Communication scientifique
Séance du 8 décembre 2009

Comment prendre en compte le risque génétique de cancer du sein ? Gènes impliqués et risques tumoraux associés

MOTS-CLÉS : gène brca1. gène brca2. gènes tp53. génome humain.. pten
Implications of genetic risk factors in breast cancer : culprit genes and associated malignancies
KEY-WORDS : genes tp53. genes, brca1. genes, brca2. pten.

Dominique Stoppa-Lyonnet * et coll. **, Bruno Buecher, Marion Gauthier-Villars, Claude Houdayer, Antoine de Pauw, Anne de la Rochefordière, Pascale This, Bernard Asselain, Nadine Andrieu

Résumé

La compréhension des formes familiales de cancer du sein a connu des avancées formidables au cours de ces quinze dernières années grâce aux études d’études d’épidémiologie, au développement de la génétique moléculaire et à la génération d’un grand nombre de marqueurs génétiques, cartographiés sur le génome. Ces études ont reposé et reposent sur la participation de femmes ayant été atteintes d’un cancer du sein, s’inscrivant ou non dans une histoire familiale. Les prédispositions génétiques au cancer du sein se déclinent selon leur mode de transmission : mendélien, dominant avec un risque tumoral élevé (mutations des gènes BRCA1, BRCA2, TP53, PTEN, STK11) ; dominant mais associé à un risque tumoral modéré (ATM, BRIP1, PALB2, ….) ; multigéniques et liées à des variants alléliques fréquents dans la population, i.e. des polymorphismes siégeant dans les gènes FGFR2, TNRC9, MAP3K1, LSP1 ou dans des régions intergéniques. D’autres situations de prédisposition restent à identifier puisque seulement 20 % des formes familiales de cancer du sein, qui font l’objet d’un test génétique aujourd’hui, sont expliquées par la transmission d’une mutation associée à un risque élevé de cancer du sein (BRCA1, BRCA2, TP53, PTEN, STK11). Seules les études des derniers gènes cités sont entrées dans la pratique médicale et conduisent à une prise en charge spécifique. La définition de risques individuels plus précis devrait bénéficier de la poursuite des études des variants polymorphes et de la prise en compte des facteurs de risques non génétiques (antécédents gynécologiques et obstétriques, expositions aux mutagènes, …).

Summary

Our understanding of hereditary forms of breast cancer has made enormous advances over the past 15 years, based on epidemiological and molecular genetic studies, and the development of a vast number of informative genetic markers. These studies have involved women with both familial and sporadic forms of breast cancer. Genetic susceptibility to breast cancer can involve several modes of inheritance: Mendelian inheritance, mostly involving autosomal dominant mutations with high penetrance and a high risk of malignancy (the BRCA1, BRCA2, TP53, PTEN, and STK11 genes) ; dominant mutations associated with a lower risk (ATM, BRIP1, PALB2, etc.), and multigenic patterns involving common susceptibility variants, i.e. polymorphisms located within predisposing gene loci (FGFR2, TNRC9, MAP3K1, LSP1, etc.) or intergenic regions. Other predisposing factors remain to be discovered, as genetic factors associated with a high breast cancer risk (BRCA1, BRCA2, TP53, PTEN, STK11, etc.) are only found in about 20 % of genetically screened breast cancer families. So far, only the first class of genes have found clinical applications, guiding the choice of medical or surgical treatment. More refined individual risk profiles will benefit from genome-wide polymorphic DNA variant studies and a better understanding of the impact of non genetic factors, such as the obstetrical and gynaecological history, and mutagen exposure.

INTRODUCTION

L’identification des gènes

BRCA1 et BRCA2 (BReast CAncer) a été une avancée majeure en 1994 et 1995 dans la compréhension des formes familiales de cancer du sein. Le passage relativement rapide dans la pratique médicale des tests génétiques fondés sur la recherche de mutation des gènes BRCA1 et BRCA2 est lié au fait que le mode de transmission est simple : mendélien et dominant, et que le risque tumoral associé est élevé. En d’autres termes, l’identification d’une mutation BRCA1 ou

BRCA2 conduit à des propositions de prise en charge très différentes de celles proposées aux femmes de la population générale. Les gènes

BRCA1 et BRCA2 ne résument cependant pas l’ensemble des prédispositions génétiques aux cancers du sein. En effet, une mutation BRCA1/2 est identifiée dans seulement 14 % des cas étudiés (https://www.e-cancer.fr). On abordera dans cette revue les prédispositions associées à une présentation particulière : syndrome de Li et Fraumeni, maladie de Cowden, maladie de Peutz-Jeghers et mutations du gène de la E-cadherine. Dans ces situations, le risque de cancer du sein n’est pas le seul élément au devant du tableau clinique. On abordera aussi le rôle de mutations rares de gènes impliqués dans des voies de signalisation cellulaire communes à celles de BRCA1 ou BRCA2 : ATM ,

CHEK2 , PALB2 et BRIP1 , mais dont les risques tumoraux associés sont relativement faibles et pour lesquelles aucune prise en charge spécifique n’est aujourd’hui définie. Enfin, on verra les variants génétiques fréquents dans la population générale identifiés par des études d’association génome-entier et associés à des risques très faibles mais dont la combinaison pourrait conduire à terme à identifier des risques individuels élevés. Là encore, il n’y a pas à l’heure actuelle d’application de ces découvertes. Mais, elles pourraient apparaître dans un futur proche.

GÈNES DE PRÉDISPOSITION AUX CANCERS DU SEIN OBÉISSANT À UN MODÈLE MENDELIEN AVEC UNE PÉNÉTRANCE ÉLEVÉE ET EN DEHORS D’UNE FORME SYNDROMIQUE : GÈNES BRCA1 ET BRCA2

Localisation et identification des gènes

BRCA1 et BRCA2

Les études d’épidémiologie génétique, ou études de ségrégation ont pour objectif d’examiner si la répartition familiale des cas d’une maladie donnée peut être expliquée par la transmission d’un facteur génétique et de déterminer, le cas échéant, son mode de transmission. L’étude de ségrégation de la CASH-study (Cancer and Steroid Hormone) a estimé que 5 % des cas de cancer du sein sont liés à la présence d’un facteur génétique transmis selon le mode autosomique dominant (c’est-à-dire transmis par l’un des deux parents, que celui-ci soit la mère ou le père), et associé à un risque cumulé de cancer du sein à l’âge de 70 ans de 67 %, soit un risque multiplié par dix par rapport à celui de la population générale (tableau 1) [1].

Tableau 1. — Risques de cancer du sein estimés par différentes études.

Étude de

BRCA1

BRCA2

BRCA1

BRCA2 ségrégation

Familles

Familles

Méta-analyse Méta-analyse [1]

BCLC

BCLC études de études de [54] [10] population population [14] [14] risque cumulé 38 % 73 % (49-87) 28 % (9-44) 38 % (30-50) 16 % (11-21) à 50 ans risque cumulé 67 % 87 % (72-95) 84 % (43-95) 65 % (51-75) 45 % (33-54) à 70 ans () intervalle de confiance à 95 %.

 

Ces études ont été importantes pour l’identification des gènes

BRCA1 et BRCA2 .

