insensibilité congénitale à la douleur l.f.
congenital insensitivity to pain, hereditary sensory and autonomic neuropathy (HSAN)
Absence de réaction aux stimulations nociceptives liée à une neuropathie congénitale héréditaire impliquant les systèmes sensitifs avec une participation plus ou moins importante des systèmes autonomes et sensoriels.
L’insensibilité à la douleur occasionne de nombreuses mutilations : morsure de la langue et des lèvres au cours de la mastication, brûlures et plaies des doigts, fractures multiples, infection secondaire etc. De nombreuses formes sont décrites selon l’importance des troubles associés des systèmes autonomes et sensoriels, de l’âge d’apparition des symptômes, des localisations, de l’hérédité et des anomalies génétiques. Elles entrent dans le cadre général des neuropathies héréditaires sensitives (NHSA) ( Hereditary Sensory and Autonomic Neuropathy, HSAN) classées par P.J. Dyck, en cinq types :
-le type I- NHSA I- le plus fréquent, à transmission autosomique dominante débute tardivement entre 10 et 40 ans par une atteinte des extrémités ; son évolution est progressive ;
-le type II- NHSA II- de transmission autosomique récessive, est à un début précoce ;
-le type III- NHSA III- correspond à la dysautonomie familiale, syndrome de Riley-Day ;
-le type IV-NHSA IV- de transmission autosomique récessive associe à l’insensibilité une dysautonomie, une anhidrose et un retard mental ; il est lié à une altération d’un récepteur du facteur de croissance nerveuse NGF ;
-le type V-NHSA V- est cliniquement comparable au type IV mais sans anhidrose ni trouble mental.
Une forme clinique moins sévère, autosomique récessive, avec une atteinte de la sensibilité des tissus profonds (osseux, tendineux) est liée à une altération du récepteur de faible affinité du NGF-β.
Dans le cadre des neuropathies sensitives, on y associe les formes héréditaires associées à des troubles moteurs et cérébelleux dont le tableau clinique, les lésions histologiques et la physiopathologie sont très différents
P. J. Dyck, neurologue américain (1983)
Syn. analgésie congénitale, indifférence congénitale à la douleur, NHSA
→ neuropathie héréditaire sensitive, dysautonomie familiale, insensibilité congénitale à la douleur avec anhidrose
insensibilité congénitale à la douleur de type I l.f.
congenital insensitivity to pain type I, hereditary sensory and autonomic neuropathy type I, HSAN I
Neuropathie sensitive héréditaire de transmission autosomique dominante à début tardif entre 10 et 40 ans par une abolition de la sensibilité douloureuse et thermique dans les territoires périphériques, mains et pieds et s’étendant progressivement en s’accompagnant d’une diminution des perceptions somesthésiques, de la sudation, des reflexes ostéotendineux, et s’associant à des troubles trophiques et des douleurs neuropathiques des extrémités, le tact et le goût restant normaux.
L’examen histologique montre une atteinte des fibres nerveuses fines, vectrices des sensibilités thermo-algésiques. L’affection est liée à une mutation du gène codant pour une sous unité de la sérine-palmitoyltransférase, enzyme impliquée dans la synthèse des sphingolipides.
G. V. N. Dearborn, médecin et psychiatre américain (1932)
Syn. neuropathie héréditaire sensitive de type I, NHSA I, indifférence congénitale à la douleur
→ insensibilité congénitale à la douleur,
insensibilité congénitale à la douleur de type II l.f.
congenital insensitivity to pain type II, hereditary sensory and autonomic neuropathy type II, HSAN II
Neuropathie sensitive héréditaire de transmission autosomique récessive à début très précoce caractérisée par une altération des sensibilités tactiles et proprioceptives et des autres sensations somesthésiques, prédominant aux extrémités, associée à une abolition des réflexes ostéotendineux et à des troubles trophiques.
L’examen histologique montre une absence presque totale des fibres myélinisées et un déficit des fibres amyéliniques.
