Autre
Séance du 30 octobre 2007

Joseph Babinski : une personnalité complexe

MOTS-CLÉS : histoire médecine. neurologie/histoire
Joseph Babinski : a complex personality
KEY-WORDS : history of medicine. neurology/history

Jacques Poirier

Résumé

La personnalité de Joseph Babinski (1857-1932), médecin des hôpitaux de Paris, neurologue célèbre pour la découverte du signe qui porte son nom, est complexe. C’est un beau géant aux yeux bleus, extrêmement silencieux. Ses deux parents ont fui la Pologne, leur patrie, après l’insurrection de 1848 et se sont réfugiés à Paris. Joseph et son frère aîné, nés à Paris, sont français. Joseph, méticuleux, hyperscrupuleux, perfectionniste est atteint de la « maladie du doute ». Il est raisonneur et redresseur de torts. Joseph et son frère, célibataires, forment un couple indissociable. Henri (1855-1931), ingénieur des Mines, chercheur d’or et de diamants, fin gastronome, auteur — sous le pseudonyme d’Ali-Bab — d’un ouvrage réputé de gastronomie, partage la vie de Joseph et s’occupe de tout. Babinski n’a pas d’engagement religieux, idéologique ou politique. Sa personnalité, notamment eu égard à sa vie privée, conserve une face cachée avec des zones d’ombre.

Summary

Joseph Babinski (1857-1932), a Paris hospital neurologist known for the discovery of his eponymous sign, was a highly complex personality. He was known as a handsome but silent ‘‘ blue-eyed giant ’’. His parents left Poland for Paris after the insurrection of 1848. Joseph and his elder brother Henri (1855-1931) were born in Paris and were therefore French, but they remained devoted to Poland. Joseph suffered from excruciating self-doubt and was meticulous. He was a reasoner and a righter of wrongs. Henri, who trained as a civil engineer at the French National School of Mines, prospected mineral, gold and diamond deposits in various countries. On his return to France at the end of the century, he wrote, under the pseudonym Ali-Bab, a monumental cookbook called ‘‘ Gastronomie pratique ’’, which was widely acclaimed. Joseph and Henri, both unmarried, lived together and formed an inseparable couple. Joseph Babinski had no religious, political or ideological commitments. Some areas of his private life still remain rather shadowy. Tirés-à-part : Professeur Jacques POIRIER, 7, rue Bargue, 75015 Paris. Article reçu le 20 mai 2007, accepté le 1er octobre 2007. Joseph Babinski (1857-1932), médecin des hôpitaux de Paris, membre de l’Académie de Médecine, Commandeur de la Légion d’honneur, est universellement connu pour ses travaux de sémiologie neurologique, notamment pour la découverte du signe qui porte son nom, et pour la création du pithiatisme destiné à prendre la place de l’hystérie. Sa personnalité est beaucoup moins bien connue et s’avère complexe.

Un physique exceptionnel qui reflète — au moins partiellement — sa personnalité

Comme pour tout un chacun, l’aspect extérieur, le physique, la voix, sont dans une certaine mesure le reflet de la personnalité. Au dire de ceux qui ont bien connu Joseph Babinski, ses amis Henri Vaquez [1] et Léon Daudet [2], ses élèves Albert Charpentier [3, 4], Auguste Tournay [5-8], Clovis Vincent [9], L. Rivet [10], René Moreau [11], André Plichet [12], Édouard Krebs [13], Victor Néri [14] et Egas Moniz [15] ainsi que d’autres comme Henri Baruk [16] ou Percival Bailey [17], son physique attire l’attention et ne laisse pas indifférent. Il est « beau à voir » [1], mesure près de deux mètres de haut, son air est majestueux, sa voix est caverneuse, son rire est clair, son regard « à la fois caressant et scrutateur » [1]. Il possède un charme slave inoubliable. Il n’est pas bavard, tant avec les étudiants, externes, internes et assistants qui l’entourent qu’avec ses malades auxquels il ne dit pas un mot en les examinant. C’est « un silencieux », comme son maître Charcot [10]. Bref, son charisme ne laisse place à aucun doute, et, comme l’exprime avec amour son élève Albert Charpentier, dans quelques vers « in memoriam », Joseph Babinski est un « géant blond à l’œil bleu, […] obstinément muet » [4].

Une personnalité qui se construit à partir d’une histoire familiale peu commune

Deux ans après son frère Henri, Joseph naît à Paris en 1857 d’un père Polonais, Aleksander Babinski (1823-1899), insurgé de la Révolution de 1848, ayant fuit Varsovie et la terreur qu’y font régner les Russes après l’insurrection polonaise [18], avec son épouse Henryeta Weren-Babinska (1819-1897), qui ne connaît pas le moindre mot de la langue du pays où ils arrivent, mais qui l’apprend pour l’enseigner à ses enfants et qui se dévoue sans compter pour donner à ses deux fils une éducation soigneuse. Henri et Joseph voueront toute leur vie un amour et une reconnaissance infinis à leur mère, « cette vaillante Polonaise, qui fut une épouse et une mère incomparable. » [19].