En effet, elles ont permis de définir le modèle génétique utilisé dans les calculs de liaison génétique et d’estimer ses paramètres (risque tumoral ou pénétrance, fré- quence allélique, taux de cas sporadiques). Mettant à contribution des familles réunissant plusieurs cas de cancer du sein, en général au moins trois cas appartenant à la même branche parentale et dont l’âge au diagnostic était en moyenne par famille inférieur à cinquante ans, l’équipe de Mary-Claire King a localisé un premier locus sur le bras long du chromosome 17 (en 17q21) [2]. Ces études reposent sur la recherche de la co-ségrégation, ou co-transmission, de la maladie étudiée et de marqueurs génétiques multiallèliques. En règle générale, à cette époque, deux à trois cents marqueurs, dispersés sur l’ensemble du génome, étaient étudiés. L’observation de la co-ségrégation de la maladie et d’un marqueur donné est quantifiée par le lod score (rapport logarithmique de la vraisemblance de la liaison à une « distance » génétique donnée sur celle de l’absence de liaison). Au-dessus d’un certain seuil de lod score (en général 3), on retient que ce marqueur est plus souvent associé à la maladie que ne le voudrait le hasard. On en déduit que le gène qui prédispose à la maladie est « lié » au marqueur étudié. La détection sur l’un des gènes localisés dans la région de liaison de mutations inactivatrices, conduisant à une perte de fonction de la protéine correspondante, est l’élément clé qui permet de retenir qu’il s’agit du gène recherché. C’est ainsi qu’après avoir été précisément localisé dans une région d’un million de paires de bases par un consortium international de laboratoires, le Breast Cancer Linkage Consortium (BCLC), le gène BRCA1 a été identifié en 1994 par l’équipe de Mark Skolnick (Myriad Genetics) [3]. Dès la localisation du locus BRCA1 , le groupe de Gilbert Lenoir et de Jean Feunteun a montré que les familles réunissant des cas de cancers du sein et de l’ovaire étaient préférentiellement liées à BRCA1 , indiquant ainsi que ces mutations sont également associées à un risque de cancer de l’ovaire[4]. La reprise systématique de l’analyse des marqueurs dans les familles non liées à BRCA1 a conduit à localiser un deuxième locus sur le bras long du chromosome 13 puis à identifier en 1995 le gène

BRCA2 [5].

Ainsi, au niveau constitutionnel, il existe une mutation inactivatrice de l’un des deux allèles, maternel ou paternel. Au cours du processus tumoral, il se produit une inactivation du second allèle, en général secondaire à la délétion d’une grande région chromosomique portant le gène impliqué [6]. L’inactivation complète de l’un ou l’autre de ces gènes a conduit certains à retenir que BRCA1 et BRCA2 sont des gènes suppresseurs de tumeur ou anti-oncogènes. Les études cellulaires sur ces deux gènes qui ont suivi, nous conduisent à retenir qu’il s’agit plutôt de gènes « caretaker » que suppresseur de tumeur [7]. En effet, les gènes BRCA1 et BRCA2 codent pour des protéines impliquées physiologiquement dans la réparation des lésions de l’ADN.

Plus précisément, BRCA1 est une protéine clé dans la détection de lésions de différentes natures : cassures simple et double-brin, anomalies nucléotidiques. À côté de la détection de ces lésions, la protéine BRCA1 a un rôle dans l’adaptation du cycle cellulaire à la phase de réparation et dans la mobilisation des protéines de réparation proprement dites comme RAD51 (protéine-clé de la réparation des cassures double-brin par recombinaison homologue). La protéine BRCA1, intervient via son domaine RING dans l’ubiquitinylation des protéines, un mode de dégradation des protéines, et permet par cette activité une régulation fine de différentes voies cellulaires impliquées directement ou indirectement (contrôle négatif du cycle cellulaire) dans la réparation de l’ADN. La protéine BRCA2 est, quant à elle, plus spécifiquement impliquée dans la recombinaison homologue. En effet, BRCA2 contrôle la localisation de RAD51 sur les sites de cassure double-brin de l’ADN. Alors que l’expression des protéines BRCA1 et BRCA2 est ubiquitaire, le risque tumoral, secondaire à leur inactivation, est principalement mammaire, et dans une moindre mesure ovarien. Il n’y a pas aujourd’hui d’explication claire pour rendre compte de ce paradoxe. L’hypothèse la plus communément admise repose sur le rôle des œstrogènes. En effet, les œstrogènes par leur effet mutagène direct et leur effet prolifératif indirect, favoriseraient l’émergence du processus tumoral. Leur effet mutagène serait renforcé par l’absence de protéine BRCA1 qui n’exercerait alors plus d’effet de contrôle négatif sur la synthèse de récepteurs aux œstrogènes, augmentant alors leur action sur la prolifération [8].

Pathologie moléculaire des gènes BRCA1 et BRCA2

Comme on l’a vu brièvement précédemment, les mutations des gènes

BRCA1 et

BRCA2 sont des mutations inactivatrices. Il s’agit donc dans la majorité des cas des mutations conduisant à la synthèse d’une protéine tronquée : mutations stop, délétions ou insertions de quelques nucléotides rompant le cadre de lecture, anomalies d’épissage ou enfin réarrangements de grande taille. Des mutations faux-sens, mutations responsables de la substitution d’un acide aminé (aa) à un autre, ont également été rapportées. Mises à part quelques mutations faux-sens siégeant dans des domaines fonctionnels très particuliers (Cystéine du domaine RING de BRCA1 ; domaines BRCT de BRCA1), et en l’absence, à l’heure actuelle, de test fonctionnel in vitro , la conséquence de ces faux-sens sur la fonction de la protéine reste d’interprétation difficile. Un ensemble d’arguments concourent à classer ces mutations faux-sens : — conservation du nucléotide et de l’aa au cours de l’évolution des espèces (phylogénèse), — importance de l’écart physico-chimique entre l’aa natif et l’aa substitué, — absence du faux-sens BRCA1 étudié chez des sujets par ailleurs porteurs d’une mutation inactivatrice

BRCA1 (l’inactivation biallélique constitutionnelle étant létale) et enfin — co-ségrégation du faux-sens chez un grand nombre de femmes atteintes de cancer du sein et absence ou quasi-absence chez des femmes indemnes [9].

En 2008, près de deux mille mutations différentes des gènes BRCA1 et BRCA2 sont enregistrées dans la base de données du National Institute of Health (http://www.

nhgri.nih.gov/Intramural_research/Lab_transfer /Bic/). En France, ce sont près de 800 mutations inactivatrices différentes qui sont enregistrées dans la base de données développée par Rosette Lidereau et Christophe Béroud (Saint-Cloud et Montpellier) et presque tout autant de variants exoniques ou introniques de signification biologique encore inconnue. Il existe cependant dans certaines populations une faible diversité de mutations qui est le résultat d’un effet fondateur. Il s’agit en général de populations isolées qui ont un petit nombre d’ancêtres communs. Ainsi certaines populations insulaires comme l’Islande, ou des populations avec une barrière culturelle comme la population Ashkénaze, présentent un petit nombre de mutations différentes. En absence d’effet fondateur, la diversité des mutations et leur dispersion sur ces gènes de très grande taille compliquent singulièrement leur recherche dans une famille donnée. La recherche de mutations par des techniques classiques mais aujourd’hui peu utilisées [SSCP (single stranded conformational polymorphism), DGGE (denaturing gradient gel electrophoresis), HA (heteroduplex analysis)] contrairement aux techniques plus fiables [DHPLC (denaturing high-performance liquid chromatography), EMMA (enhanced mismatch mutation analysis), HRM (high resolution melt) et séquençage direct)] dans des familles dont les analyses de liaison ont montré qu’elles étaient liées à BRCA1 ou BRCA2 ont permis d’estimer que la sensibilité de détection de mutation par ces méthodes est de l’ordre de 70 % [10], (Easton, non publié). Les délétions ou duplications partielles ou complètes des gènes BRCA1 et BRCA2 mises en évidence par des techniques complémentaires QMPSF, (quantitative multiplex PCR short fragment), MLPA (multiple ligation dependent probe amplification, EMMA) représentant 15 à 20 % de l’ensemble des mutations de BRCA1 et 5 % au plus des mutations de BRCA2 , conduit à la caractérisation de 80 à 90 % des mutations attendues [11].

