Communiqué
Séance du 12 février 2008

Sur la vaccination contre l’hépatite B en France

MOTS-CLÉS : médecine préventive.. vaccin antihépatite b

Pierre BÉGUÉ*, Marc GIRARD**, Jacques FROTTIER*, François DENIS*

Communiquémédecine préventive., vaccin antihépatite bPierre Bégué, Marc Girard, Jacques Frottier, François Denis (au nom de la Commission VII — Maladies infectieuses et médecine tropicale, et la souscommission vaccinations)

 

Pierre BÉGUÉ*, Marc GIRARD**, Jacques FROTTIER*, François DENIS*

et la sous-commission « Vaccinations ».

Une campagne médiatique sur les effets adverses graves de la vaccination contre l’hépatite B se développe à nouveau en France à la suite de la mise en examen des laboratoires producteurs du vaccin. Bien qu’elle concerne leur action publicitaire en 1994, l’accent est mis, par les médias, sur la responsabilité du vaccin dans la survenue de cas de sclérose en plaques (SEP).

L’Académie nationale de médecine s’inquiète de ces allégations, qui réveillent une fois encore l’inquiétude et les hésitations des médecins vaccinateurs et des personnes à vacciner. Elle rappelle ses prises de positions antérieures, en date du 4 février 1997, du 30 juin 1998 et du 3 décembre 2002. En 2002, déjà, l’évaluation du rapport bénéfices/risques du vaccin faite par l’InVs dans une cohorte d’adolescents et d’adultes à risques montrait que le nombre de porteurs chroniques du virus, de cirrhoses et de cancers du foie évité par la vaccination était très supérieur à celui des éventuels effets secondaires imputés [1].

Depuis cette époque, huit études nationales et internationales ont démontré l’absence de relation statistiquement significative entre la SEP et la vaccination contre l’hépatite B. Une étude publiée en 2004 par Hernan [2] a soulevé des questions mais sa méthodologie a été réfutée par les experts de l’OMS [3, 4]. Deux réunions de consensus nationales en 2003 et 2004 ont confirmé les recommandations de vaccination prioritaire des nourrissons et de rattrapage des enfants et adolescents non vaccinés [5, 6]. Tout récemment ont été publiées deux études des services de neuro-pédiatrie français (KIDSEP) chez l’enfant et l’adolescent (2007) :

la première démontre l’absence d’influence du vaccin de l’hépatite B sur le risque de passage à la SEP après le premier épisode de maladie démyélinisante ; la deuxième montre qu’il n’y a pas d’augmentation du risque de première poussée de SEP après une vaccination contre l’hépatite B dans les trois années précédentes [7, 8]. L’ensemble de ces résultats a conduit le Haut conseil de santé publique à rappeler les recommandations de la vaccination le 14 décembre 2007 [9].

L’Académie nationale de médecine constate que la couverture vaccinale du nourrisson et de l’enfant demeure très faible en France (25 %), contrairement aux autres pays européens et du continent nord-américain. En 2003-2004 on observait 600 nouveaux cas d’hépatite B annuels, dont la moitié aurait pu être évitée si les recommandations de vaccination avaient été suivies, et l’on estimait à 280 000 le nombre de porteurs de l’Ag HbS en France [10]. Les craintes actuelles à l’égard de la vaccination, injustifiées, vont encore aggraver cette situation. L’Académie nationale de médecine affirme à nouveau l’importance de la vaccination contre l’hépatite B, souligne la cohérence en terme d’efficacité et de sécurité des recommandations de vaccination contre l’hépatite B des nourrissons avec rattrapage jusqu’à treize ans, rappelle les données scientifiques montrant son absence d’imputabilité dans la SEP chez les enfants et les adolescents et insiste sur le risque qu’il y a, pour la France, à laisser persister une protection aussi faible contre cette redoutable maladie.

BIBLIOGRAPHIE [1] LÉVY-BRUEH D., DESENCLOS J.C., REBIÈRE I., DRÜCKER J. — Central demyelinating disorders and hepatitis B vaccination : a risk benefit approach for the pre-adolescent vaccination in France. Vaccine , 2002, 20 : 2065-71.

[2] HERNA´N M.A., JICK S.S., OLEK M.J., JICK H. — Recombinant hepatitis B vaccine and the risk of multiple sclerosis. A prospective study. Neurology , 2004, 63 , 838-42.

[3] NAISMITH R.T., CROSS A.H. — Does the hepatitis B vaccine cause multiple sclerosis ?

Neuro- logy , 2004, 63 , 772-773.

[4] Comité consultatif mondial de l’organisation mondiale de la santé sur la sécurité des vaccins :

réponse à l’article de Hernan et al. intitulé ‘‘ vaccin hépatite B recombinant et risque de sclérose en plaques ’’ et publié le14 septembre 2004 dans la revue Neurology. OMS. Hépatite B. GACVS.

www.who.int [5] Réunion de consensus : vaccination contre le virus de l’Hépatite B. 11 et 12 septembre 2003.

Paris. www.inserm.fr [6] AFSSAPS, ANAES, INSERM. Audition publique. Vaccination contre le virus de l’Hépatite B et sclérose en plaques. État des lieux. Paris 9 novembre 2004. Rapport. www.inserm.fr [7] MIKAELOFF Y., CARIDADE G., ASSI S., TARDIEU M., SUISSA S., on behalf of the KIDSEP study group of the French Neuropaediatric Society — Hepatitis B vaccine and risk of relapse after a firstchildhood episode of CNS inflammatory demyelination. Brain , 2007, 130 , 1105-10.

[8] MIKAELOFF Y., CARIDADE G., ROSSIER M., SUISSA S., TARDIEU M. — Hepatitis B Vaccination and the Risk of Childhood-Onset Multiple Sclerosis. Arch. Pediatr. Adolesc. Med ., 2007, 161 , 1176-82.

[9] Haut Conseil de la santé publique. Avis relatif aux recommandations de vaccination contre l’hépatite B en France. 14 décembre 2007. Avis du HCSP. www.hcsp.fr [10] ANTONA D., DELAROCQUE-ASTAGNEAU E., LÉVY-BRUEH D. — Déclaration obligatoire des hépatites B aiguës : résultats de la première année de surveillance, France, 1er mars 2003-1er mars 2004. Bull. Épidemiol. Hebd ., 2005, 31 , 157-160.

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L’Académie, saisie dans sa séance du mardi 12 février 2008, a adopté le texte de ce communiqué moins deux abstentions.

 

* Membre de l’Académie nationale de médecine. ** Membre correspondant de l’Académie nationale de médecine.

 

Bull. Acad. Natle Méd., 2008, 192, no 2, 433-435, séance du 12 février 2008