Aleksander trouve à Paris une situation confortable d’ingénieur géomètre à l’ Inspection des Carrières . Lorsque se déclenche l’insurrection polonaise de janvier 1863, il retourne en Pologne pour y participer. De retour à Paris, comme de nombreux Polonais réfugiés à Paris, il entre dans la Garde Nationale et prend part à la

Commune de Paris [20, 21]. Joseph Babinski garde un mauvais souvenir de la

Commune , qu’il a vécu à l’âge de 14 ans, et professe « une réelle antipathie envers

Thiers et la manière forte qu’il avait employée pour venir à bout des insurgés » [4].

 

En 1874, Aleksander part travailler comme ingénieur au Pérou. Cette situation lucrative lui permet d’envoyer à sa femme les subsides nécessaires à l’entretien et à l’éducation de leurs deux fils. Il y reste jusqu’en 1887 [22] et pendant ce séjour péruvien d’une douzaine d’années, au cours duquel se déroule la guerre du Pacifique opposant le Pérou et le Chili, il travaille pour la défense du Pérou, ce qui lui vaut de voir son buste figurer sur le monument érigé à Lima en hommage aux émigrés polonais. Fortement handicapé par une maladie de Parkinson, il meurt à Paris, en 1899.

Bien que nés à Paris et de nationalité française, Joseph et son frère restent toute leur vie très attachés à leurs racines polonaises [23]. De 1863 à 1870 [24], Joseph et Henri sont scolarisés à Paris à l’ École polonaise des Batignolles . Cette institution d’enseignement libre fondée par patriotisme pour les enfants des réfugiés polonais apporte aux enfants Babinski une bonne éducation morale, religieuse et patriotique, tant vis-à-vis de la Pologne que de la France, en tout cas de la France non-communarde.

Ils parlent, lisent et écrivent le polonais [25]. Ils orthographient leur nom avec un n’ accentué, lettre qui n’existe que dans l’alphabet polonais. Dans un courrier manuscrit, Joseph précise que son nom, souvent mal orthographié, se termine par un « i » et non par un « y » [26]. Il souhaite également que l’on prononce son nom à la polonaise, c’est-à-dire le « in » prononcé comme dans « cognac » [27]. Leur patriotisme exacerbé s’applique à leurs deux pays : il se savent français par le sol et polonais par le sang : Joseph fait son service militaire, est décoré de la Légion d’honneur, et bien qu’âgé de cinquante-sept ans au début de la Grande Guerre, il prend, en plus de son service de la Pitié, la charge des expertises neurologiques au Lycée Buffon transformé en Hôpital militaire ; il est fier du courage manifesté sur les champs de bataille par son élève Clovis Vincent et se réjouit de le voir décoré [7] ;

après la victoire, il est ému à la perspective d’aller regarder défiler sur les ChampsElysées la cavalerie polonaise [11] et les deux frères expriment leur joie de voir leur patrie polonaise enfin reconstituée [28]. Babinski rédige des articles médicaux pour des revues polonaises, entretient des liens étroits avec les universités et sociétés savantes polonaises. Il ne manque pas une occasion de manifester son attachement à la Pologne ; il fait corriger sa notice dans le dictionnaire Larousse en dix tomes, afin qu’après « médecin français » soit précisé « d’origine polonaise » [29].

Joseph Babinski fréquente de nombreux Polonais, notamment son fidèle collaborateur bénévole Jean Jarkowski (1880-1929) [30], avec qui il publie de nombreuses communications, ou encore Édouard Pozerski de Pomiane (1875-1964), docteur ès sciences, directeur de laboratoire à l’Institut Pasteur de Paris [31], gastronomeécrivain, dont Henri préface — en tant qu’Ali-Bab — le premier [32] des nombreux livres de gastronomie qu’il écrira.

Comment ne pas voir le rôle que ces événements familiaux sortant de l’ordinaire ont dû jouer dans le développement de la personnalité de Joseph Babinski ? Un père absent (au Pérou de 1874 à 1887) mais à l’image forte de révolutionnaire héroïque, une mère admirable, adulée et hyperprotectrice, un grand frère sur la présence duquel tout finit par reposer lorsque, revenu de ses explorations lointaines, il reprend en main, et de main de maître, la gouvernance de la maison et de la vie de la famille en 1899, à la mort du père, deux ans après celle de leur mère.

La « maladie du doute »

Tous ceux qui ont connu Joseph Babinski attirent l’attention sur sa maladie du doute .