La complexité des investigations, la signification limitée d’un résultat négatif à l’issu d’une première étude familiale (car n’éliminant pas la présence d’un facteur génétique de prédisposition) conduisent à distinguer deux types de test génétique :

— le test réalisé pour la première fois dans une famille et qui a pour objectif de repérer l’altération génétique responsable, — le test proposé aux apparentées après qu’une mutation a été identifiée dans la famille. Le premier test est conduit chez la personne la plus susceptible d’être prédisposée compte-tenu de son histoire personnelle et de sa position sur l’arbre généalogique : le cas index. Il est donc en général proposé à une femme qui a été atteinte d’un cancer du sein ou de l’ovaire. Le délai d’obtention du résultat est long, de six à douze mois en général. Ce délai est lié au temps expérimental (de quatre à douze semaines selon l’organisation des laboratoires) et au volume des examens que les laboratoires ont à traiter. Le second test, effectué chez les apparentées après identification de la mutation, est plus simple et immédiat, car ciblé sur l’altération identifiée. Le résultat est obtenu en quelques semaines, voire quelques jours. Si l’altération identifiée chez le parent porteur n’est pas détectée, ceci élimine un diagnostic de prédisposition génétique, sous réserve qu’il n’y ait pas d’antécédent tumoral évocateur d’une prédisposition dans l’autre branche parentale. Enfin, il faut rappeler qu’il est de bonne pratique de confirmer l’identification d’une mutation chez un cas index ou tout résultat chez un apparenté sur un second prélèvement indépendant.

 

Contribution des mutations des gènes

BRCA1 et BRCA2 à la prédisposition au cancer du sein

L’estimation de la contribution des gènes

BRCA1 et BRCA2 à la prédisposition au cancer du sein a été réalisée par des analyses de liaison génétique menées dans plus de deux cents familles réunies par le BCLC et sélectionnées car présentant au moins quatre cas de cancer du sein diagnostiqués avant l’âge de 60 ans et donc très évocatrices d’une prédisposition génétique sous-jacente [10]. Le tableau 2 montre ces estimations en fonction de l’histoire familiale : cancer du sein seul, cancers du sein et de l’ovaire, cancers du sein comptant au moins un cas masculin. Il faut retenir que BRCA1 ou BRCA2 sont impliqués dans 95 % des familles « sein-ovaire » du

BCLC alors qu’ils ne le sont que dans 65 % des familles « sein seul » du BCLC. On s’attend donc à l’existence d’autres facteurs génétiques de prédisposition au cancer du sein. Malgré plusieurs études de liaison génétique réalisées à partir de grandes familles liées ni à BRCA1 , ni à BRCA2 , aucun autre gène n’a pu être localisé et a fortiori identifié. Il est probable que ces dernières correspondent à des situations complexes : présence de plusieurs phénocopies (femmes atteintes de cancer du sein dans une famille BRCA1 ou BRCA2 mais non porteuses de l’altération génétique), existence de deux mutations ségrégeant de façon indépendante dans la même branche familiale, etc.

Tableau 2. — Contribution des altérations des gènes BRCA1 et BRCA2 d’après les études de liaison génétique réalisées sur plus de 200 familles [10].

Familles ayant au moins 4 cas BRCA1

BRCA2

Autres gènes :

de cancer du sein avant l’âge de

BRCAX ?

60 ans Toutes les familles 52 % (42-63) 35 % (24-46) 13 % (3-25) Familles sein seul 28 % (13-45) 37 % (20-56) 35 % (14-57) Familles sein-ovaire 80 % (66-92) 15 % (5-28) 5 % (0-17) Familles avec cas masculins 19 % (1-47) 77 % (43-97) 4 % (0-42) () intervalle de confiance à 95 %.

La prévalence des sujets porteurs d’une mutation délétère de BRCA1 ou BRCA2 dans la population générale a été estimée grâce à l’étude de population « Anglian

Breast Cancer ou ABC study » [12, 13]. Il s’agit d’une étude basée sur la recherche systématique de mutation BRCA1/2 dans une série rétrospective de cas de cancer du sein consécutifs entre 1991 et 1996 dont le diagnostic a été porté avant l’âge de 55 ans. La reconstitution systématique de l’histoire familiale au premier degré de chaque cas et la prise en compte d’une sensibilité de détection de mutation de 80 % a permis d’estimer la prévalence des mutations BRCA1 et BRCA2 dans la population générale. La prévalence des mutations

BRCA1 est estimée à 0,102 % (IC 95 % :

0,042 %-0,250 %), soit 1/980 (IC 95 % : 1/2381-1/400) ; celle de

BRCA2 à 0,136 % (IC 95 % : 0,066 %-0,282 %), soit 1/735 (IC 95 % : 1/1515-1/354). Ainsi, une personne sur 420 serait porteuse d’une altération d’un gène BRCA1 ou BRCA2 .

Cette même étude a permis d’estimer la prévalence des mutations chez les femmes atteintes de cancer du sein ou de l’ovaire en fonction de l’âge au diagnostic (Tableau 3). Ainsi, 2,6 % des femmes atteintes de cancer du sein avant 50 ans et 1,9 % de celles atteintes avant 70 ans seraient porteuses d’une altération d’un gène BRCA1/2 .

Tableau 3. — Prévalence des femmes porteuses d’une mutation

BRCA1 ou BRCA2 en fonction de l’âge au diagnostic selon l’ABC study [13].

Cancer du sein

Cancer de l’ovaire < 40 ans < 50 ans < 70 ans < 50 ans < 70 ans

BRCA1 2,4 % 1,2 % 0,23 % 5,16 % 1,95 % BRCA2 2,3 % 1,4 % 1,67 % 0,27 % 1,12 % Le taux de détection des mutations BRCA1/2 parmi les femmes ayant une histoire personnelle et/ou familiale constituant une indication de test génétique est de 14 % selon le rapport d’activité 2006 de l’INCa (synthèse de l’activité des quinze laboratoires français réalisant ces analyses (https://www.e-cancer.fr)). Ce faible taux souligne, comme mentionné dès l’introduction, que les altérations des gènes BRCA1 et

BRCA2 sont loin d’être impliquées dans toutes les formes familiales de cancer du sein.

Risques tumoraux et mutations BRCA1 et BRCA2

À la suite à l’identification des gènes

BRCA1/2 , les risques tumoraux associés aux mutations de ces gènes ont été ré-estimés à partir des familles du BCLC (Tableau 1).

