vétérinaire pour la bronchite infectieuse aviaire depuis des décennies ;
  • de ne pas limiter la surveillance aux fermes d’élevage de visons, mais de l’élargir aux autres espèces animales (domestiques ou sauvages) pour éviter que se constituent des réservoirs animaux occultes de SARS-CoV-2 ;
  • de renforcer les mesures de biosécurité recommandées vis-à-vis des animaux, et plus particulièrement des visons;
  • d’améliorer la coordination entre les secteurs de la santé animale, humaine (y compris la santé et la sécurité au travail) et environnementale, dans un contexte « une seule santé » afin de développer des stratégies efficaces de lutte contre la pandémie de Covid-19.

 

Bibliographie

 

Avis de l’Académie nationale de médecine et de l’Académie vétérinaire de France « SARS-CoV-2 : sensibilité des espèces animales et risques en santé publique » 24 novembre 2020.