Syn. neuropathie sensitive héréditaire de type II, NHSA II
insensibilité congénitale à la douleur de type III l.f.
congenital insensitivity to pain type III, hereditary sensory and autonomic neuropathy type III, NHSA III, familial dysautonomia, Riley-Day’s syndrome
C. M. Riley et R. L. Day, pédiatres américains (1949)
insensibilité congénitale à la douleur de type IV l.f.
congenital pain insensitivity with anhidrosis, hereditary sensory and autonomic neuropathy type IV, HSAN IV
→ insensibilité congenital avec anhidrose
insensibilité congénitale à la douleur de type V l.f.
congenital insensitivity to pain type V, hereditary sensory and autonomic neuropathy type V, HSAN V
Altération grave de la sensibilité thermo-algésique avec dysautonomie survenant précocément et de transmission autosomique récessive.
Le tableau clinique se rapproche de celui du type IV des neuropathies héréditaires sensitives mais sans anhidrose ni retard mental. L’examen histologique montre une atteinte des fibres fines myélinisées de type A- δ.
→ insensibilité congénitale à la douleur
insensibilité congénitale à la douleur liée à une canalopathie l.f.
congenitral insensitivity to pain caused by channelopathy
Forme particulière d’insensibilité à la douleur, sans autres troubles somesthésiques ou du système autonome, par défaut de fonction des canaux sodiques membranaires des cellules nerveuses.
La douleur n’est pas perçue alors que le tact, la chaleur et le froid le sont. Les réflexes sont normaux. Il n’y a aucune anomalie sensorielle ni altération du système autonome. L’intelligence est normale. Les mutilations secondaires peuvent être importantes. Il n’y a aucune anomalie des nerfs à l’examen histologique.
L’affection est liée à des mutations du gène SCN9A – locus en 2q24- codant pour la sous unité α d’un canal sodique Nav1.7 voltage-dépendant, exprimé dans les neurones nocicepteurs périphériques. La mutation entraînerait, avec la perte de fonction des canaux, une absence de formation et de propagation des potentiels d’action des signaux nociceptifs.
A l’opposé, une autre mutation du gène SNC9A provoquerait sa surexpression (un gain de fonction) à l’origine de l’érythromélalgie primitive familiale de transmission autosomique dominante –Dib-Hajj.
J. J. Cox, généticien britannique (2006) ; S. D. Dib-Hajj, neurologue américain (2005)
→ canalopathie, canal ionique, canal sodique, insensibilité congénitale à la douleur
insensibilité congénitale avec anhidrose l.f.
congenital pain insensitivity with anhidrosis,
Affection rare héréditaire de transmission autosomique récessive associant une insensibilité congénitale à la douleur à une dysautonomie avec anhidrose.
L’affection apparaît précocement avec une perte de la sensibilité douloureuse et thermique mais conservation de la sensibilité tactile et entrainant des mutilations secondaires, des poussées d’hyperthermie sans hypertension, une hypotrichose, des dystrophies unguéales, une hypotonie, un retard mental. L’anhidrose, généralisée, prédomine au tronc et aux membres supérieurs.
L’examen histologique montre la perte des fibres de petit calibre, une réduction de l’innervation du derme et des glandes sudoripares. L’affection est liée à une mutation du gène TRKA en 1q21-22, codant pour le récepteur tyrosine-kinase du facteur de croissance nerveuse NGF intervenant dans le développement des nocicepteurs périphériques et des fibres synaptiques. (Y. Indo)
Une forme clinique comporte une insensibilité cutanée moins importante mais plus marquée sur les tissus profonds et une altération des fibres nerveuses amyéliniques. Elle est liée à des mutations sur le gène codant pour la sous unité β du NGF intervenant sur un récepteur (la protéine P75) de moindre affinité que le récepteur TRKA
Y. Indo, pédiatre japonais (1996 et 2001) ; Elisabeth Einarsdottir, généticienne suédoise (2004)
Étym. gr. an : privatif ; hidrôs : sueur
→ insensibilité congénitale à la douleur
insensibilité aux androgènes l.f.
androgen insensitivity, Morris syndrome
Déficit congénital des récepteurs aux androgènes observé chez un sujet génétiquement masculin (de caryotype 46, XY), mais phénotypiquement féminin.