Les critères d’inclusion des familles ont été pris en compte, limitant ainsi en principe les biais de recensement et donc la surestimation des risques. Les premières estimations du risque cumulé de cancer du sein associé à une mutation des gènes BRCA1/2 étaient très élevées, de plus de 80 % à l’âge de 70 ans. Puis ce risque a été secondairement ré-estimé à partir d’études dites « de population », c’est-à-dire sans a priori sur l’histoire familiale. Les estimations de ce risque se sont avérées plus faibles. Une méta-analyse des vingt-deux études de ce type a estimé des valeurs de risque proches de celles données par l’analyse de ségrégation de la CASH-study, tout du moins le risque associé aux mutations BRCA1 (Tableau 1) [14]. Les différences d’estimation des risques entre les études de familles et les études de population peuvent refléter l’effet de facteurs modificateurs sur les risques tumoraux de ces gènes (voir § suivant).

 

Les mêmes études ont été réalisées pour estimer le risque de cancer de l’ovaire et sont résumées dans le tableau 4 [14]. Le risque de développer un cancer de l’ovaire associé aux mutations BRCA1 est plus élevé et à un âge plus précoce que celui associé aux mutations

BRCA2 . Le tableau 5 montre l’estimation de l’incidence annuelle par tranche d’âge de cancer du sein et de l’ovaire en fonction de la présence d’une mutation BRCA1 ou BRCA2 [14]. Ces estimations sont très précieuses pour la prise en charge d’une femme prédisposée, et plus particulièrement pour la guider dans sa décision de chirurgie prophylactique. Enfin, il faut rappeler que le risque annuel d’atteinte du sein controlatéral est majeur. Il est de l’ordre de 3 à 6 % en cas de mutation BRCA1 et de 2 à 4 % en cas de mutation BRCA2 [15].

Tableau 4. — Risques de cancer de l’ovaire estimés dans différentes études.

BRCA1

BRCA2

BRCA1

BRCA2 [54] [10]

Méta-analyse des

Méta-analyse des études de population études de population [14] [14]

Risque cumulé à 29 % (16-40) 0,4 % (0-1) 13 % (8-18) 1 % (0-3) 50 ans

Risque cumulé à 44 % (28-56) 27 % (0-47) 39 % (22-51) 11 % (4-18) 70 ans () intervalle de confiance à 95 %.

Tableau 5. — Incidence annuelle de cancer du sein ou de l’ovaire en fonction de la présence d’une mutation BRCA1 ou BRCA2 selon la méta-analyse de 22 études de population d’Antoniou [14].

T sein, BRCA1 T sein, BRCA2 T ovaire, BRCA1 T ovaire, BRC2 20-24 ans 0,02 % 0,02 % 0,001 % 0,001 % 25-29 ans 0,11 % 0,12 % 0,002 % 0,002 % 30-34 ans 0,74 % 0,36 % 0,18 % 0,004 % 35-39 ans 1,59 % 0,78 % 0,28 % 0,01 % 40-44 ans 2,92 % 0,91 % 0,87 % 0,08 % 45-49 ans 4,28 % 1,34 % 1,49 % 0,14 % 50-54 ans 2,65 % 1,76 % 0,96 % 0,60 % 55-59 ans 3,01 % 2,00 % 1,19 % 0,75 % 60-64 ans 2,70 % 2,17 % 2,26 % 0,38 % 65-69 ans 2,96 % 2,38 % 2,49 % 0,42 %

Le risque de cancer du sein chez l’homme est également augmenté en cas de mutation BRCA1 mais surtout en cas de mutation BRCA2 : les risques cumulés à 70 ans sont respectivement de 1,2 % et 6,8 % [16] comparé à 0,05 % dans la population générale.

Une influence de la nature et de la position de la mutation sur les risques tumoraux a été recherchée tant pour BRCA1 que pour BRCA2 . Le risque de cancer de l’ovaire est multiplié par deux pour les mutations du gène

BRCA2 localisées dans une région appelée Ovarian Cancer Cluster Region (OCCR) et située dans la partie centrale du gène comparé à celui d’une mutation située en dehors de cette région [17]. Cette information n’est pas prise en compte dans la prise en charge des patientes dans la recommandation d’annexectomie prophylactique [18].

Les études des familles du BCLC ont été également utilisées pour étudier les risques associés à d’autres localisations de cancers. Le taux de cancers chez les apparentés de sujets porteurs d’une mutation BRCA1/2 a été comparé à celui de la population générale. Une augmentation du risque de cancer du pancréas a été trouvée associé à une mutation BRCA2 : le risque cumulé à 70 ans est de 2,1 % chez les hommes et de 1,5 % chez les femmes [19]. Une augmentation a été également trouvée associée à une mutation BRCA1 avec un risque cumulé à 70 ans de 1,2 % chez les hommes [20].

Ainsi, le risque est multiplié par un facteur compris entre 2 et 3,5 chez les hommes par rapport à celui de la population générale. Une augmentation du risque de cancer de la prostate et de mélanome a été trouvée associé au gène BRCA2 (risque relatif de 4,7 et 2,6 respectivement), et enfin une augmentation du risque de cancer du col utérin associé à une mutation BRCA1 (risque relatif de 3,7) [19, 20]. Il est possible que ces valeurs soient surestimées. Les résultats des études prospectives seront précieux.

Facteurs modificateurs du risque de cancer du sein lié aux mutations BRCA1 et

BRCA2

Le risque de cancer du sein de femmes porteuses d’une mutation

BRCA1 ou BRCA2 et nées après 1940 est multiplié par 2,5 par rapport à celui des femmes nées avant 1940. Cet effet cohorte suggère l’effet de facteurs environnementaux et/ou liés au mode de vie (nombre de grossesses, âge moyen à la première grossesse, ….) sur les risques associés aux mutations. Par ailleurs, les risques de cancer du sein ou de l’ovaire trouvés plus élevées dans les études portant sur des cas familiaux comparé à ceux trouvés dans la population dite générale (cf § précédent) suggèrent l’existence de facteurs génétiques modificateurs [21, 22]. Les études de recherche de ces facteurs modificateurs nécessitant de grands effectifs pour être suffisamment puissantes ont conduit à la mise en place de consortia internationaux : IBCCS 1 pour les facteurs 1. IBCCS : International BRCA1/2 Carrier Cohort Study ; CIMBA: Consortium of Investigators of Modifiers of BRCA1 and BRCA2 ; GENEPSO : GENE Predisposition Sein Ovaire ; GEMO : GEne MOdifyer.

non génétiques et CIMBA pour les facteurs génétiques, consortia auxquels participe très activement le Groupe Génétique et Cancer (GGC) à travers les cohortes GENEPSO et GEMO.