Albert Charpentier note que « sentimental de nature, teinté de mysticisme, en proie à la maladie du doute dans la forme éminente que connaissent presque tous les constructeurs, [il] offrait cette psychologie composite et raffinée d’un être d’amour que la vie, souvent cruelle, fait souffrir dans le don de soi-même et d’un être doux, inquiet, que la certitude d’être aimé peut illuminer un instant sans jamais le combler. » [4]. Pour Babinski, comme pour tant d’autres de ses contemporains médecins, le travail est une drogue. Sa vie quotidienne [1, 9] est principalement faite de travail. Le matin, travail à l’hôpital. L’après-midi, travail auprès des patients de sa clientèle de ville. Le soir, travail à la maison pour les publications, ou plus rarement détente à l’Opéra. Hyperscrupuleux, perfectionniste, sourcilleux, exigeant, minutieux, méticuleux, consciencieux à l’excès, Babinski, sujet à de permanentes compulsions de vérification, remet son ouvrage cent fois sur le métier, inlassablement, qu’il s’agisse de l’examen du malade, de la recherche d’un seul et même signe, ou de la rédaction d’une communication. « Je n’insisterai pas sur la difficulté qu’il avait à écrire ses communications. Elle provenait de cette maladie du doute qui est l’apanage des grands cerveaux et de son désir artistique de perfection. » [1]. Il hésite, recommence, retouche, vérifie, contrôle avec un soin extrême, rature, corrige, recherche sans fin le mot exact en ayant toujours le dictionnaire de Littré à portée de main ;

tout est toujours remis en chantier ; il peut rester des heures sur un même malade sans prononcer un mot. Il appréhende de prendre la parole, il parle lentement, de façon un peu hachée, signe lui-même, après l’avoir longuement relue et éventuellement retouchée, la banale ordonnance qu’il vient de dicter à son externe, retélé- phone le soir au confrère qui l’a appelé en consultation afin de préciser quelques détails de la symptomatologie du malade ou de vérifier une fois de plus l’ordonnance qu’il a rédigée. « Il eut toujours la phobie de la posologie, ce qui l’amenait à vérifier constamment ses prescriptions sur des formulaires. » [10]. On pourrait aussi pointer chez lui une certaine nosophobie : il avait horreur d’examiner des parkinsoniens [10] ; son père avait eu une maladie de Parkinson et Babinski redoutait d’en être également frappé, ce qui, malheureusement, arriva. Voyant le bon côté des choses, Vaquez précise que s’il est perpétuellement en proie au doute, ce n’est pas « au doute destructif qui aboutit au scepticisme et à la négation, mais au doute constructif » [1].

Casanier comme les grands phobiques, il ne serait volontiers jamais sorti de Paris, prétendant qu’il a toujours été heureux sans jamais dépasser la porte de Bagnolet [33]. À la belle saison, il prend des vacances, d’abord sans quitter la France, puis, plus tard, entraîné par son ami Vaquez [10] il se laisse emmener, toujours flanqué de son frère, dans des voyages plus lointains, en Europe et même dans certains pays d’Amérique [1]. C’était, au dire de Vaquez, « un charmant compagnon de voyage, peu bavard, mais acceptant sans discuter toutes les propositions d’excursions, pourvu qu’il n’eût pas à y prendre d’initiative. » [10].

Babinski avale ses repas à une vitesse extraordinaire, tachyphagie qui a vivement impressionné son parent Léon Babinski qui dit n’avoir jamais vu un homme capable de consommer ses repas aussi vite que Babinski et qui ajoute que c’était réellement quelque chose de phénoménal [27, 29].

Babinski a créé une bonne dizaine de néologismes [34] dont la plupart sont passés dans le langage médical courant : anosognosie , anosodiaphorie , asynergie cérébelleuse , diadococinésie , catalepsie cérébelleuse , équilibrations volitionnelles , hypermé- tri e, pithiatisme , thermo-asymétri e, pseudo-tabes spondylosique , phénomènes physiopathiques . Faut-il voir là encore une manifestation de sa volonté méticuleuse de définir et d’assigner, par la création d’un mot nouveau et spécifique, une place précise, exacte et définitive à chaque phénomène décrit par lui ?

L’incorrigible raisonneur et redresseur de torts

Dans le domaine scientifique et médical, Babinski est péremptoire, sentencieux, redresseur de torts, vindicatif, ergoteur, raisonneur, pontifiant, revendicateur de ses priorités. Les exemples abondent de ses interventions assassines lors des séances de la Société de Neurologie . Tout le monde en prend pour son grade. Henri Baruk en fait la triste expérience à la suite de la présentation d’une malade d’Henri Claude, lors d’une séance homérique de la Société Médicale des hôpitaux [16]. À la fin de la communication de M. Noïca, Babinski intervient : « M. Noïca déclare que, dans son étude sur la contracture en flexion il est arrivé aux mêmes conclusions que moi, ce qui revient à dire que j’aurais simplement confirmé les résultats de ses recherches.