Il est responsable d’un pseudohermaphrodisme masculin : l’apparence est féminine, mais sans guère de pilosité axillaire ni pubienne, avec une cupule périnéale sans cavité vaginale. L’affection se révèle ordinairement après l‘âge pubertaire en raison de l’absence d’apparition de menstruations. Le développement mammaire féminin est permis par l’aromatisation en œstrogènes des androgènes normalement produits. Les testicules sont en position inguinale, et doivent être enlevés pour éviter le développement d’un gonadoblastome.
Au sens propre le testicule n’est pas féminisant mais non masculinisant. Malgré le caryotype XY, l’identité féminine est maintenue après le diagnostic toujours fait très tard et le morphotype féminin maintenu par une œstrogénothérapie après l’ablation des gonades.
J.M. Morris, gynécologue américain (1953)
Syn. testicule féminisant, Syndrome de Morris
→ gonadoblastome, pseudo-hermaphrodisme masculin
[C3, O3, O4]
Édit. 2020
accouchement sans douleur l.m.
Lamaze’s technique
→ accouchement psychoprophylactique
[H4,O3]
Édit. 2016
asymbolie à la douleur l.f.
asymbolia to pain
Comportement inhabituel obtenu en réponse à des stimulations douloureuses, malgré la préservation des sensibilités élémentaires (Schilder et Stengel).
Le patient semble ne plus pouvoir rattacher consciemment le stimulus douloureux à son propre corps. Certains auteurs en font une forme d'asomatognosie.
P. Schilder, neuropsychiatre américain (1886-1940) ; E. Stengel, psychiatre britannique (1902-1973)
douleur n.f.
pain, ache
Sensation pénible perçue par des récepteurs périphériques non spécifiques et transmise à la moelle par de petites fibres nerveuses avec ou sans myéline (fibres Ad ou C).
La douleur est une sensation complexe qui comporte plusieurs composantes (sensorielle, nociceptive, affective, cognitive et comportementale) dont l'importance varie avec le type et la cause. Les voies médullaires de la douleur passent par les cornes postérieures et suivent les voies spinoréticulo-thalamiques (voies extra-lemniscales) pour se terminer dans les noyaux ventraux du thalamus. Elles sont relayées de là jusqu'aux centres supérieurs où la douleur devient consciente et peut être localisée avec plus ou moins de précision. La douleur entraîne des réponses réflexes motrices médullaires (réaction de défense) et des réponses neurovégétatives centrales qui peuvent être très violentes (possibilité d'arrêt cardiaque) et être la cause d'incapacité subite dans une tâche de sécurité. Dans les ganglions rachidiens postérieurs, siège des noyaux des fibres de la douleur, il y a production entre autres, de substance P et de bradykinine (très algogènes), secrétées dans les cornes postérieures.
Les douleurs projetées en surface résultent de la convergence sur les mêmes neurones d’informations issues de structures viscérales profondes et d’incitations afférentes d’origine cutanée. Elles peuvent être difficiles à différencier des algies radiculaires ou tronculaires.
Le système nerveux central n’assure pas qu’un simple transit de l’information algogène : il délivre aussi de nombreuses modulations facilitatrices et inhibitrices.
Observées dans 10 à 40% de la population totale, les douleurs chroniques représentent le symptôme le plus fréquent de la pathologie médicale. Ce sont notamment les lombalgies (qui affecteraient en France un million à un million et demi de personnes), les séquelles traumatiques et chirurgicales ainsi que 60 à 90% des cancers à la phase terminale.
La douleur peut être d’origine :
- somatique par excès de stimulations nociceptives, avec activation au niveau des récepteurs périphériques du phénomène douloureux et transmission aux structures centrales ;
- neurogène ou neuropathique, avec désafférentation liée à des lésions nerveuses par compression ou autre origine. Les manifestations cliniques sont alors polymorphes et les désordres induits multiples. En fait, la complexité et les intrications des mécanismes centraux et périphériques sont fréquents ;
- psychogène qui ne doit être admise qu’avec une grande prudence malgré sa fréquence d’un cas sur cinq selon certains.
