Publié le 28 mars 2019

Séance dédiée à des communications

des lauréats des prix du palmarès 2018

 

Un nouveau modèle animal d’étude du neuroblastome

Valérie CASTELLANI (Institut NeuroMyoGène, Université Claude Bernard Lyon1, CNRS 5310, Inserm 1217, Faculté de Médecine et de Pharmacie de Rockefeller, Lyon), à partir d’une réflexion générale sur les cancers pédiatriques, s’est intéressée au neuroblastome.

 

Les cancers de l’enfant, très différents de ceux de l’adulte, sont considérés comme des maladies rares. Prés de la moitié d’entre eux sont soupçonnés d’avoir une origine embryonnaire, en raison de l’origine des cellules qui subissent une transformation maligne, et parce que l’organisme au sein desquels ils émergent est encore en construction et présente des caractéristiques propres à son état immature. La conception de nouveaux modèles tumoraux capables de restituer le contexte immature, est un levier clé pour l’étude de ces cancers et le développement de nouvelles stratégies thérapeutiques adaptées aux enfants. Le neuroblastome (NB), 150 cas/an en France, est une tumeur emblématique du jeune enfant ; la moitié des cas est diagnostiquée avant l’âge de deux ans. Ce cancer du système nerveux sympathique dérive d’une population transitoire de cellules embryonnaires, issues de la crête neurale, hautement migratoires au sein des tissus de l’embryon, ici adréno-sympathiques. Ce potentiel de dissémination particulièrement élevé expliquerait les formes métastatiques, fréquentes et dévastatrices, détectées dès le diagnostic de ce cancer. Ces caractéristiques limitent considérablement l’accès aux étapes précoces de la tumorigenèse neuroblastique et de la dissémination métastatique. La conception d’un modèle original, basé sur la greffe de cellules tumorales humaines dans un embryon aviaire, s’appuie sur les travaux de Nicole Le Douarin : il a permis de modéliser la pathologie neuroblastique, depuis la formation de la tumeur primaire dans les dérivés sympathico-adrénaux jusqu’à la formation de métastases distales. De nouvelles données sur le programme pro-métastatique du NB ont été obtenues par l’exploitation de ce modèle en combinaison avec des approches d’analyses moléculaires globales. Ces travaux étudiant l’influence du microenvironnement sympathique apportent un éclairage sur les relations de lignage entre les NB et leur cellule d’origine et sur l’impact des programmes de développement de l’embryon sur la progression tumorale. Une signature moléculaire se dégage, composée de trois familles de gènes : les sémaphorines et leurs récepteurs les neuropilines et les plexines. Les sémaphorines forment une famille de gènes produisant des protéines membranaires avec un profil d’expression spécifique : elles guident les flux migratoires chez l’embryon et participent à leur intégration dans les organes en formation, elles décroissent de moitié dans les cellules qui se préparent à métastaser et en fonction inverse de l’agressivité de la tumeur.

 

 

Traitement par radiofréquence des épilepsies pharmaco-résistantes. Pierre BOURDILLON a travaillé dans le Département de neurochirurgie, sous l’impulsion du Pr Marc Guénot du CHU de Lyon.

 

L’épilepsie est un problème de santé publique avec 500.000 patients en France. Trente pour cent sont résistantes au traitement médical. L’origine focale permet d’avoir une action chirurgicale ; or chez trois-quarts des patients, le foyer est dans une zone soit trop large, soit hautement fonctionnelle. L’utilisation de la thermocoagulation par radiofréquence guidée par stéréo-électro-encéphalographie (SEEG) pourrait être le traitement de choix des épilepsies pharmaco-résistantes. Cette technique repose sur l’utilisation des données électro-encéphalographiques intracrâniennes pour guider la réalisation de lésions du foyer épileptique par radiofréquence. Cette technique bénéficie de résultats de travaux antérieurs de stéréotaxie et stéréo-électro-encéphalographie, qui ont montré la sécurité de l’insertion intracérébrale d’électrodes d’enregistrement électro-encéphalographique au niveau insulaire, région d’accès chirurgical difficile (vaisseaux sylviens) et fréquemment impliquée dans les réseaux épileptiques. En outre, une étude, in-vitro (albumine) et in-vivo animale (cerveau de lapin), a montré la faisabilité et la sécurité de la réalisation de lésions par radiofréquence par les électrodes d’enregistrement. A partir de ces données, une étude clinique a évalué cette technique dans le traitement des épilepsies pharmaco-résistantes ; elle a inclus 162 patients.  Un an après le traitement, 7% des patients étaient libres de crises et 48% étaient répondeurs (au moins 50% d’amélioration sur la fréquence ou l’intensité des crises) ; 1,1 % de complications neurologiques furent constatées. En cas de récidive à distance (plus d’un an), ce traitement peut être reproposé. Cette thérapeutique constitue donc une nouvelle ligne de traitement dans l’épilepsie pharmaco-résistante, pour des patients non accessibles à une résection chirurgicale.

 

 

 

Préservation de la fertilité et de la féminité dans les cancers gynécologiques : de la demande « légitime » à l’évaluation de la sécurité carcinologique, par le Pr Philippe MORICE, de l’université Paris XI,  chef du département de chirurgie de l’Institut Gustave Roussy, Villejuif.

 

L’objectif essentiel des traitements dits « conservateurs » est de préserver la fertilité (ou la grossesse en cas de cancers diagnostiqués pendant la grossesse) sans pour autant augmenter la prise de risque carcinologique. La question se pose le plus souvent en cas de cancer de l’ovaire ou de cancer du col utérin. Trois aspects sont à envisager : traitement conservateur de l’utérus et en partie de l’ovaire, préservation des gamètes avant le traitement d’un cancer gynécologique, préservation de la grossesse in utero (concerne 1 grossesse sur 2000).  La loi du 6 août 2004, modifiée en 2011, concerne la préservation des gamètes ou des tissus germinaux avant tout traitement. Il y a donc un triple aspect à considérer: le risque oncologique, le souhait de la patiente/du couple, l’éthique. Quel que soit le site initial de la tumeur, la validation carcinologique de cette attitude nécessite plusieurs critères d’évaluation : une stadification clinique, radiologique et chirurgicale rigoureuse pour bien vérifier que la pathologie soit à un stade « réellement » initial ; une expertise anatomo-pathologique pour valider les critères histologiques qui vont être impactants sur le plan pronostique et enfin, une information éclairée de la patiente visant d’une part à vérifier ses objectifs pour ce traitement, d’autre part à expliquer les implications de cette stratégie (en cas de chirurgie conservatrice) lors de l’obtention éventuelle d’une grossesse. En pratique, les objectifs sont de créer un observatoire national et international en particulier pour les tumeurs de l’ovaire, d’établir des recommandations internationales pour homogénéiser la réponse en fonction des sites tumoraux les plus fréquents, enfin d’intégrer la  dimension de biologie moléculaire aux classifications actuelles. Il faut tenir compte également de l’évolution des technologies : avec l’impact de la radiothérapie, une irradiation pelvienne de plus de 30G induit une altération de la myocontractilité de l’utérus. Pour améliorer la réponse à la demande, il faut, dans l’immédiat, une relecture anatomo-pathologique centralisée, et, dans le futur, une identification des facteurs moléculaires pronostiques, c’est-à-dire capables de différencier les groupes en fonction du risque évolutif.