Notre excellent collègue est manifestement dans l’erreur, car nos conclusions n’ont rien de commun, ainsi qu’on peut aisément s’en convaincre en les rapprochant les unes des autres. » [35]. Il fait des remontrances à Van Gehuchten, neurologue belge, professeur à l’Université de Louvain [36] et au professeur Oppenheim, célèbre neurologue berlinois [37]. Shaltenbrand rapporte qu’ayant dit à Babinski que le cas qu’il lui présentait était un cas de « pseudosclérose », Babinski répliqua : « Un neurologue qui pose le diagnostic de pseudosclérose, n’est pas un neurologue mais un pseudoneurologue. » Shaltenbrand suppose que « cette sévérité et cette exactitude constituaient un trait essentiel de son caractère et que c’étaient ces mêmes traits qui lui permirent ses découvertes immortelles. […] Dans tous ses travaux, on retrouve cette méfiance extrême vis-à-vis de soi-même, mais aussi vis-à-vis des autres. Ceci est peut-être la raison pour laquelle son intérêt pour le travail des autres diminuait. Mais que voulez-vous : tel est l’homme. Chez les immortels aussi on trouve des imperfections. Babinski appartient sans doute aux immortels » [38]. On pourrait multiplier les exemples à satiété. Le ton reste toujours poli et courtois, mais le fond est sans concession, ce qui lui vaut parfois des remarques aigres-douces, comme celle de Raymond : « On peut être courtois, très courtois même, à propos des travaux d’un collègue, sans pour cela adopter ses idées, ses options en matière d’hystérie ; c’est mon cas dans le débat actuel » [39].

Malgré cette rigidité mentale, Babinski n’est pas dépourvu d’humour, certes d’un goût pas toujours très sûr, et peut avoir le rire facile [10]. Les anecdotes à ce sujet ne manquent pas. Charpentier raconte qu’il « riait de ce bon rire enfantin que l’on entendait jusqu’au bout du corridor, lorsque, pardessus enfilé, chapeau sur la tête, debout à l’entrée de son cabinet il venait de raconter une histoire juive ou de décrire un dessin de Forain » [3].

Le couple fraternel indissociable : Joseph et Henri

Joseph et son frère Henri forment un couple indissociable, fusionnel, un couple thérapeutique pour Joseph ? Il est impossible de parler de l’un sans faire référence à l’autre.

Dès sa sortie de l’ École des mines de Paris , en 1880, Henri entame une carrière d’ ingénieur missionnaire [18, 25] et devient prospecteur de filons aurifères et/ou de mines de diamant notamment en Guyane française, en Patagonie, dans le Far-West, en Italie du Nord et au Brésil. Dès les dernières années du XIXe siècle, après plus de vingt ans de missions difficiles, Henri Babinski, dispose d’un capital qui lui assure une bonne aisance financière lui permettant d’entrevoir une paisible retraite [29] et, en 1907, il publie sous le pseudonyme d’Ali-Bab, Gastronomie pratique [40], ouvrage qui obtient un succès considérable et bénéficie de nombreuses éditions et rééditions [2].

Les deux frères vivent ensemble [29]. Henri, de deux ans son aîné, est tout dévoué à son frère, qu’il adore « à l’égal d’un Dieu » [4]. Il tient le ménage, gère la table, sert de secrétaire à son frère, tape à la machine travaux et ordonnances, rédige la correspondance, donne son avis sur la valeur exacte des mots [4], assiste à ses leçons [10], s’occupe des finances [27], bref de tous les soucis matériels dont Joseph — dit-on — eût été bien incapable de s’occuper. Il va même jusqu’à se substituer à Joseph « pour répondre à des lettres enflammées reçues par ce dernier et lui éviter des aventures. » [10]. Henri est pour Joseph la présence protectrice familière sans laquelle il n’aurait pu vivre et travailler : « Son frère et lui eurent l’un pour l’autre un véritable culte qui ne se relâcha jamais. Joseph vécut pour sa carrière et pour la science ; Henri Babinski vécut pour Joseph. Sans Henri Babinski, peut-être Joseph eût moins fait » [9]. D’ailleurs, le désarroi et la déchéance progressive de Joseph, après la mort d’Henri, confirment cette réalité : « son œuvre étant terminée, son frère étant mort, il désirait mourir à son tour » [10].