Facteurs non génétiques

L’annexectomie est associée à une diminution très importante du risque de cancer du sein [23, 24]. Une diminution de 50 % du risque de cancer du sein est observée lorsque l’annexectomie est réalisée avant la ménopause. Le bénéfice de l’annexectomie pourrait persister même en cas d’un traitement hormonal substitutif [25]. La parité, et plus précisément un nombre de grossesses menées à terme supérieur à trois, est un facteur protecteur du risque de cancer du sein chez les femmes BRCA1/2 . Cet effet protecteur est surtout observé pour le risque de cancer du sein après l’âge de 40 ans [26]. Une augmentation du risque de cancer du sein chez les femmes ayant eu une irradiation thoracique dans le cadre d’examens d’imagerie (radio de thorax, scopie, scanner et en dehors des mammographies) a été rapportée. Le risque relatif de cancer du sein est de l’ordre de 2,6 chez des femmes exposées avant l’âge de 20 ans [27]. La contraception orale pourrait augmenter le risque de cancer du sein dans un contexte BRCA1/2 [28]. Des études complémentaires restent cependant nécessaires pour préciser la valeur de l’augmentation du risque et rechercher des interactions génome-environnement [29]. Enfin, aucun effet lié : — à la précocité des ménarches (âge inférieur à 12 ans), — au nombre de fausses couches spontanées ou provoquées et — à la durée de l’allaitement, n’a été observé jusqu’à maintenant [24, 26].

Facteurs génétiques

Le consortium CIMBA s’attache depuis 2006 à identifier des facteurs génétiques modificateurs du risque de cancer du sein chez les femmes porteuses d’une mutation BRCA1/2 [30]. La recherche de facteurs génétiques modificateurs du risque de cancer de l’ovaire sera mise en œuvre lorsque la collection d’un nombre suffisant de cas sera obtenue. Des travaux récents ont montré qu’un variant intronique à l’état homozygote de RAD51 (+135C) augmente d’un facteur 3 le risque de cancer du sein des femmes porteuses d’une mutation BRCA2 . Ce variant est d’autant plus intéressant qu’il a été montré in vitro qu’il était associé à une quantité de protéine RAD51 synthétisée plus faible que la forme sauvage. Moins de 0,5 % des femmes mutées BRCA2 sont porteuses de ce variant à l’état homozygote[31].

De façon très intéressante, il a été montré récemment que des variants fréquents dans la population générale et associés à une augmentation très modérée du risque de cancer du sein, de l’ordre d’un facteur 1,2 à 1,4 avaient un effet multiplicatif sur le risque de cancer du sein dans un contexte BRCA2 . Ainsi, le risque de cancer du sein chez une femme porteuse d’une mutation

BRCA2 peut varier de 40 à 70 % à l’âge de 70 ans en fonction de la combinaison des génotypes des variants FGFR2 rs2981582 et TNRC9 rs3803662 [32].

 

Si confirmée et sous réserve de l’identification de tous les facteurs modificateurs rendant compte de la variabilité, leur combinaison devrait permettre une meilleure estimation des risques individuels. Leur prise en compte pourrait être alors intégrée à la pratique médicale.

GÈNES ASSOCIÉS À UN SYNDROME PARTICULIER

Le syndrome de Li et Fraumeni

Le syndrome de Li et Fraumeni est défini historiquement par une histoire familiale qui réunit un cas index atteint d’un sarcome avant l’âge de 46 ans et au moins deux apparentés liés au premier ou second degré et appartenant à la même branche parentale, atteints de cancers avant l’âge de 46 ans ou dont l’un est atteint d’un sarcome quel que soit l’âge au diagnostic. Les tumeurs du « spectre » de syndrome de Li et Fraumeni sont des tumeurs cérébrales (glioblastomes), des cancers du sein, des cortico-surrénalocarcinomes et des hémopathies. Ces tumeurs, souvent multiples, sont d’apparition précoce et surviennent, dans près de 20 % des cas, avant l’âge de 15 ans [33]. Des mutations constitutionnelles hétérozygotes du gène TP53 , gène clé du cycle cellulaire et de l’orientation vers l’apoptose, ont été identifiées dans environ 50 % des familles correspondant à la définition historique du syndrome. Ce syndrome de prédisposition, transmis selon un mode dominant est associé à un risque de cancer du sein de l’ordre de 40 % à 45 ans, avec une augmentation de ce risque dès l’âge de 20 ans. Moins de 1 % des cas de cancer du sein diagnostiqués avant l’âge de 40 ans sont liés à une mutation TP53 . Compte tenu que le gène TP53 a été retrouvé que dans 50 % des familles, d’autres gènes sont très probablement à l’origine de ce syndrome. Des mutations du gène

CHEK2 , impliqués dans le cycle cellulaire, ont été impliquées [34] mais son rôle n’a pas été confirmé [35].

La recherche de mutation TP53 chez une femme ayant été atteinte de cancer du sein avant l’âge de 36 ans et dont l’étude

BRCA1/2 est négative peut être aujourd’hui proposée. Cependant, la multiplicité et la diversité des lésions tumorales rendent la prise en charge des sujets porteurs d’une altération de TP53 limitée. Dans cette situation, plus que dans tout autre, la proposition par un médecin et la décision par la personne à risque d’un test doivent donc être mûrement réfléchies [36]. Les enjeux d’un tel test sont la mise en œuvre d’une surveillance mammaire par IRM très précocement et la possibilité pour un couple d’avoir accès à un diagnostic prénatal, voire un diagnostic pré-implantatoire.

La maladie de Cowden ou maladie des hamartomes multiples

La maladie de Cowden est une pathologie très rare touchant de l’ordre d’une personne sur cent mille. Moins de un pour mille des cas de cancer du sein est lié à cette pathologie. Ce syndrome est caractérisé par la présence de lésions hamarto- mateuses cutanées (tricholemmomas), de la cavité buccale, de la thyroïde et du tractus digestif. Les hamartomes correspondent au développement architectural anormal d’un tissu donné. La présence de polypes hamartomateux du côlon est un excellent élément du diagnostic. Il existe chez 50 % des femmes atteintes de la maladie de Cowden une mastopathie sévère souvent associée à une hypertrophie mammaire. Plus de la moitié de ces lésions sont associées à un carcinome mammaire.

Le gène responsable, PTEN , a été identifié. Il code pour une protéine impliquée dans le contrôle négatif du signal mitotique (voie AKT) et dans la cohésion intracellulaire. Le mode de transmission de la maladie de Cowden est, comme pour les situations précédentes, autosomique dominant [37]. Et de la même façon, il existe une grande diversité de mutations rendant l’analyse du gène difficile. La prise en charge du risque de cancer du sein est difficile du fait de l’importance de la mastopathie qui peut conduire à l’indication d’une mastectomie prophylactique.