La souffrance comporte un malaise émotionnel, affectif et thymique, d’intensité variable, personnel à chacun, qui se développe en face d’une douleur ressentie comme intolérable et avec laquelle elle s’intrique généralement.
C’est dire le polymorphisme des réactions individuelles à la douleur et les difficultés souvent éprouvées par l’équipe soignante pour contrôler un contretransfert négatif en présence de certains patients passifs, dépendants, attachés à des bénéfices secondaires et/ou réfugiés dans l’alcool ou les drogues.
L’appréciation de l’intensité de la douleur est importante à établir dans le cadre des essais thérapeutiques. Plusieurs techniques sont possibles comme l’utilisation des échelles verbales sur lesquelles la cotation est graduée d’une extrémité à l’autre de « aucune douleur » à « très sévère ». C’est l’intéressé lui-même qui apprécie le degré de la douleur et ceci conduit à tenir compte de sa personnalité.
Pendant de nombreux siècles, les attitudes à l’égard des antalgiques pourtant connus dès l’antiquité, furent très ambivalentes, avec parfois valorisation des vertus de la résistance ou de la négation, et d’autres fois une note de mysticisme.
La circulaire n° 95-22 DGS/DH du 6 mai 1995 (ministère de la Santé) dispose notamment : « L’évolution des connaissances scientifiques et techniques permet d’apporter dans la quasi-totalité des cas, une réponse aux douleurs… »
Étym. lat. dolor : douleur
→ bradykinine, incapacité subite, nocicepteur, P (substance)
douleur aigüe l.f.
acute pain
Douleur plus ou moins tolérable, de survenue rapide, plus ou moins localisée, perçue pendant quelques secondes à quelques jours (p. ex., douleur postopératoire).
Étym. lat. dolor : douleur
douleur aigüe postopératoire l.f.
post-operative pain
Douleur survenant dans les suites d'un acte diagnostique ou thérapeutique et consécutive au traumatisme chirurgical (section, tractions, etc.).
C'est une douleur par excès de nociception, localisée au niveau de la zone opératoire le plus souvent, mais pas toujours. Cette douleur peut être évaluée par le patient lui-même (autoévaluation) ou par l'équipe soignante (hétéro-évaluation).
Autoévaluation par une échelle numérique simple (le patient donne une note de 0 à 100) ou visuelle analogique (possible chez l'enfant dès l'âge de cinq ans), par une échelle verbale simple à quatre niveaux (0, aucune ;
1, faible ; 2, modérée ; 3, intense) ou par l'indice de satisfaction («êtes-vous satisfait de la prise en charge de votre douleur postopératoire»). A partir de la quantité d'analgésique utilisée, les appareils permettant au patient de contrôler lui-même son analgésie permet d'évaluer l'intensité de la douleur évitée.
Hétéro-évaluation par les membres de l'équipe soignante (chez l'adulte ou l'enfant) basée sur l'appréciation du comportement du patient cotée en trois niveaux :
1) patient calme ne donnant pas de signes ou n'exprimant pas sa douleur ;
2) patient exprimant sa douleur verbalement ou par son comportement (attention, même s'il ne souffre pas, un patient ayant une langue maternelle ne possédant pas de forme du futur, l'arabe, par ex., a tendance à manifester sa crainte, par un comportement ou des paroles exprimant une douleur redoutée) ;
3) manifestations extrêmes, agitation majeure non contrôlée, cris, pleurs, prostration, immobilité, repli du patient sur lui-même.
Chez l'enfant de un à cinq ans on peut utiliser l'échelle objective d'évaluation de la douleur.