L’absence d’engagement politique ou religieux

Sous la Troisième République, nombreux sont les médecins qui participent à la vie publique et politique en devenant maires, députés, sénateurs, ministres ou conseillers de ministres. À l’instar de Charcot, Babinski ne s’implique pas dans les affaires publiques, ne brigue aucun mandat électoral et ne milite dans aucune organisation idéologique ou politique. Il n’en demeure pas moins républicain et démocrate, rêvant « d’un gouvernement républicain juste et fort où la valeur morale des élites dirigerait et corrigerait l’impulsivité des masses » [29]. Babinski occupe ainsi une position moraliste traditionnelle que l’on peut percevoir dans la lettre teintée de pessimisme qu’il adresse à son disciple Egas Moniz en juin 1918 : « dans les circonstances présentes, au milieu de tant d’événements tragiques, il est permis de se demander si la Science mérite d’être l’objet d’un culte. Les plus admirables créations de l’esprit humain ont eu, contre toute attente, pour effet principal, la destruction et le massacre ; avec un peu de pessimisme, on peut maudire le savoir et craindre qu’un jour quelque découverte aît pour conséquence l’anéantissement de l’humanité. J’espère cependant que les puissances du Bien finiront par l’emporter sur celles du Mal et que le travail, secondé par la Charité, parviendra à tarir les sources de larmes trop abondantes aujourd’hui. […] » [15]. On retrouve là le leitmotiv de toute la production scientifique babinskienne : séparer l’hystérie de l’organique, le Vrai du Faux, le Bien du Mal.

Aucun document relatif à l’affaire Dreyfus ne mentionne le nom de Babinski [41].

Certes Léon Daudet, antidreyfusard, est son ami, certes il apprécie les caricatures de Jean-Louis Forain, férocement antidreyfusard et antisémite, certes chaque année les deux frères payent leur cotisation à l’ Action Française [28], mais in fine rien ne permet de savoir si Babinski est ou non antisémite et antidreyfusard.

Bien qu’empreint d’un certain mysticisme, Babinski n’est pas religieux. Avant d’être inhumé dans le caveau familial du Cimetière polonais des Champeaux à Montmorency, il eut toutefois, comme son frère un an plus tôt, des obsèques religieuses [10].

Les faces cachées d’une personnalité secrète

Derrière une vie professionnelle et sociale apparemment transparente, Babinski recèle une personnalité secrète, voire mystérieuse, tissée de préoccupations intimes.

Ce ne sont pas ses goûts artistitiques et littéraires qui ont quoi que ce soit de mystérieux : ce sont ceux de la bourgeoisie aisée de la Plaine Monceau. Babinski se plait à l’Opéra de Paris [6] dont il est l’un des médecins [42]. Il semble [10] qu’autant sinon plus que la musique et le chant, il apprécie surtout le corps de ballet, qui le lui rend bien [29]. Il admire Chopin, mais ses préférences vont à la musique lyrique et aux grandes voix, comme celle du célèbre ténor Caruso. Il est également sensible à la poésie, à la littérature, à la peinture et à la sculpture. Il lit Renan et Anatole France, et affectionne particulièrement Victor Hugo dont il connait par cœur l’ Ode à la Colonne , Mazepp a et Hernani presque en entier. Son attirance pour le ‘‘ nu ’’ n’est pas que professionnelle, et, lorsqu’il ne sort pas tard de l’hôpital, il fait volontiers un tour au Musée du Louvre , où il apprécie particulièrement la Source d’Ingres, les nus du

Corrège , la Vénus de Milo et un tableau de Lesueur où est représentée une vierge « qui — disait-il — réalisait le type de la belle Polonaise » [3].

Outre son idée-fixe de débusquer sans cesse l’hystérie ou la simulation derrière toute manifestation pathologique, Babinski est fasciné par les phénomènes de télépathie et de médiumnité. En 1912, il se rend à Naples, avec son frère et Albert Charpentier, pour « passer au crible d’une expérimentation serrée » la célèbre médium Eusapia Palladino (1854-1918) [43]. La fraude est découverte et Babinski entre dans une terrible colère [3] !

Les informations sur la vie sentimentale de Babinski sont rares. Ses élèves et amis [10, 3, 4] font état de l’adoption par Joseph Babinski de trois orphelines sans fortune, filles de son meilleur ami, et pour l’entretien desquelles il aurait renoncé à fonder une famille. Léon Babinski, plus crédible en l’occurrence, avance une autre version des faits et parle des trois filles hors mariage de Joseph : « La mère des enfants était Norvégienne d’origine ; elle habitait avec ses trois filles tout près de Paris. » [29]. Il ajoute [27] que, sans jamais leur avoir donné son nom, Babinski jouait auprès d’elles son rôle de père. Albert Charpentier relate [3] que Babinski sut inspirer la passion :

« Je sais une femme d’essence supérieure, une grande artiste qui, loin de lui, rendit le dernier souffle en tenant son image. » Est-ce la mère de ses filles ? En fin de compte, les propos d’Auguste Tournay tendraient plutôt à conforter la version de Léon Babinski : « De la vie privée de Joseph Babinski une partie appartient à lui seul, qui n’était pas homme à confidences ; et ceux qui de cette partie ont parlé sont peut-être ceux qui l’ont moins connue. Ne suivons donc son comportement que là où l’aspect n’en était pas secret, chez lui comme au dehors » [5].

