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Hominidés... où, quand, pourquoi, comment ?
SÉANCE CommunicationsYves COPPENS, Michel BRUNET, Brigitte SENUT, Jean-Jacques HUBLIN
26 novembre 2019 - C est la grande histoire de l origine de l Homme, qui s étale sur 10 millions d années, présentée lors de cette séance. Une histoire jalonnée en quatre étapes, les deux premières : « pré-humain » et « l humain ». La première phase remonte à 7 millions d années = 7Ma, la seconde à 6 millions d années, la troisième à 3 millions d années et la dernière à 300 000 ans.
Sahelanthropus tchadensis Michel BRUNET
Depuis 1994 la Mission Paléoanthropologique Franco-Tchadienne (MPFT) fouille dans le désert du Djourab (Nord Tchad) où elle a d abord mis au jour, en 1995, un nouvel Australopithèque dit Abel (3.5 Ma), le premier connu à l ouest du Grand Rift Africain. En 2002, la MPFT décrit le plus ancien Hominini (la famille Humaine tribu sœur des Panini, les chimpanzés) Sahelanthropus tchadensis dit Toumaï (7 Ma) bipède par l anatomie de son crâne tandis que la sédimentologie et l assemblage faunique associé témoignent d un paysage mosaïque composé de lacs, marécages, forêts, bosquets, savanes arborées et prairies herbeuses. Le crâne et la denture présentent une association unique de caractères primitifs et dérivés qui montrent clairement leur appartenance aux Hominini, et non aux grands singes africains, mais temporellement proche de leur dernier ancêtre commun. Ces plus anciens pré-humains avaient une répartition géographique non restreinte à l Afrique Orientale et Australe mais plus large, incluant au moins l Afrique tropicale Centrale et Sahélienne.
Orrorin tugenensis Brigitte SENUT
Les travaux, menés au Kenya (Collines Tugen), ont conduit à redresser certains des grands mythes de l origine de l Homme. Ainsi : i) La dichotomie entre grands singes africains et l homme n est plus estimée à 5-6 Ma mais au moins à 9 Ma (et peut-être plus) ; 2) L hypothèse « savane » selon laquelle l homme serait né dans la savane et qu en conséquence la bipédie est apparue dans cet environnement ne tient plus : l homme a évolué dans des forêts sèches mais vertes toute l année ou en pays boisé humide ; iii) Les australopithèques ne seraient pas les ancêtres de l homme mais appartiendraient à une branche latérale ; iv) Le chimpanzé n est pas un bon modèle de l an- cêtre de l homme tant sur le plan de la locomotion que sur celui de la denture nouvelle (car il mange de la viande).
Origine de l homme Yves COPPENS
L émergence du genre humain (Homo sapiens) a pu être précisée par des études menées sur une dizaine d années dans le sud de l Ethiopie. Elle est schéma- tisée par la représentation d une falaise de 800m de haut dont la structure inférieure correspond à plus de 3 Ma alors que la partie supérieure date de moins d 1 Ma. Le contraste entre la présence de nombreux fossiles dans la partie haute (signifiant climat sec) et celle d une faune différente dans la partie inférieure (suggérant un milieu humide) permet de conclure à un changement climatique entre 3 Ma et 1 Ma. Entre le « bas » et le « haut », on est passé du préhumain (qui marche et grimpe) à l humain qui marche bien plus qu il ne grimpe, développe une denture adaptée à une alimentation devenue carnée, et développe sa tête et surtout son cerveau pour s adapter à solutionner les risques liés à son nouvel environnement.
Homo sapiens Jean-Jacques HUBLIN
Homo sapiens est la seule espèce survivante d une grande diversité de formes d homininés du Pléistocène Moyen (troisième étage du Pléistocène). Cette espèce, au succès adaptatif remarquable, a une origine africaine et s est répandue en Eurasie durant le Pléistocène supérieur (première époque de la période du Quaternaire), d abord dans les régions tropicales, puis plus tardivement dans les moyennes latitudes. Elle y a supplanté d autres formes d homininés, les Néandertaliens et les Dénisoviens en les absorbant partiellement. Les formes les plus anciennes connues d Homo sapiens ont été découvertes à Jebel Irhoud, au Maroc et sont âgées de 300 000 ans. Elles présentent une mosaïque de caractères dérivés et primitifs. Les caractères dérivés intéressent notamment le système masticateur. Parmi les caractères primitifs, la morpho- logie endocrânienne se distingue de celle globulaire de l homme actuel. Ces fossiles sont associés à un « Middle Stone Age » ancien représenté en Afrique de l est et du sud. Le Middle Stone Age ancien pour- rait représenter un marqueur de l expansion de notre espèce. L origine géographique d Homo sapiens a généralement été située en Afrique sub-saharienne mais aujourd hui c est plutôt un modèle d origine panafricain et polycentrique qui est privilégié.
Conclusions Yves COPPENS
Si on considère l ensemble des Vertébrés, nous ne sommes ni ceux qui entendons le mieux, qui voyons le mieux ou courons le mieux. Mais nous sommes sans doute ceux qui pensons le mieux (l homme sait
qu il sait ). Nous puisons depuis 3 Ma dans notre environnement et, même si depuis le 19ème siècle les données quant à l utilisation de notre environnement ont fort changé, il convient d exprimer un véritable hymne à l humanité en cessant de lui en vouloir de puiser dans ce milieu.
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