Étym. lat. dolor : douleur
→ analgésie contrôlée par le patient, échelle objective d'évaluation de la douleur, échelle visuelle analogique d'autoévaluation
douleur (aréactivité à la) l.f.
lack of reactivity to pain
C. M. Riley et R. L. Day, pédiatres américians (1949)
douleur chronique l.f.
chronic pain
Douleur évoluant de façon permanente ou intermittente pendant plusieurs semaines ou mois et expliquée par une affection chronique.
On distingue les douleurs chroniques liées à une affection cancéreuse (souvent par excès de nociception) ou non (un mécanisme de désafférentation est le plus souvent en cause). La prolongation des douleurs augmente l'importance de la composante affective et comportementale au cours de l'évolution.
Étym. lat. dolor : douleur
douleur (évaluation clinique de la) l.f.
pain (clinical evaluation), pain (assesment of), pain (assesment of a painful patient)
Procédé permettant de mesurer l’intensité de la douleur d’un patient, première étape à la mise en œuvre d’une stratégie pluridisciplinaire, individualisée.
La complexité des douleurs et la diversité de leurs formes faisant obstacle à l'emploi d'une méthode unique satisfaisante, obligent à tenir compte parallèlement aux investigations somatiques :
- du phénomène perçu : types d’une grande diversité (brûlure, coup de poignard, étau, etc.), localisation, étendue, irradiations, intensité, rythme diurne ou nocturne, signes d’accompagnement, chronicité, évolution dans le temps, effet des traitements ;
- du mécanisme générateur : par excès de nociception (origine rhumatismale, dégénérative, inflammatoire, cancéreuse) ; par désafférentation (zona, membre fantôme, etc., avec, en particulier, siège dans un territoire de déficit sensitif sur fond douloureux dysesthésique permanent, émaillé de paroxysmes) ; sympathalgique ; myalgique ; éventuellement psychogène ;
- de composantes ou résultantes variables selon chacun, telles qu'anxiété, dépression, trouble de la personnalité, aspects psychosociaux et facteurs susceptibles d'exacerber ou de fixer la douleur (bénéfices secondaires, en particulier).
Divers instruments sont utilisés, échelles "globales" : verbale simple, numérique, visuelle analogique (la plus sensible, souvent préférée, sous la forme d’une réglette) ; questionnaires de vocabulaire (McGill Pain Questionnaire), pour reconnaître une douleur neurogène et évaluer la tolérance affective de la douleur ; questionnaires de qualité de vie, qui apprécient le comportement du patient.
Aux âges extrêmes de la vie, la douleur est encore plus délicate à évaluer :
- chez la personne âgée, son expression est volontiers pauvre du fait de troubles du langage, d’handicaps sensoriels, de ralentissement intellectuel et/ou de régression affective. Une position antalgique, une protection spontanée des zones douloureuses, une réaction de retrait ou un rictus pendant l’examen, sont évocateurs ;
-chez l’enfant, ses difficultés de reconnaissance peuvent être majeures en présence d’handicapés mentaux qui s’expriment essentiellement par des troubles du comportement. La grille de Gustave Roussy en particulier, regroupe trois parties : signes directs de la douleur, expression volontaire de celle-ci et atonie psychomotrice.
Cette approche globale laisse toute sa place à la clinique et fait confiance à la description de la douleur par le malade, facilitant la relation et le programme thérapeutique plurimodal.
À l'évidence, la notion de trouble psychique ne permet pas d'exclure a priori une étiologie somatique.
La tendance à sous-évaluer la douleur de l'autre est générale.
R. Melzack, psychologue canadien (1975) ; G. Roussy, anatomopathologiste français, membre de l'Académie de médecines (1874-1948)
Étym. lat. dolor : douleur
→ McGill Pain questionnary, douleur neuropathique (critères diagnostiques)
[H1]
Édit. 2018
douleur iatrogène l.f.
iatrogenic pain
Douleur causée par un geste thérapeutique.
P.ex. douleur provoquée par une infiltration articulaire.
douleur induite l.f.
inferred pain
Douleur causée par un geste médical ou thérapeutique dans des circonstances prévisibles et susceptibles d’être prévenues par des mesures adaptée.