Les Détraquées, pièce en deux actes signée Olaf et Palau [44] est représentée pour la première fois au Théâtre des

Deux-Masques le 15 février 1921. Le drame se passe dans un pensionnat privé de jeunes filles. En fin d’année, la directrice, Madame de Challens, convoque régulièrement Mademoiselle Solange, professeur de danse, et toutes deux, manifestement lesbiennes, et partageant les mêmes goûts pervers, font subir à une jeune élève les pires sévices, qui se terminent par la mort de la malheureuse. Fasciné par la pathologie mentale, qu’il a découvert comme médecin pendant la Grande Guerre, et attiré par la violence des attaques publiées dans la presse contre Les Détraquées , André Breton va voir la pièce. Il dit éprouver la grande émotion théâtrale de sa vie et il en parle longuement, en 1928, dans

Nadja [45]. Pierre Palau (1885-1966) est un acteur et un auteur dramatique, mais qui est Olaf ? André Breton révèle en 1956 [46] que derrière le pseudonyme d’Olaf se cache le docteur Babinski, pour lequel il nourrit une grande admiration depuis qu’il a fait fonction d’externe dans son service en 1917 [47]. En effet, pour mener à bien son projet, Palau a besoin d’un médecin spécialisé dans les affections nerveuses et Babinski accepte de collaborer. On remarquera qu’Olaf, prénom norvégien, est celui de plusieurs rois de Norvège et que Olaf Kyrre, qui règne de 1068 à 1093, correspond assez bien au portrait de Babinski : grand, beau, blond, avec des yeux magnifiques, et habituellement silencieux. N’est-ce pas un clin d’œil vers l’origine norvégienne de la mère de ses filles ?

 

Enfin, trois questions au moins restent sans réponse dans l’ombre de la face cachée de la personnalité de Joseph Babinski [48] : — Pourquoi, après sa rencontre avec Charcot en 1885, abandonne-t-il brutalement et définitivement l’anatomie pathologique et l’histologie qui avaient été jusque là son activité prédominante, au bénéfice du seul objectif de démembrer l’hystérie et de la différencier des troubles organiques ? — Pourquoi, après son échec au premier concours d’agrégation de 1892, ne se représente-t-il plus jamais, alors que pour être nommé médecin des hôpitaux il a présenté cinq fois le concours ? — Pourquoi, à l’exception de ses élèves, aucun de ses amis proches n’est neurologue ?

Pour conclure, disons que Joseph Babinski, ce beau géant aux yeux bleus, n’est ni un génie, ni un dieu, mais un grand clinicien, un grand consultant, un grand Français et un grand Polonais, et finalement pourquoi ne lui reconnaîtrait-on pas le droit d’être — pour l’éternité — avec ses grandeurs et ses faiblesses, ses qualités et ses défauts, ses pans de lumière et ses zones d’ombre, ses bonheurs et ses malheurs intimes, un homme « tout un homme, fait de tous les hommes et qui les vaut tous et que vaut n’importe qui » [49].

REMERCIEMENTS

Je tiens à remercier Véronique Leroux-Hugon, conservateur de la

Bibliothèque Charcot à la Salpêtrière ; Kazimierz Molenda, président de l’ Amicale des Anciens Etudiants de l’Ecole Polonaise à Paris ; le docteur Pierre Konopka, président de l’ Association des

Médecins d’origine polonaise de France ; Marie-Noëlle Maisonneuve, conservateur de la

Bibliothèque de l’Ecole des Mines de Paris ; Agnès Gomez, archiviste à l’ Evêché de

Pontoise ; Stephane Kraxner, chef du service des Archives de l’Institut Pasteur à Paris ;

Annick Perrot, conservateur du

Musée Pasteu r à Paris ; Evelyne Maury, conservateur des

Archives du Collège de France ; Madame le docteur Diana Rivas et Mariella Aleman, pour les photographies du ‘‘ Monument Habich ’’ de Lima ; Lucyna Haaso-Basta et Malgorzata Paluch, pour les traductions françaises des textes en polonais ; Jean-Paul Poirier, de l’ Académie des Sciences , pour les traductions françaises de textes en allemand, en portugais, en suédois et en lithuanien ; ainsi que tout le personnel de la

Bibliothèque Nationale de France, des Archives nationales , des Archives de l’Académie des sciences , de l’Académie nationale de médecine , de l’ Assistance publique-Hôpitaux de Paris et de l’Opéra de Paris .

 

BIBLIOGRAPHIE [1] VAQUEZ H. — Joseph Babinski (1857-1932),

Bull. Acad. Méd., 1932, 35 , 1264-1273.

[2] DAUDET L. —

Les œuvres dans les hommes , Paris, Nouvelle Librairie Nationale, 1922.

[3] CHARPENTIER A. —

Un grand médecin. J. Babinski (1857-1932) , Paris, La Typographie François

Bernouard, 1934.

[4] CHARPENTIER A. — Babinski (Joseph) (1857-1932). In Dr M. Genty, « Les biographies médica- les » , T. VI, Paris, Librairie J.B. Baillière et fils, 1937-1939, p.17-32.