Le syndrome de Peutz-Jeghers ou lentiginose péri-orificielle

Le syndrome de Peutz-Jeghers est une pathologie très rare touchant une personne sur cent mille environ et appartenant, comme la maladie de Cowden, au groupe des polyposes digestives hamartomateuses. Elle est caractérisée par la présence de tâches pigmentées de 1 à 5 mm localisées préférentiellement au niveau des muqueuses labiales, buccales, vulvaires et anales (lentiginose péri-orificielle), mais également au niveau de l’extrémité des doigts et des genoux. Ces tâches ont tendance à s’atténuer avec l’âge. Les polypes du tractus digestif siègent le plus souvent au niveau de l’intestin grêle, plus rarement au niveau du duodénum, de l’estomac et/ou du côlon/rectum. L’étude histologique permet de conclure à leur nature hamartomateuse et d’identifier des caractéristiques propres permettant de les distinguer des autres types de polypes hamartomateux comme les polypes juvéniles. Lorsqu’ils sont nombreux et/ou volumineux, ces polypes peuvent être à l’origine de syndromes occlusifs à répétition (par obstruction ou intussusception), d’une diarrhée chronique et d’hémorragies digestives extériorisées ou, plus souvent, microscopiques et distillantes[38]. Ce syndrome, transmis selon le mode autosomique dominant, est associé à une augmentation importante du risque de différents types tumoraux, en particulier de tumeurs malignes du tube digestif et de tumeurs pancréatiques et gynéco-mammaires, impliquant la mise en place d’une stratégie de dépistage systé- matique [38]. Dans un travail antérieur, les auteurs ont estimé les risques tumoraux au moyen d’une méta-analyse portant sur deux cent-dix individus atteints. L’incidence annuelle du cancer du sein était estimée à 0,44 % et le risque cumulé à 64 ans à 54 % [39]. Un gène a été identifié, STK11 , gène codant pour une kinase dont les protéines cibles ne sont pas encore connues. Les mutations de

STK11 rendent compte de seulement 50 % des cas de Peutz-Jeghers, indiquant l’existence d’une hétérogénéité génétique [40].

 

Forme héréditaire de cancers gastriques à cellules isolées et mutation constitutionnelle du gène CDH1

Les mutations constitutionnelles à l’état hétérozygote du gène

CDH1 qui code pour une protéine d’adhésion intercellulaire, la E-cadhérine, sont associées à un risque élevé d’adénocarcinome gastrique à cellules isolées.

La prévalence de ces mutations dans la population générale est évaluée entre 1/10 000 et 1/20 000. Le risque cumulé de cancer gastrique est évalué à 4 % à 30 ans et de l’ordre de 70 % à l’âge de 70 ans [41]. Il pourrait être plus élevé chez les femmes que chez les hommes. Ces cancers, au pronostic extrêmement péjoratif, ne sont pas détectables précocement par l’exploration endoscopique, de telle sorte que la gastrectomie totale prophylactique doit être systématiquement envisagée dès l’âge de 20 ans [42]. Les femmes atteintes sont également à risque augmenté de carcinomes mammaires lobulaires infiltrants, tumeurs associées à une perte d’expression de la E-cadhérine. Le risque cumulé de cancer du sein a été évalué à 39 % (12 %-84 %) à l’âge de 80 ans [41]. Cette augmentation du risque, bien que l’estimation soit imprécise, justifie la mise en place d’une surveillance mammaire étroite, clinique et radiologique, dont certains proposent de « calquer » les modalités sur celles proposées aux femmes porteuses d’une mutation du gène BRCA1/2 . L’IRM mammaire pourrait être particulièrement précieuse dans ce contexte en raison de la moindre performance de la mammographie pour le dépistage des carcinomes lobulaires infiltrants. Masciari et al . ont étudié le gène CDH1 chez vingt-trois femmes atteintes d’un carcinome lobulaire infiltrant ou mixte (composantes lobulaires et canalaires) diagnostiqué avant l’âge de 45 ans et/ou ayant au moins une apparentée au premier degré atteinte [43]. Dans tous les cas, la recherche de mutation des gènes BRCA1/2 était négative et il n’existait pas d’antécédent familial de cancer gastrique. Une mutation tronquante de

CDH1 a été identifiée chez une femme de cette série atteinte à l’âge de 42 ans et dont la mère avait également été atteinte d’un carcinome mammaire lobulaire infiltrant au très jeune âge de 28 ans.

MUTATIONS RARES ET RISQUE DE CANCER DU SEIN MODÉRÉ

Mutations à l’état hétérozygote du gène

ATM , gène de l’ataxie-télangiectasie

L’ataxie-télangiectasie (A-T) est une pathologie héréditaire, transmise selon le mode autosomique récessif, qui associe dégénérescence cérébelleuse, déficit immunitaire, hypersensibilité aux radiations ionisantes et prédisposition aux tumeurs malignes en particulier hématologiques, apparaissant souvent dès l’enfance. Le gène principalement responsable, ATM , code pour une protéine kinase, impliquée dans la détection des cassures double-brin de l’ADN, dans le contrôle du cycle cellulaire et dans la mobilisation de protéines de réparation. Un second gène, MRE11 , a été identifié ;

ses altérations sont à l’origine de moins de 5 % des cas d’A-T [44]. L’expression de la maladie est atténuée et le risque de cancer n’a pas encore été évalué. Comme

ATM ,

MRE11 est impliqué dans la réparation des cassures double-brin de l’ADN et plus précisément dans la détection de ces cassures. Les parents des enfants atteints d’une forme classique d’A-T, hétérozygotes ATM obligatoires, présentent une radiosensibilité in vitro sus-normale et ont un risque de cancers plus important que celui de la population générale. Les femmes ont en particulier, selon les études les plus récentes, un risque de cancer du sein multiplié par trois [45]. Alors que la maladie est rare dans la population (de l’ordre d’un enfant sur cent mille), la fréquence des hétérozygotes est relativement élevée et est de l’ordre de un sur deux cents. En retenant un risque relatif de cancer du sein de trois, environ 2 % des cas de cancers du sein pourraient être liés à une mutation du gène ATM à l’état hétérozygote. Ces estimations ont été retrouvées par une étude cas-témoin portant sur 443 cas familiaux de cancers du sein et 521 témoins. Le risque relatif de cancer du sein chez les hétérozygotes A-T a été estimé à 2,37 (95 % IC = 1,51-3,78) [46]. Aujourd’hui, l’étude du gène ATM n’est réalisée que dans un cadre de recherche. Une étude de cohorte prospective d’apparentées d’enfants atteints d’A-T a été mise en place au niveau français en 2002. Une surveillance mammographique biennale à partir de l’âge de 40 ans est proposée (N Andrieu et D Stoppa-Lyonnet). Il est intéressant de noter que les résultats des études épidémiologiques ont été renforcés par ceux des études biologiques qui ont montré que BRCA1 était une cible de phosphorylation d’ATM [47].

Mutations à l’état hétérozygote des gènes BRIP1 et PALB2 , gènes de la maladie de

Fanconi

La constatation de caractéristiques cytogénétiques communes entre d’une part des carcinomes mammaires BRCA2 -/- et des cellules embryonnaires de souris invalidées pour

BRCA2 a conduit Alan d’Andrea à faire l’hypothèse que BRCA2 était l’un des treize gènes attendus de la maladie de Fanconi, pathologie rare touchant de l’ordre d’un enfant sur cent mille et transmise selon le mode récessif. Il a effectivement été montré que des mutations bialléliques de BRCA2 étaient responsables d’une maladie de Fanconi et que

BRCA2 correspondait au gène du groupe de complémentation

FANCD1 [48]. Les autres gènes de la maladie de Fanconi devenaient dès lors des gènes candidats de prédisposition au cancer du sein. Une série d’études cas-témoin conduites par l’équipe de Mike Stratton dans des formes familiales de cancer du sein a examiné la fréquence des mutations de ces gènes et a mis en évidence une augmentation du risque de cancer du sein associée aux mutations des gènes BRIP1 (FANCJ) et PALB2 ( FANCN ) . Il est à noter de plus que les protéines codées par ces gènes sont des partenaires d’interaction de BRCA1 (BRIP1) ou de BRCA2 (PALB2). Les mutations BRIP1 sont associées à un risque relatif modéré de cancer du sein, de 2 (95 %IC: 1,2-3,2) et concernent environ 0,2 % des femmes atteintes de cancer du sein (95 %IC : 0,04-0,44) [49]. Les mutations PALB2 sont associées à un risque relatif modéré de cancer du sein de 2,3 (95 %IC: 1,4-3,9) et concernent 0,23 % (95 %IC : 0,07-0,52) des femmes atteintes de cancer du sein .