P. ex. douleurs des soins d’escharres, des soins de kinésithérapie.
douleur (médicaments de la) l.m.p.
drugs of pain, (pain killer)
Agents pharmacologiques utilisés pour soulager la douleur, qui ne permettent pas toujours un apaisement complet de celle-ci mais procurent au moins, à la plupart des patients, une amélioration satisfaisante.
L’éventail analgésique est vaste mais limité dans ses actions et non exempt d’effets indésirables. Contre les douleurs des cancéreux, les substances disponibles sont efficaces dans environ 60 à 80% des cas.
Dans les douleurs par excès de nociception, l’action des antalgiques s’exerce :
- en périphérie, grâce à l’inhibition de la biosynthèse de substances algogènes, par l’aspirine, les anti-inflammatoire non stéroïdiens, le paracétamol, les glucocorticoïdes…
- aux niveaux médullaire et supramédullaire, grâce à l’inhibition de la transmission synaptique des influx douloureux, par la morphine.
La morphine et ses succédanés suspendent la plupart des douleurs intenses par excès de nociception, observées au cours de l’évolution des cancers et après les interventions chirurgicales. Ses effets indésirables ont été surestimés et en particulier, le risque d’induction d’une toxicomanie est réduit.
Dans les douleurs par désafférentation, les antidépresseurs non psychostimulants et certains antiépileptiques diminuent l’hyperexcitabilité neuronale. En cas d’effets indésirables trop importants, les stimulations électriques (surtout transcutanées) sont utiles.
Le schéma de l'OMS, concernant le traitement des douleurs chroniques, distingue depuis 1997, trois paliers :
- I, les médicaments non morphiniques (essentiellement paracétamol, aspirine et anti-inflammatoires non stéroïdiens) qui sont indiqués contre les douleurs légères à modérées ;
- II, les opioïdes dits "faibles" (codéine, dextropropoxyphène) associés ou non aux produits précédents, qui sont utilisables contre les douleurs modérées à sévères ou après l’échec des antalgiques du palier I ;
- III, les opioïdes "forts", avec pour référence la morphine, ils sont efficaces contre les douleurs d'emblée intenses ou après l’échec des produits du palier II.
À chaque palier, des adjuvants peuvent être associés : antidépresseurs, antiépileptiques et myorelaxants. De plus la composante antalgique de certains traitements étiologiques – chimiothérapie, radiothérapie (par réduction tumorale), corticoïdes – est souvent manifeste.
Les principales règles et principes à respecter lors de la prescription d’antalgiques sont :
- un traitement individualisé,
- le respect des contre-indications,
- la prudence chez les personnes âgées et les enfants,
- l’administration à intervalles réguliers, à horaires fixes, en fonction de la durée d'action de la substance choisie,
- l’absence de dose standard pour la morphine avec la recherche de la plus faible dose,
- la préférence pour la voie orale, sans méconnaître l’utilité des voies intraveineuse ou sous-cutanée, contrôlées par le patient lui-même, avec cependant un dispositif de sécurité intégré au pousse-seringue pour éviter les surdoses.
En fait, le nombre des médicaments de la douleur demeure limité. L’intérêt actuel se porte sur des agonistes des récepteurs opioïdes (présumés exempts des effets indésirables de la morphine) et sur les agonistes des systèmes mono-aminergiques descendants du tronc cérébral. Ce sont principalement les systèmes sérotoninergiques et noradrénergiques, dont le rôle dans la modulation de la transmission nociceptive est essentiel. Les inhibiteurs de la cyclo-oxygénase 2, les antagonistes des récepteurs des acides aminés excitateurs ou des récepteurs aux neurokinines, les agonistes des récepteurs nicotiniques, les agonistes des récepteurs NT2 de la neurotensine sont aussi des voies de recherche.
Étym. lat. dolor : douleur
→ antalgique, analgésique, morphine, opioïde
douleur morale l.f.
moral grief, psychical pain
Sentiment pénible durable, associant tristesse, souffrance mentale et pessimisme, indépendamment des circonstances extérieures.