[5] TOURNAY A. — Joseph Babinski (1857-1932),

Médecine de France , 1953, 43 , 3-10.

[6] TOURNAY A. — Babinski dans la vie,

Presse Méd , 1958, 66 , 1485-1489.

[7] TOURNAY A. —

La vie de Joseph Babinski , Amsterdam-London-New York, Elsevier Publishing

Company, 1967.

[8] TOURNAY A. — Allocution du Président sortant, Rev Neurol (Paris) , 1941, 73 , 24-26.

[9] VINCENT C. — J. Babinski (1857-1932),

Rev. Neurol. (Paris), 1932, 2 , 441-446.

[10] RIVET L. — Joseph Babinski (1857-1932),

Bull. et Mém. Soc. Méd. Hôp. Paris , 1932, 34 , 1722-1733.

[11] MOREAU R. — Hommage à la mémoire de Joseph Babinski à l’occasion du 100è anniversaire de sa naissance, Bull. et Mém. Soc. Méd. Hôp. Paris , 1958, 74 , 449-457.

[12] PLICHET A. — Babinski (1857-1932). In

Dumesnil R. et Bonnet-Roy F. (sous la direction de), Les médecins célèbres , Genève, Editions d’Art lucien Mazenod, 1947, p. 250-251.

[13] KREBS E. — Nécrologie J. Babinski 1857-1932,

L’Encéphale , 1933, 28 , 72-80.

[14] NÉRI V. — Adresses des différentes Sociétés de Neurologie (Italie), centenaire de la naissance de J. Babinski, Rev. Neurol. (Paris) , 1958, 98 , 654.

[15] MONIZ E. — Dr. Joseph Babinski (

Lisboa Médica , 1932, 9 , 1065), Lisboa, Impensa Libanio Da

Silva, 1932 (26 pages).

[16] BARUK H. — Des hommes comme nous , Paris, Robert Laffont, 1976.

[17] BAILEY P. — Joseph Babinski (1857-1932), The man and his works,

World Neurology , 1961, 2 , 134-140.

[18] BRATROWSKI S. — Inzynierowie Babinscy, Kwartalnik Historii Nauki I Techniki , 1975, 20 , 295-311.

[19] Bulletin Polonais, littéraire, scientifique et artistique , 1898, 114 , 31.

[20] GROSSBART J. —

Dictionnaire des Polonais ayant participé à la Commune de Paris (Archives

Nationales, carton AB/XIX/3779 dossier 4, dactylographié).

[21] DE BELINA — Les polonais et la Commune de Paris, Paris, Librairie générale, 1871.

[22] Kurier Polski w Paryzu, 1887, 80 , 4, cité par BRATROWSKI S. Inzynierowie Babinscy, Kwartalnik

Historii Nauki I Techniki , 1975, Rok XX, 2, 295-311.

[23] ANDREZEJ P. GASECKI, KWIECINSKI H. — On the legagy of Joseph Babinski,

Eur. Neurol. 1995, 35, 127-130.

[24] Liste générale des anciens élèves de l’École Polonaise , Paris, Imprimerie polyglotte A. Rueff-

Heymann, 1908 (aimablement communiquée par le Dr Pierre Konopka).

[25] REY A. — Nécrologie d’Henri Babinski, Bulletin de l’Association des Anciens élèves de l’École des mines de Paris , 1931 [http : //www.annales.org/archives/x/babinsky.html].

[26] Archives nationales, dossier de légion d’honneur de Joseph Babinski, L0085063.

[27] GAZECKI A.P., HACHINSKI W. — On the names of Babinski, Can. J. Neurol. Sci. 1996, 23, 76-79.

[28] DAUDET L. — Babinsky (sic),

Action française , 30 octobre 1932.

[29] BABINSKI L. — Sylwetka Jozefa Babinskiego na tle jego zycia codziennego,

Neurol. Neurochir.

 

Pol. 1969, 3 , 543-546.

[30] CROUZON O. — Jean Jarkowski (1880-1929),

La Presse médicale , 1930, 14 , 246.

[31] POZERSKI DE POMIANE E. —

Souvenirs d’un demi-siècle à l’Institut Pasteur , fascicule dactylographié, 73 pages, s.l.n.d., p.56 (Archives de l’Institut Pasteur).

[32] POMIANE E de. — Bien manger pour bien vivre. Essai de gastronomie théorique , Paris, Albin

Michel, 1922.

[33] KHALIL R. — Vie et œuvre de Babinski. In

Conférences lyonnaises d’Histoire de la Neurologie et de la Psychiatrie , Lyon, Documentation médicale Oberval, 1982, p. 255-280.

[34] BABINSKI J. —

Œuvre scientifique : recueil des principaux travaux , publié par les soins de J.A.

Barré, J. Chaillous, A. Charpentier, O. Crouzon, L. Delherm, J. Froment, et al. , Paris, Masson et Cie, 1934.