 

Gène

CHEK2

Le gène

CHEK2 (Cell Cycle Checkpoint Kinase 2) code pour une sérine thréonine kinase impliquée dans le contrôle du cycle cellulaire, en particulier lors de la réparation des lésions de l’ADN. Elle est activée par la protéine ATM en réponse aux cassures double brin de l’ADN et interfère, entre autre, avec BRCA1. Initialement évoqué dans le syndrome de Li et Fraumeni, certaines mutations CHEK2 , et en particulier la mutation 1100delC, ont fait l’objet de très nombreuses études de type cas-témoin. En effet, il s’agit d’une mutation relativement fréquente, la fré- quence des sujets porteurs à l’état hétérozygote étant de l’ordre de 1 % dans les pays d’Europe du Nord. Dans une méta-analyse récente sur seize études rassemblant au total 26 488 cas et 27 402 témoins, le risque relatif de cancer du sein associé à la présence de cette mutation a été trouvé de 4,8 (IC95 % : 3,3-7,2) dans le sous-groupe des formes familiales non liées à BRCA1/ 2, correspondant à un risque de cancer du sein à 70 ans de 37 % (IC95 % : 26 %-56 %) [50]. En l’absence d’antécédents familiaux, le risque relatif est estimé à 2,7 (IC95 % : 2,1-3,4). Ceci indique que d’autres facteurs, possiblement génétiques ou en tout cas corrélés dans les familles, augmentent le risque tumoral. Comme pour les autres gènes dont les mutations sont associées à un risque faible, il n’y a pas aujourd’hui d’indication pour tester cette mutation.

PRÉDISPOSITIONS MULTIFACTORIELLES AUX CANCERS DU SEIN

Les études d’association de type cas-témoin comparant la prévalence de différents variants fréquents, ou polymorphismes 2, dans la population générale et dans une population de femmes atteintes de cancer du sein sont très nombreuses et anciennes.

Les résultats de ces études sont souvent non significatifs et parfois discordants du fait de la petite taille des études. Alison Dunning a fait cependant en 1999, une revue exhaustive de ces études accompagnée d’une méta-analyse lorsque plusieurs études avaient testé le même allèle pour un gène donné [51]. Les principaux résultats de ce travail sont les suivants. L’allèle Val105 du gène GSTP1 3 confère un risque relatif de 1,60 par rapport à celui des non porteurs (p = 0,02) ; l’allèle Pro72 du gène

TP53 confère un risque relatif de 1,27 (p = 0,03) 4. Enfin, une délétion homozygote du gène

GSTM1 confère un risque relatif de 1,33 chez les femmes après la ménopause (p = 0,04).

2. Un polymorphisme est un allèle dont la fréquence dans la population générale est d’au moins 1 %.

Il s’agit d’une définition de génétique des populations. Il n’y a aucune hypothèse faite sur une possible modification fonctionnelle associée à ce polymorphisme. La fréquence de l’allèle « rare » des SNPs testés aujourd’hui est comprise entre 5 et 50 %.

3. GST : Glutathion S transférases, enzymes impliqués dans la détoxication de certains mutagènes 4. Il s’agit ici d’un variant fréquent de TP53 qui n’inactive pas totalement la protéine p53 correspondante et non d’une mutation inactivatrice à l’origine du syndrome de Li et Fraumeni.

 

Les études d’association sont en train de connaître un profond bouleversement en raison à la fois de l’identification de nouveaux marqueurs polymorphes répartis sur l’ensemble du génome (carte HapMap) : les SNP (Single Nucleotide Polymorphism) et de l’utilisation de la technologie des puces qui permettent de tester plusieurs centaines de milliers de SNPs. Ces études permettent d’explorer l’ensemble du génome sans sélection a priori de gènes ou régions candidates. Ces études, pour être suffisamment puissantes, nécessitent des effectifs très importants. Présentons pour exemple, l’étude internationale de l’équipe de Douglas Easton et Bruce Ponder [52].

Elle a été conduite en trois étapes. La première étape a consisté à génotyper 266 722 SNPs chez 408 femmes atteintes de cancer du sein et ayant une histoire familiale de cancer du sein et quatre-cents témoins. 12 711 SNPs, soit 5 % des SNP testés, ont été sélectionnés à l’issue de cette première analyse en raison d’une prévalence significativement différente dans le groupe des cas. Une analyse de ces 12711 SNPs a été faite chez 3 990 nouveaux cas et 3 916 témoins et a permis de retenir les 31 SNPs les plus significatifs. Ces 31 SNPs ont été à nouveau étudiés chez 21 860 cas de cancer du sein et 22 578 témoins. Sept de ces 31 SNPs, ou plutôt, l’un des deux allèles de ces SNPs ont été trouvé associés à un risque augmenté — ou diminué — de cancer du sein. Les risques relatifs sont très faibles, de 1,06 à 1,3 à l’état hétérozygote et de 1,10 à 1,23 à l’état homozygote. Ces SNPs sont localisés dans des gènes ou dans des régions intergéniques ; aucun n’est dans une partie codante. Ces SNPs peuvent être directement impliqués dans le risque tumoral avec un effet sur l’expression des gènes dans lesquels ils sont situés : FGFR2 (fibroblast growth facor 2), TNRC9 ou TOX3 (facteur de transcription ?), MAP3K1 (Mitogen activated protein kinase kinase kinase 1),

LSP1 (lymphocyte-specific protein codant pour une protéine d’interaction de l’actine F). Ils peuvent également être en déséquilibre de liaison avec un autre variant directement causal et encore non identifié.

Parce qu’ils influencent peu le risque de cancer du sein dans la population générale, ces résultats ne sont pas pris en compte dans la pratique clinique aujourd’hui. Il faut noter cependant que certaines sociétés de biotechnologie (23andMe, deCODEme,…) n’ont pas hésité à proposer la recherche de ces SNPs ou d’autres variants plus rares (mutation 1100delC du gène CHK2 ) sur leur site, confondant validation scientifique et pertinence clinique. Ce sont des dérives qu’il importe de dénoncer, car elles mettent en danger les personnes qui réaliseraient ces tests, entraînant anxiété injustifiée ou réassurance fallacieuse. Elles discréditent par ailleurs les recherches.

On peut s’attendre à l’identification d’autres SNPs. Dans l’étude d’Easton, de nombreux variants potentiellement intéressants ont été identifiés parmi les 12 711 SNPs identifiés lors de la première étape. Les premières études combinant ces variants, recherchant un effet multiplicatif entre eux et probablement agissant en interaction avec des facteurs non génétiques ont mis en évidence que les allèles rares des SNPs cités plus haut modifiaient le risque tumoral des femmes porteuses d’une mutation BRCA2 [32] . Des études [53] reposant sur de grands effectifs sont en cours pour examiner l’effet conjoint de ces facteurs, ainsi que leurs éventuelles interactions avec des facteurs de l’environnement ou de style de vie (prise de contraceptifs oraux, de THS, …). Citons, en particulier, l’étude GENESIS (GENE SISter) coordonnée par le Groupe Génétique et Cancer et reposant sur l’inclusion de mille paires de sœurs ayant été atteintes de cancer du sein et la constitution d’un groupe témoin de proches apparentées et non apparentées. Les antécédents gynécologiques et obstétricaux, l’exposition aux rayonnements d’origine médicale, la densité mammaire, le mode de vie (exposition au tabac et à l’alcool) seront colligés.