Rencontrée dans les états anxieux et dépressifs, cette douleur psychique est intense dans la mélancolie dont elle est un signe essentiel (J. Séglas). La conviction désespérée d'un désastre personnel mérité (voire touchant les siens), imminent, inéluctable, s'accompagne alors de très forts sentiments d'autodépréciation et de culpabilité, sans qu'il y ait conscience du pathologique. Notamment, le patient se vit comme n'étant plus capable d'aimer, ni de s'émouvoir ("anesthésie affective") et il se le reproche.
Cette souffrance extrême et peu soutenable s'accompagne habituellement d'une angoisse très vive. Le risque suicidaire est élevé.
J. Séglas, médecin aliéniste français (1895)
Étym. lat. dolor : douleur
Syn. hyperthymie douloureuse
douleur (neurochirurgie de la) l.f.
pain (neurosurgery)
Techniques actuellement développées grâce à la microchirurgie, dont la sélectivité lésionnelle est obtenue par des thermocoagulations hypersélectives ou des lasers CO2.
Leurs indications relèvent de l'inefficacité des médicaments antalgiques prescrits à doses régulières et suffisantes.
Dans le cas d'un excès de stimulation nociceptive, il s'agit d'interrompre les voies de la nociception ou de mettre en place une pharmacothérapie locale à base de morphine.
En présence de douleurs neuropathiques par désafférentiation sensitive, une neurostimulation à visée analgésique peut produire un soulagement supérieur à celui des autres thérapeutiques.
À l'évidence, une expérience de l'équipe interdisciplinaire est indispensable.
À côté de la neurochirurgie proprement dite, seront citées p. ex. les dérivations digestives, les stabilisations osseuses et les décompressions nerveuses. Mais par suite des lésions nerveuses qu'elles sont susceptibles de provoquer, ces interventions peuvent être à la base d'autres douleurs chroniques.
Étym. lat. dolor : douleur
douleur (neuromédiateur de la) l.m.
neurotransmitter of pain
douleur (neurophysiologie de la) l.f.
neurophysiology of pain
Étude des mécanismes qui différencient la sensation créée par une agression algogène souvent transitoire, mettant en jeu un système de défense, et les douleurs-maladies, souvent au long cours, sans rôle protecteur évident, plus malaisées à calmer.
Seront distinguées tout particulièrement les douleurs :
- par excès de nociception (hyperstimulation des récepteurs à la douleur, liée aux substances libérées par des tissus lésés, enflammés ou ischémiés) ;
- par désafférentation, ou douleurs neuropathiques (d'origine périphérique ou centrale, secondaires à la perte ou à l'atteinte du système inhibiteur physiologique qui module la propagation des influx douloureux, siégeant dans un territoire où existe un déficit du message venant de la périphérie) ;
- d'ordre sympathique (algodystrophie, causalgie), musculaire (fibromyalgie, etc.), éventuellement psychogène.
De toute façon, la douleur n'est pas une sensation simple, directement véhiculée jusqu'au niveau cérébral. Elle subit des modulations et des contrôles. En particulier, la théorie du "portillon" ("gate control", R. Melzack et P.D. Wall) fait état de son contrôle au niveau des neurones convergents de la corne dorsale de la moelle.
R. Melzack, psychologue canadien et P. D. Wall, anatomiste britannique (1965)
Étym. lat. dolor : douleur
douleur obstétricale l.f.
labour pain
Sensation douloureuse due aux contractions utérines ressenties par la femme en travail.
De siège hypogastrique sus-pubien ou lombaire, elle est rythmée par les contractions. Elle n'apparaît qu'à partir d'un certain seuil de la contraction utérine. Son intensité augmente progressivement au cours du travail : peu marquée pendant la période d'effacement du col, comparable à une piqûre d'insecte, d'où son nom de « mouche », elle est préparante au cours de la dilatation, expulsive quand la présentation prend contact avec le périnée, et devient concassante lors de la distension périnéale. La préparation psychoprophylactique selon Lamaze portait, à tort, le nom d’« accouchement sans douleur ».
Étym. lat. dolor : douleur