[35] NOÏCA — A propos de l’article de M. Babinski « Paralysie spasmodique organique avec contracture en flexion et contractions involontaires », Rev. Neurol. (Paris) , 1911, 13 , 173-178.

[36] VAN GEHUCHTEN A. — A propos du phénomène des orteils,

J. Neurol . , 1898, 3 , 284-286.

[37] BABINSKI J. — A propos du Procès-verbal de la séance du 9 novembre 1905 de la

Société de

Neurologie de Paris , au sujet de la communication de M. Babinski sur l’ Hyperexcitabilité électrique du nerf facial dans la paralysie faciale , Rev. Neurol. (Paris) , 1906, 14 , 79.

[38] SCHALTENBRAND G. — Adresses des différentes Sociétés de Neurologie (Allemagne), centenaire de la naissance de J. Babinski, Rev Neurol (Paris) , 1958, 98 , 640-668.

[39] BABINSKI J. — A propos du Procès-verbal « Sur la fièvre et les troubles trophiques attribués à l’hystérie », Rev. Neurol. (Paris) , 1909, 18 , 207-209.

[40] ALI-BAB —

Gastronomie pratique. Etudes culinaires suivies du traitement de l’obésité des gour- mands . Paris, Ernest Flammarion, 1907.

[41] BREDIN J.-D. —

L’Affaire , Paris, Julliard, 1983.

[42] Archives de l’Opéra (OPERA. ARCH. 20/381 : Service médical, 1912).

[43] BLONDEL C. — Eusapia Palladino : la méthode expérimentale et la « diva des savants ». In Bensaude-Vincent B, Blondel C. Des savants face à l’occulte, 1870-1940 , Paris, Éditions La

Découverte, 2002, p. 143-171.

[44] OLAF, PALAU — Les détraquées. In Le Grand Guignol, le théâtre des peurs de la Belle Époque , (Préface et notices par Agnès Pierron, Paris, Robert Laffont), 1995, p. 808-839.

[45] BRETON A. — Nadja, Paris, Gallimard, 1928.

[46] BRETON A (sous le direction de). —

Le Surréalisme même , no 1 (Octobre), Paris, Pauvert, 1956.

[47] BRETON A. —

Manifeste du surréalisme , Paris, Aux éditions du sagittaire, 1924.

[48] PHILIPPON J., POIRIER J., avec la collaboration de C. Derouesné et P. Ricou. —

Joseph Babinski revisited , in press, New York, Oxford University Press.

[49] SARTRE J.-P. —

Les mots , Paris, Gallimard, Collection Folio, 1964.

 

DISCUSSION

M. Claude DREUX

Le père de Joseph Babinski a-t-il fréquenté le peintre Gustave Courbet très engagé dans la Commune ? Joseph Babinski était-il, lui-même, engagé politiquement ?

Les documents d’archives que j’ai pu consulter ne mentionnent aucune relation entre le père de Joseph Babinski et Gustave Courbet. Les opinions politiques de Joseph Babinski sont celles d’un républicain, d’un démocrate, absolument pas d’un révolutionnaire ; il n’a brigué aucun mandat électoral, il ne s’est en rien manifesté pendant l’affaire Dreyfus ; on sait toutefois que les deux frères Babinski, Henri et Joseph, étaient amis de Léon Daudet et payaient tous les ans leur cotisation à l’ Action Française.

 

M. Jean-Jacques HAUW

L’anecdote, selon laquelle Babinski au détour d’une consultation qu’il avait donnée à Lima, au Pérou, était entré, par jeu, dans une armure de conquistador d’où il n’avait pu sortir aisément, est-elle authentique ?

J’ai trouvé trace de cette anecdote dans une coupure de presse du

Progrès médical du 30 août 1930 conservée dans le dossier « Babinski » des archives de l’Académie nationale de médecine. L’affaire se serait toutefois passée en France et non au Pérou, dans un château où Babinski avait été appelé en consultation avec ses amis Widal et Sicard ; Babinski se serait contenté de mettre le casque qu’ensuite il n’arrivait plus à enlever.

M. Pierre PICHOT

L’échec de Babinski à l’agrégation a été utilisé, pendant des années, pour affirmer la supériorité des titres hospitaliers sur les titres universitaires dans la médecine parisienne. La situation ne s’est modifiée qu’après la dernière guerre, lorsque les médecins des hôpitaux de Paris ont demandé et obtenu le titre de professeur.

Cette remarque est parfaitement pertinente. Toutefois, le préjudice de ne pas être agrégé était important pour un médecin des hôpitaux, car il ne pouvait avoir de chef de clinique et surtout il ne pouvait postuler à une chaire, et, dans le cas particulier de Babinski, le fait de ne pas pouvoir occuper la prestigieuse Chaire de Charcot n’était certainement pas anodin.

 

Bull. Acad. Natle Méd., 2007, 191, no 7, 1343-1354, séance du 30 octobre 2007