Il n’y a plus aujourd’hui d’un côté les études génétiques et de l’autre les études épidémiologiques mais une véritable « intégration » des deux disciplines.

CONCLUSION

Le paysage de la ‘‘ génétique ’’ des cancers du sein s’est singulièrement compliqué au cours de ces dernières années. Après l’identification des premiers gènes de prédisposition obéissant à un modèle mendélien avec une pénétrance élevée et représentés principalement par les gènes BRCA1 et BRCA2 , le champ du multifactoriel s’est ouvert, avec l’identification de gènes impliqués via des mutations rares ( ATM,

BRIP1, PALB2 ) ou l’identification de variants fréquents localisés dans la région non codante de certains gènes, voire des régions intergéniques et dont l’implication directe dans la prédisposition n’est pas établie. Les applications médicales de tests ciblés sur ces variants ne sont pas encore établies. Elles seront probablement limitées aux situations où des risques individuels relativement élevés et conduisant à une prise en charge spécifique, seront identifiés. La prédiction d’un risque élevé sera issue de la combinaison de plusieurs de ces facteurs, qu’ils soient génétiques ou non génétiques. Paradoxalement, les premières applications pourraient concerner les femmes déjà porteuses d’une altération du gène BRCA2.

 

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DISCUSSION

M. Roger HENRION

Les tests génétiques ont-ils une valeur prédictive sur l’apparition de récidives du cancer du sein ou des cancers d’ordre nature ?

Les mutations des gènes

BRCA1 et BRCA2 , dont les recherches constituent l’essentiel des tests génétiques de prédisposition aux cancers du sein, sont associées à un risque élevé d’un premier cancer du sein. À titre d’exemple, en cas de mutation BRCA1 , le risque cumulé à l’âge de 70 ans est de l’ordre de 70 % quand il est de 9 % dans la population générale. Cependant, le risque d’atteinte controlatérale dans un contexte BRCA1 par une tumeur indépendante est supérieur au risque d’une première atteinte. Le risque est de l’ordre de 3 à 4 % par an, soit très supérieur au risque de 0,7 % des femmes de la population générale ayant été atteintes d’un premier cancer. En revanche, les risques de récidive locale ou de maladie métastatique n’apparaissent pas différents de celui des femmes atteintes d’un cancer du sein dont les caractéristiques histologiques sont celles des cancers associés à une mutation BRCA1 ou BRCA2 . On rappelle que les cancers du sein survenant dans un contexte

BRCA1 sont plus souvent très indifférenciés, n’expriment pas de récepteurs aux œstrogènes ou à la progestérone et ont un index de prolifé- ration élevé. Au risque de cancer du sein est associé un risque de cancer de l’ovaire et de la trompe. Le risque cumulé à l’âge de 70 ans est de l’ordre de 40 % en cas de mutation BRCA1 et de 20 % en cas de mutation BRCA2 . Il existe également en cas de mutation

BRCA2 des risques modérés de cancer du pancréas, de l’estomac, de mélanome et chez les hommes de la prostate. L’estimation des risques n’est pas très précise. Il n’y a pas à l’heure actuelle de consensus pour la prise en charge de ces risques, précisément du fait de l’imprécision des risques et des âges moyens au diagnostic.

M. Jacques ROUE ı

SSE

N’y-a-t’il pas un risque d’une utilisation des données des SNPs par les assurances ?

Les applications cliniques des SPNs sont encore à mon sens très limitées, tout du moins dans le domaine des prédispositions aux cancers du sein. Il est clair cependant que certaines sociétés de biotechnologie proposent déjà des tests via internet sautant allègrement le pas entre validité scientifique de ces SNPs et leur absence de validité clinique.

Pourquoi les assurances n’en feraient-elles effectivement pas autant ? Je propose de poser la question de façon plus générale : les assurances peuvent-elles utiliser les résultats des tests génétiques prédictifs et en particulier le résultat positif d’un test BRCA1 ou

BRCA2 ? Notre système d’assurance de santé fondé sur la solidarité tant qu’il est en place protège toutes les personnes à risque et aujourd’hui conduit à la prise en charge des examens de suivi, en particulier l’IRM. C’est d’ailleurs l’une des propositions retenues dans le nouveau plan cancer. Concernant les assurances privées comme l’assurance-vie, les assurances nécessaires à l’obtention d’un prêt, de nombreuses dispositions protégeant l’assuré ou la personne désirant l’être sont inscrites dans le code civil, le code pénal et plus récemment dans le code de santé publique via la loi du 4 mars 2002 relative aux droits des malades. En effet l’article L. 1141-1 indique que « Les entreprises et organismes qui proposent une garantie des risques d’invalidité ou de décès ne doivent pas tenir compte des résultats de l’examen des caractéristiques génétiques d’une personne demandant à bénéficier de cette garantie, même si ceux-ci leur sont transmis par la personne concernée ou avec son accord. En outre, ils ne peuvent poser aucune question relative aux tests génétiques et à leurs résultats, ni demander à une personne de se soumettre à des tests génétiques avant que ne soit conclu le contrat et pendant toute la durée de celui-ci. ».

Ainsi, aujourd’hui, dans la loi française, les assureurs ne peuvent utiliser les résultats de tests génétiques ou inciter à leur réalisation. De quoi cependant l’avenir sera-t-il fait?

Dans quel sens ira la législation européenne ? C’est à nos législateurs de défendre leur position, soutenus par les professionnels et la société via nos institutions, nos comités d’éthique et nos sociétés savantes.

 

<p>* Génétique oncologique, Institut Curie-Hôpital, 26, rue d’Ulm — 75248 Paris, Inserm U830, Université Paris-Descartes, e-mail dominique.stoppa-lyonnet@curie-net ** Bruno Buecher 1, 4, Marion Gauthier-Villars 1, Claude Houdayer 1, 3, Antoine de Pauw 1, Anne de la Rochefordiere 5, Pascale This 6, Bernard Asselain 7, 8, 9, Nadine Andrieu 7, 8, 9. 1 - Génétique Oncologique, Institut Curie-Hôpital. 2 - Unité INSERM U830. 3 - Université Paris-Descartes. 4 - Département de Génétique, Hôpital Européen Georges Pompidou. 5 - Département de radiothérapie. 6 - Groupe Transversal de Pathologie Mammaire, Institut Curie-Hôpital, Paris. 7 - Inserm U900. 8 - Service de Biostatistiques, Institut Curie-Hôpital, Paris. 9 - École des Mines de Paris. Tirés-à-part : Professeur Dominique Stoppa-Lyonnet, même adresse. Article reçu le 31 mars 2009, accepté le 11 mai 2009.</p>

Bull. Acad. Natle Méd., 2009, 193, no 9, 2063-2085, séance du 8 décembre 2009