Communiqué
Session of 28 juin 2005

Avenir de la vaccination par le BCG en France

MOTS-CLÉS : immunisation de masse.. tuberculose. vaccins antituberculeux

Pierre Bégué, au nom d’un Groupe de travail et de la Commission VI (Maladies infectieuses et parasitaires)

 

La vaccination par le BCG demeure obligatoire en France chez l’enfant avant 6 ans et pour certaines professions. L’Académie nationale de médecine rappelle que le premier objectif de cette vaccination est la prévention des formes graves de tuberculose du nourrisson et de l’enfant, méningites tuberculeuses et miliaires, pour lesquelles l’efficacité du BCG est prouvée. La tuberculose est en diminution lente et régulière depuis plusieurs années en France. En 2003 l’incidence nationale moyenne de la tuberculose était stable à 10,2/100000 habitants et les critères préconisés par l’UICTMR 4 pour modifier la politique vaccinale par le BCG sont atteints, permettant d’envisager des modifications de la vaccination, la vaccination ciblée des nourrissons à risque ayant la préférence. Cependant, derrière cette stabilité il existe en fait une grande disparité de l’incidence de la tuberculose, qui demeure très élevée pour certaines régions : Ile de France, Région PACA, Alsace et qui concerne les populations migrantes ou issues de l’immigration. D’autre part, il faut tenir compte de l’introduction récente du BCG souche « Copenhague » (produit par le Statens Serum Institut du Danemark) et de l’arrêt de production du BCG par applicateur (bague Monovax®) le 1er janvier 2006.

En conséquence, l’Académie nationale de médecine fait les recommandations suivantes :

La suppression totale de la vaccination par le BCG en France ne paraît pas possible à ce jour en raison de la persistance de la maladie tuberculeuse avec une incidence trois à quatre fois plus élevée dans certaines régions et pour certaines populations dont les malades peuvent être difficilement accessibles pour suivre un traitement antituberculeux nécessaire mais contraignant. La vaccination ciblée des enfants à risque, vivant en général dans des familles originaires de pays de forte endémie au contact d’adultes atteints de tuberculose bacillifère, est donc une orientation possible mais dont l’application effective est difficile.

Toute modification de la politique vaccinale du BCG implique la refonte du plan de lutte antituberculeuse en France . En effet, la suppression de la vaccination par le BCG obligatoire, remplacée par une vaccination ciblée, ne peut être acceptable que si la lutte antituberculeuse (politique de dépistage, de traitement et de surveillance) est révisée en priorité et appliquée avec rigueur à toutes les régions. C’est actuellement l’objet d’une réflexion des autorités de santé publique qu’il faut donc encourager. La redéfinition des moyens à l’échelon du département ou de la région semble le préalable à toute modification de la politique actuelle de la vaccination BCG. Dans une telle perspective de réorganisation globale de la lutte antituberculeuse, la perception du ciblage vaccinal devrait être perçue favorablement par les professionnels de santé et les personnes concernées.

La disparition du Monovax® et le changement de la souche du vaccin

BCG intradermique (ID) en France sont à prendre en compte pour apprécier la portée de ces différents scénarios. L’Académie nationale de médecine regrette que la possibilité de la vaccination par applicateur (multipuncture ou bague) soit très prochainement supprimée car elle assurait plus facilement que la voie intradermique une couverture vaccinale satisfaisante pour les « jeunes nourrissons ». Cette disparition du BCG Monovax® oblige à envisager, éventuellement et dès maintenant, une adaptation de la loi vaccinale aux circonstances actuelles. La pratique exclusive de la voie ID nécessitera une formation rapide et généralisée de tous les médecins vaccinateurs, qui vont se trouver simultanément confrontés à la persistance de l’obligation vaccinale conjointement à la disparition du BCG par applicateur. A ce sujet, on s’inquiète de la réactogénicité plus forte de la souche de BCG « Copenhague » dont les effets adverses devront être particulièrement surveillés.

L’Académie nationale de médecine recommande fortement que les autorités sanitaires veillent au renforcement de la lutte antituberculeuse qui devra être coordonnée avec la nouvelle pratique vaccinale et une éventuelle introduction de la vaccination ciblée par le BCG à la place de la vaccination généralisée obligatoire.

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L’Académie, saisie dans sa séance du mardi 28 juin 2005, a adopté le texte de ce communiqué à l’unanimité.

 

* Constitué de MM. ARMENGAUD, BAZIN, BÉGUÉ (président), BUISSON, DENIS, DUBOIS G., FROTTIER (secrétaire), GIRARD, LAVERDANT, LE MINOR, REY. ** Président de la Commission VI : Jacques FROTTIER. *** Membre de l’Académie nationale de médecine. 1. Union Internationale contre la tuberculose et les maladies respiratoires.

 

Bull. Acad. Natle Méd., 2005, 189, no 6, 1335-1336, séance du 28 juin 2005